30 juillet 2017 - suite (M)

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Mathieu – 34

Je me réveille en sursaut. Quelques gouttes de sueur viennent à la rencontre de mes yeux. A moins qu'il ne s'agisse de larmes. Je ne veux pas savoir. J'ai rêvé de ça. Des années que ce n'était pas arrivé. Je ne sais pas si je dois en vouloir à Nathan ou à Arthur. Ou aux deux en même temps. Ils ont remué bien trop de choses.

J'ai rêvé de lui comme s'il était encore là. Pourtant, ce n'est plus le cas. Je n'en ai pas la preuve, je ne suis pas allé voir. Mais je sais qu'il n'est plus là. Je dois me changer les idées, absolument. Alors, oui, je vais partir à San Diego. Et téléphoner à Bastien aussi. Les billets pris, je me lève et m'habille rapidement grâce à la valise ramenée par le concierge. Il faudra que je lui laisse un large pourboire.

« Bonjour Mathieu, entends-je alors que je viens d'ouvrir la porte à l'instant.

— Salut, dis-je avec une voix roque.

— Je ne savais pas que tu pouvais dire de tels mots, se moque-t-il.

— Sans commentaire. Je n'imaginais pas que ton appartement serait autant baigné de soleil, pour être honnête.

— Il faut bien, pour compenser tout ce que j'y entends. Installe-toi, j'ai préparé quelques petites choses pour que tu prennes des forces. Tu vas où alors ?

— Tu entends quoi ?

— De rien, avec joie Suprême, me répond-il en insistant, avant d'éclater de rire.

— Excuse-moi, mais le début de ta phrase m'interpelle. Tu y entends quoi pour que tu sois si pessimiste ?

— Jette un œil là-haut.

— Une mezzanine, d'accord, et alors ?

— C'est un étage qui donne sur l'escalier. Je suis psychothérapeute. Et comme je suis jeune, pas encore psychologue, je suis moins cher, donc j'ai beaucoup de patients. Puisque je n'ai pas le droit de traiter les pathologies, j'ai tendance à avoir des patients dont les récits sont émus ou émouvants. Le soleil me permet d'éviter de sombrer avec eux, précise-t-il avec beaucoup de sérieux et de rigueur.

— Je comprends. Et tu peux faire des consultations sans être psychologue ?

— Je prépare mon PsyD, c'est le doctorat de psychologie. En attendant, avec mon master, j'ai la base.

— C'est intéressant, dis-je sincèrement en entamant la brioche qui m'est offerte.

— D'ailleurs, j'ai une question à te poser, si tu veux bien me répondre. Ce serait m'aider dans ma réflexion. Ma thèse va porter sur le milieu SM, tu crois que tu...

— Je t'ouvrirai les portes de mes clubs si tu le souhaites, le coupai-je.

— Merci beaucoup Mathieu, c'est très aimable. Tu viens de m'enlever un poids...

— Avec tout ce que tu as fait cette nuit pour moi, il ne pouvait en être autrement.

— Et si j'ai une autre question, plus personnelle ? tente-t-il pendant que j'acquiesce. Pourquoi as-tu dit à Nathan que tu l'aimais alors que tu ne l'aimes pas ? ».

Parce que dans ce foutu carnet j'ai tous mes souvenirs, que j'ai pensé à lui et que je me suis laissé emporter. Parce que j'ai embrassé Nathan en pensant l'embrasser. Parce que je lui ai dit je t'aime en pensant lui dire à lui. Et parce que je ne peux plus lui dire.

« La peur d'être seul sans doute, tentai-je. J'imagine que j'ai dû me sentir faible.

— C'est un peu ce que tu disais dans ton interview, je crois, les failles du protecteur. Je l'ai lue cette nuit. D'accord... Et sinon, tu pars où finalement ?

— Retrouver Andy. Moi aussi j'ai envie d'apprendre à le connaître. Normalement ».

Suprême Mathieu - S.M. (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant