Enlèvement et déchéance

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Il faisait presque nuit lorsque Théodore regagna le manoir. Épuisé, il sauta de sa monture et gravit deux à deux les marches de l'escalier pour s'engouffrer dans le hall. À son arrivée, tous les regards convergèrent sur lui, le scrutant avec une lueur d'angoisse mêlée d'espoir. Il était essoufflé et, après avoir toussé rauque, baissa la tête en guise de soumission, ne supportant nullement le regard implorant de Meredith ni celui de son père aux traits tirés.

— Je suis désolé, Irène est introuvable. Les de Rochester ainsi que les autorités viennent d'être mises au fait.

— Oh non ! paniqua la duchesse à la peau ambrée. Mais où est-elle ? Cela va faire trois jours, trois jours !

Ne parvenant plus à contenir ses larmes, elle s'effondra dans les bras d'Antonin. De son côté, Blanche tenait Modeste aux creux de ses bras et le berçait, tentant certainement de contenir sa peine devant l'assemblée en se focalisant sur ce petit être qui examinait passivement la scène sans comprendre le désastre.

— Ne cédons pas à la panique, dit posément Léopold également présent, elle ne doit pas être bien loin. Une annonce paraîtra dans les journaux demain, avec un peu de chance des gens se manifesteront pour nous aiguiller dans nos recherches.

— Trois jours Léopold ! N'est-ce pas assez suffisant pour vous inquiéter ? pesta Wolgang en perdant contenance. Personne ne sait où elle se trouve. Elle a manifestement disparu sans laisser de trace alors qu'elle quittait Chez Francine, ma boutique ! pour se rendre à mon domicile.

— Du calme Mantis, objecta le vieux marquis, rien ne peut nous affirmer que le clan von Dorff ou des gens de Wolden l'ont en leur possession. Ils se seraient au contraire manifestés si tel avait été le cas !

— Qu'en savez-vous ? maugréa von Eyre père. Qui nous dit qu'ils n'attendent pas patiemment que les noréens natifs envahissent notre ville lors du conseil tenu vendredi pour exiger une rançon et nous faire plier à cet instant histoire de nous ridiculiser devant nos potentiels alliés ?

— Voyons Mantis, vous allez trop loin dans vos tergiversions ! En quoi Irène serait un frein pour von Tassle ou même Rufùs Hani ? Quant à de Rochester il prendra également parti pour la cause la plus juste à savoir la préservation du plus grand nombre de vies. Cela ne laisse que vous et éventuellement ma voix pour s'opposer à cette alliance si jamais von Dorff menace de la tuer.

— Monsieur, jamais le Baron ne mettrait la vie de la duchesse en péril si jamais elle était menacée !

— Tais-toi fils ! Tu ne sais rien de von Tassle ! Tu penses que d'avoir travaillé pour lui pendant deux ans tu connais la volonté de cet homme ? Je ne sais pas ce qu'il te fourre dans le crâne mais von Tassle fera tout pour mener cette mission à bien et aboutir à cette alliance, et ce, quoiqu'il en coûte ! Il est impitoyable et je pense que rien ne lui fera plus plaisir que de me voir souffrir de la perte de ma femme !

— Quoi ? s'indigna Meredith qui devint aussi blanche que le carrelage à l'entente de cette justification. Mais... mais c'est faux ! Le Baron est peut-être tyrannique par moment mais jamais il ne fera payer ma mère et notre famille pour les erreurs de mon père !

— Comment osez-vous me contredire jeune impertinente ! L'ambition du Baron est simple, une signature imposée et la promesse d'un avenir préservé avérée. En quoi se soucierait-il de la vie d'une femme qui était de surcroît celle de son plus grand rival ? Von Tassle se fiche du titre, il ne compromettra pas la sécurité des habitants au profit de la vie d'une seule et unique personne ! C'est un fait !

— Dans ce cas jamais von Dorff ne s'abaissera à ce genre de chantage s'il sait que von Tassle refusera toute négociation, réfléchit Léopold avec diplomatie.

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