Chapitre 3

4.9K 353 109
                                    

Trois jours passèrent, toujours avec cet horrible temps de pluie. Soraia commençait enfin à se repérer dans l'immense maison. Son mauvais sens de l'orientation exaspérait Joâo au plus haut point, dont le visage crispé traduisait ses nombreuses critiques.

– Ses yeux.

La voix de son petit frère tira le mafieux de ses pensées. Ils étaient tranquillement assis dans le salon, attendant que la jeune femme finisse le repas.

Il lança un regard à Inacio, intimant celui-ci de continuer sa phrase.

– Violets. Ils sont violets.

L'homme haussa les épaules tout en replongeant l'attention sur le livre qu'il lisait :

– Oui, j'ai vu.

– C'est splendide.

– Probablement des lentilles. Ricana l'homme aux cheveux noirs.

– Non : ses papiers d'identité l'approuvent.

– Bien, c'est simplement une petite touche de mélanine différente par rapport aux tiens, tu sais.

– Mais ne trouves-tu pas ça magnifique ?

– Si, probablement.

Joâo était un véritable misanthrope, détestant l'homme d'un sentiment dangereusement profond. Il ne parlait que rarement, si ce n'était jamais, et ne s'était réellement ouvert qu'à son frère Inacio. Même ses parents n'avaient pas le mérite de recevoir un quelconque signe affectif de la part de leur fils aîné. C'était là l'une des conséquences de l'éducation qu'il avait reçue.

Joâo était un héritier. Héritier de la couronne qui repose sur la tête du Parrain de la Mafia Européenne. Son père gouvernait, et il allait sans tarder être le suivant.

Le prochain homme dont le visage même fera fuir les papillons.

N'attendant pas plus d'attention de la part du brun, Inacio s'était de nouveau penché sur son ordinateur lorsqu'une voix féminine parvint à ses oreilles :

– Le repas est prêt.

Il regarda sa montre. Treize heures pile. Il fallait avouer que cette fille était strictement à l'heure, c'était parfait.

Il se leva tranquillement et s'assit à la table de bois aux côtés de son frère. De la marmite sortait une succulente odeur de poulet au curry et Joâo se servit en premier, commençant à manger sans même prononcer un simple « bon appétit ». Malgré les deux repas que la brunette avait déjà passés avec eux, le mafieux apercevait très bien le doute dans ses yeux et l'invita donc à s'asseoir à ses côtés. Elle gardait une certaine distance, et on lisait dans son comportement à quel point ses deux nouveaux patrons l'impressionnaient.

Ils étaient puissants, et c'est comme si une enveloppe lugubre entourait leurs deux corps. Mais pourtant, elle mangeait à leur table et leur violence s'était pour l'instant limitée à ces regards noirs qu'on lui lançait.

Ils donnaient l'impression de n'être habités que par la rage. Et n'en semblaient pas malheureux, loin de là. Comme si la haine qu'ils connaissaient avait été forgée pour créer une nouvelle forme de bonheur.

Les deux garçons mangeaient tranquillement. Aucune critique ne sortait de leurs bouches lorsqu'elle préparait un repas, et elle n'arrivait toujours pas à s'y faire : chez elle, dès qu'elle faisait quelque chose, on décrivait toujours son plat de façon négative. Parfois, la discussion montait dans les tons, et elle finissait par devoir tout recommencer. Certains jours, ils étaient de si mauvaise humeur qu'ils la privaient de repas, la laissant le ventre vide plusieurs heures d'affilée à tel point qu'elle en frôlait parfois le malaise.

Longue vie au prince JoâoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant