Chapitre 14

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Soraia s’était décomposée en apprenant que ses patrons devaient partir en voyage d’affaire, pour une durée indéterminée. Deux jours ou une semaine, avaient-ils dit. Mais qu’est-ce qu’elle allait bien pouvoir dire à son père ? Cette irrégularité allait à coup sûr l’énerver et elle allait encore une fois lui servir de défouloir.

Ses supérieurs lui avaient tout de même demandé de passer tous les jours à la villa, afin de profiter qu’il n’y ait personne pour nettoyer toutes les pièces sauf leurs bureaux, leurs chambres, et une partie du sous-sol. Des chiens allaient être lâchés sur la propriété pour veiller à la sécurité et on lui demanda donc de les prévenir des horaires qu’elle allait utiliser afin qu’on rentre les animaux, apparemment dangereux et agressif face à des inconnus.

La brunette se demanda à qui appartenait ces canidés, mais n’eut pas le loisir de poser la question. Et de toute façon, la lueur presque meurtrière qui brillait dans les yeux des deux hommes lui intimait de se taire.

Elle arriva donc ce sept novembres au matin, pour se retrouver seule dans l’immense bâtiment. Alors qu’elle marchait dans la grande allée centrale, la jeune fille parcourut le jardin du regard, à la rechercher des chiens. Mais à sa grande déception, aucun n’arriva : ils avaient bien été rentrés. Son amour des animaux négligeait le danger prévenu, et elle aurait bien aimé les voir. Alors, sagement et comme à son habitude, elle rentra dans la villa, posa son manteau et son téléphone à l’entrée et commença son travail. Nettoyer, et toujours nettoyer.

La jeune femme rentra chez elle vers midi. En bus, comme d’habitude. Arrivant chez elle, elle se rendit discrètement dans la cuisine pour préparer le déjeuner. Un Bœuf Stroganov devrait pouvoir faire l’affaire et satisfaire son père. Le plat typique russe devrait favoriser une humeur pas trop mauvaise venant de sa part. Elle cuit donc tranquillement les pâtes, et les lamelles de bœuf dans une sauce à la crème. L’odeur alléchante qui lui montait aux narines fit apparaitre un demi-sourire sur ses lèvres. Mais brusquement, une voix mauvaise parvint dans son dos, la faisant sursauter :

– Qu’est-ce que tu fous là toi ?

Elle se retourna calmement pour répondre à son père de la voix la plus posée possible :

– J’ai terminé le travail plus tôt aujourd’hui. Je vous avais prévenu hier, vous vous souvenez ?

Le cinquantenaire grommela dans sa barbe avant de répondre :

– Tamryn arrive dans un quart d’heure pour le déjeuner, j’espère que ce sera prêt.

La brunette blêmit. Le second fil de Prokhor était de retours. Et bien que ce ne fut pas toujours le cas, elle percevait actuellement ceci comme une mauvaise nouvelle.

Le blondinet arriva à l’heure dite. Un grand sourire illumina son visage lorsqu’il aperçut celle qui avait ce statut de petite sœur.

– Quelle bonne surprise ! Lança-t-il. Tu avais oublié de me prévenir que Soraia ne travaillait pas. Dit-il en direction de son père qui répondit par un simple haussement d’épaules négligé. La jeune femme resta immobile alors que le garçon l’embrassait sur la joue, avant de claquer brusquement des mains :

– Eh bien, passons à table !

Le visage de la brunette était blanc. Elle marcha de façon robotique et commença à manger en silence, observant le jeune homme de vingt-et-un an. Ils avaient tout juste un an d’écart. Parfois, ses yeux violets rencontraient le bleu froid des iris masculines.

Ça lui faisait mal au cœur de voir Tamryn. C’était un homme influencé par la violence de son père sur lequel il semblait avoir pris exemple. Dangereux, il n’avait à maintes reprises pas hésité à lui faire du mal. Contrairement à Prokhor, elle ne le haïssait pas. Elle n’y arrivait pas, comme si une petite voix intérieure lui disait qu'il n’était pas entièrement en tord, et que tout était en réalité de la faute de son géniteur. Mais ça ne l’empêchait pas d’en avoir peur. Peur de ses pulsions émotionnelles cédant régulièrement à la méchanceté verbale comme physique.

Longue vie au prince JoâoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant