Chapitre 8 Klaus

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Mes yeux s'ouvrent sur une noirceur sans précédent. Un bruit sourd tambourine sur mes tempes alors que je peine à me redresser sans hurler à cause de cette fichue migraine. Je reconnais ma chambre, mes meubles, mes draps, mes rideaux jamais tirés qui le sont aujourd'hui.

Je râle, me massant le crâne dans l'espoir que la douleur s'atténue, je réfléchis à l'heure qu'il pourrait être. Combien de temps suis-je resté dans cet état comateux ? Je sors petit à petit du lit, l'estomac et l'esprit de travers, avant de me rappeler les sachets posés sous mon oreiller. Je les kidnappe avec un espoir enfantin, refaisant face à la lumière de la fenêtre.

J'observe les environs, le paysage disparaissant sous les croix gammées, un paysage aux teintes orangées automnal. Il y a de l'activité dehors, plusieurs groupes de soldats marchent avec tranquillité, toujours les mêmes officiers qui crient sans arrêt, les civils montrant leurs papiers d'identité. Encore une journée où les seules perturbations seront rythmées par nos envies éphémères de SS. Déjà fatigué du spectacle, je pars dans la microscopique salle de bain pour préparer la mixture qui devrait soulager tous mes maux. Je l'ingurgite d'une traite.

Mes pieds m'amènent dans le salon, où je trouve la pendule indiquant qu'il est presque 10h du matin. Je réfléchis, tout à coup honteux, réalise que j'ai passé près de seize heures sous la couette. Je n'aurais pas dû boire autant, surtout pas pour oublier le tempérament de Wagner...

Wagner.

Je commence à brièvement me souvenir. Ce même Wagner qui est resté avec moi je ne sais combien de temps, que j'ai vu boire, que j'ai vu me sourire pour la première fois... Ce même Capitaine que je déteste, m'a vu ivre et désinhibé. Je déglutis, ayant un mauvais pressentiment. Cet abruti va se servir de cette histoire de rien du tout pour m'avoir à sa botte.

Derrière moi, j'entends le serveur nettoyer le comptoir avec ce torchon trop rêche, le bruit du frottement sur le marbre me casse les oreilles. Je me tourne vers lui. Face à son visage fin et bien tracé se contenant d'être effrayé, je comprends que je dois avoir une mauvaise mine.

« C'est quoi ton nom ? Je lui demande.

– Hermann, monsieur.

– Tu étais là hier ?

– Euh... eh bien... Non, le Capitaine Wagner m'a congédié. C'est lui qui a dû rester avec vous hier soir. »

Mon cœur tambourine un peu plus.

« Depuis que je dors, quelqu'un est-il passé me voir à tout hasard ? »

Mes questions le surprennent un peu, il doit se dire qu'il fait face à un alcoolique amnésique. Le petit cherche ses mots, je comprends d'avance qu'il n'a pas le droit de me le dire, alors j'insiste.

« Vous pouvez me dire vous savez.

– Le Capitaine est venu à plusieurs reprises, mais vous étiez endormi. »

Il ne m'en faut pas plus. Je remercie le serveur, remontant en vitesse prendre une douche.

Profitant de l'absence de tout le monde dans celle-ci, je me délecte de l'eau chaude parcourant mon corps comme si elle l'avait toujours connu. La sensation sur mon épiderme me comble de joie, lave toutes les bêtises dites ou accomplis dues à mon excès d'alcool. Je frotte tout mon corps avec ce petit morceau de savon, en passe dans mes cheveux hirsutes. Je penche la tête en avant, rinçant mon crâne avec ferveur. Je souris comme un enfant, cela faisait beaucoup trop longtemps que mon corps n'avait pas joui d'un peu d'intimité.

Serviette accrochée autour de la taille, je me réfugie dans ma chambre, face au psyché. Omettant mes cernes encore violacés, j'ai retrouvé une mine acceptable. J'enfile mon uniforme, prêt à reprendre du service.

Le SociopatheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant