Chapitre 17, partie 2 : La Nuit des Longs Couteaux

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            Puis, se concentrant sur sa respiration afin de s'apaiser, le sergent finit par s'endormir d'un sommeil sans rêve. Ne dormant que d'un œil et sur une oreille.

Les uns après les autres, ses camarades de chambrée s'endormirent à leur tour. Et bientôt, seul un concert de ronflements régna sur le dortoir.

Le jumeau Gastoscius, partit en ville, n'avait pas eu à trouver d'excuse pour sortir du château. Les mercenaires, de faction aux portes, y firent à peine attention, tant ce soldat leur semblait insignifiant.. Il se rendit aussitôt dans un vieux tripot où il avait l'habitude d'aller en compagnie de certains de ses amis soldat.

Il courut presque jusqu'à l'auberge de La lanterne Rouge. Cet établissement, à la renommée douteuse, était un infâme lieu où les soldats venaient pour rencontrer des filles venues de tous horizons de l'Empire et au-delà. Les filles étaient en petite tenue et déambulaient entre les t ables des consommateurs. Se prenant des tapes aux fesses et se faisant tripoter par le premier bonhomme venu.

Toutefois, pour avoir plus, il fallait casquer.

Mais, c'est aussi dans cet établissement que l'on pouvait engager des voleurs, des assassins et à peu près tout ce que la ville à de plus louche dans son vivier. Malgré la présence de soldats, qui, d'ailleurs, faisaient tourner le commerce.

Comme il l'avait espéré en passant la porte, le jumeau tomba sur plusieurs de ses camarades de beuverie. Il fila donc vers eux. Ceux-ci le reconnurent et, joyeux de voir un autre comparse de beuverie, l'invitèrent à boire un coup avec eux.

Pourtant, leurs mines se firent plus sombres lorsqu'il leur révéla ce qui allait se passer très prochainement. Le fait qu'il étaye ses propos avec le médaillon de l'Ordre, que lui avait donné Cador, l'aida à être pris au sérieux. Bientôt, ayant fini leurs chopes, les soldats quittèrent l'établissement en embarquant leurs compagnons disséminés un peu partout avec les filles. Ils allaient répandre la "bonne parole" aux autres hommes de leurs régiments respectifs.

Le jumeau sourit. Il avait réussi ici, mais il lui restait encore un bon tour à faire.

Et, sortant de l'auberge, il se dirigea vers une autre taverne. Et ainsi de suite. Finalement, après avoir parcouru plusieurs lieux et fais le tour d'une dizaine de tavernes et auberges, le jumeau Gastoscius se dirigea vers une des casemates de la Porte du Roi. Il fut reconnu par les factionnaires qui prévinrent leur capitaine de garde.

Une fois encore, le jumeau raconta son histoire de trahison. Et, une fois encore, la présence du médaillon de l'Ordre attestait de la véracité de ses paroles. Quand bien même le capitaine avait encore quelques doutes. Tant cela lui paraissait gros, tout de même.

Mais, dans le doute, le capitaine fit sonner le branle-bas et parti prévenir ses hommes de se tenir prêts.

Au moment où le jumeau arbalétrier alla partir, le capitaine le retint juste un instant. L'officier tenait vraiment à ce que le sergent sache que si jamais il s'agissait d'une mauvaise farce, rien ne pourrait l'empêcher de le retrouver et de lui faire passer le goût de la plaisanterie.

Sa tâche à nouveau accomplie, le jumeau, hochant la tête à l'officier, quitta la casemate et s'engagea dans une rue parallèle à celle-ci. La nuit était maintenant bien avancée et il n'y avait pas même un chat dans la rue.

Malgré l'éclairage publique, il n'y voyait pas à plus de cinq mètres. Pourtant, il avança aussi vite que possible. Le temps pressait. La nuit étant bien avancée, il pourrait ne pas avoir assez de temps pour prévenir tous le monde avant qu'il ne soit trop tard.

Il vit une lueur se dessiner petit-à-petit devant lui, accompagnée de bruits de pas. Il posa la main sur la garde de sa dague, prêt à la sortir du fourreau. il souffla de soulagement lorsqu'il reconnut la patrouille de nuit. Des hommes des Forces Régulières.

Il les salua de la tête et son salut lui fut rendu par les cinq soldats composant la patrouille. Il les dépassa rapidement et bientôt, même la leur de leurs torches disparue.

Le jumeau Gastoscius se dit qu'il aurait pu les prévenir également, mais de toute façon ils étaient trop loin et l'auraient sûrement emmené au poste de garde, afin qu'il y passe la nuit, sans pouvoir rien expliquer de plus.

Il se remit donc en marche.

C'est à ce moment-là qu'il entendit un coup de feu. Aussitôt suivi d'un vrombissement à son oreille droite.

On lui avait tiré dessus.

Le jumeau chercha alors à se mettre à l'abri, comme d'autres tirs fusaient dans sa direction.

La chance voulut qu'aucun projectile ne le touche, pourtant il ne trouva aucun autre abri que la charrette du fossoyeur. Là, il tira sa dague et prit son pistolet dans son autre main. Puis, il se risqua à jeter un coup d'œil par-dessus la charrette.

Il ne vit rien d'autre que la rue endormie. Pas âme qui vive.

Puis un éclair, suivit par un bruit de tonnerre apparu devant lui. Le bois de la roue qui lui cachait une partie du visage explosa en copeaux tranchants. L'un des éclats alla se loger dans sa joue droite.

Il grogna de douleur puis se rabaissa.

Il fallait qu'il bouge de là. Et vite. Sûrement, qu'en courant le plus vite possible il pourrait distancer ses assaillants et parvenir à trouver refuge auprès des hommes de Vellocastus. Leur caserne n'était plus très loin. Seulement à quelques rues de là.

Le jumeau se mit alors à courir, remontant la rue au pas de course. D'autres coups de feu retentirent aussitôt.

Les projectiles éclatèrent le bois des maisons et les briques autour de lui, mais Gastoscius ne s'arrêta pas. Il parvint tant bien que mal en vue de la caserne.

Les quatre factionnaires étaient en train de discuter à la lueur de torches, alors que la porte était fermée. Ils ne le virent, ni ne l'entendirent pas arriver.

Ce fut un autre coup de feu, un de plus, qui les alertèrent. Les soldats abaissèrent leurs hallebardes et cherchèrent l'origine de ces coups de feu. C'est alors qu'ils virent arriver en courant un sergent, aux couleurs d'un régiment d'arbalétriers, affecté au château du baron.

Le jumeau leur fit des grands signes et hurlait "trahison ! Trahisons !" Les soldats ne comprenaient pas ce qu'il se passait. Se regardant les uns, les autres, sans véritablement quoi faire. Mais, ils virent soudain une dizaine d'hommes derrière l'arbalétrier, cherchant à abattre celui-ci de leurs pistolets

L'un des factionnaires ordonna que l'on sonne la cloche d'alarme. Et bientôt, le vacarme provoqué par les tintements répétés de la cloche mirent en émoi toute la garnison.

Mais cela n'arrêta pas les dix meurtriers. L'un de leurs tirs parvint à trouver sa cible. Le jumeau arbalétrier se cabra soudain et s'effondra au sol. Il n'était pas mort, mais la douleur était insupportable. Il rampa vers les factionnaires, ces-derniers coururent alors à sa rencontre.

Mais, l'un des meurtriers fut sur l'arbalétrier avant eux et lui planta un poignard dans le dos, avant de s'enfuir. Mais, ce faisant, il laissa paraître un pan de son uniforme. L'un des factionnaires en reconnut les couleurs : c'était un uniforme d'une des troupes de mercenaires engagés par le baron.

Les assassins prirent la fuite lorsque les hallebardiers furent presque sur eux. Ils disparurent bientôt dans les ténèbres de la nuit, devenant des ombres.

Les factionnaires ne cherchèrent pas à les poursuivre, s'occupant de l'homme blessé. Il s'agissait bien d'un arbalétrier et il était sergent, comme ils le découvrirent, au vu de ses insignes d'uniforme. Les hallebardiers le portèrent jusqu'au hall d'entrée de la caserne. Mais là, l'arbalétrier s'effondra. Ses blessures étaient graves et il avait déjà perdu beaucoup de sang.

Le capitaine de garde des hallebardiers apparut soudainement et se pencha sur le malheureux. Si un médecin ne le prenait pas en charge immédiatement, ce pauvre homme allait mourir.

L'Epée de Justice, livre I : Lohrâ  -Récit terminé -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant