Chapitre 13, partie 3 : Le dernier tunnel

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            Le monstre se redressa de toute sa hauteur, dominant un Cador qui ne pouvait esquisser le moindre geste pour se défendre. Le kevnidenn s'apprêtait à attraper le chevalier dans une de ses puissantes pinces, afin de le broyer et de le couper en deux. Mais un bruit l'arrêta dans son geste et le fit se retourner.

Les réflexes, très rapides, du monstre surprirent Vellocastus. En effet, celui-ci voyant le chevalier en difficulté, avait ramassé la lance d'or du premier kevnidenn et avait chargé droit sur l'autre monstre.

Hélas, sa charge rata. Il parvint tout de même à passer entre les pattes du kevnidenn, évitant la riposte du monstre. Mais, ce faisant, il se retrouvait seul, à découvert et à la merci du mort-vivant géant et aux multiples pattes.

Le kevnidenn, malgré sa mort, l'avait bien compris.

Devenu une proie beaucoup plus facile désormais, le sergent dut faire face seul au monstre. Pourtant, avec courage il tint tête au kevnidenn, ayant lâché la lance, bien trop lourde pour lui, pour reprendre son épée et son bouclier. Ainsi put-il contrer les furieux assauts de son monstrueux adversaire.

Si le fait qu'affronter un monstre mort-vivant permettait au sergent de pouvoir le combattre plus aisément, car il était de notoriété publique que ceux-ci avaient leur réflexes et leur temps de réflexion sérieusement amoindris, il était tout aussi populaire et vrai qu'ils ne fatiguaient jamais. Au contraire de Vellocastus.

Le kevnidenn parvint, d'un coup puissant, à désarmer le sergent qui alla s'écraser au sol, deux mètres plus loin, après un vol plané.

Vellocastus eut à peine le temps de rouler sur lui-même, évitant, par la même, la mortelle pointe de la lance d'or de son adversaire.

Le sergent, ayant perdu, et son épée et son bouclier, se rua sur l'arme la plus proche : la lance du premier kevnidenn.

S'y agrippant comme un naufragé à une bouée, le sergent se retourna pour faire face à son terrible ennemi. Il livrait là son combat le plus intense à ce jour. Plus intense encore que lors de la Grande Guerre des Sorciers.

Mais, le monstre ne cherchait pas à jouer avec lui. Il ne cherchait qu'à le tuer, puis, à se repaître de sa chair.

Les échanges de lances ne durèrent pas longtemps. Vellocastus, épuisé, finit par être à nouveau désarmé. Son arme s'envola de ses mains, pour aller rouler plusieurs mètres plus loin. Il était désormais à la merci du kevnidenn.

Le sergent adressa alors une courte prière à Lugdum et son fils Lugos, dieu de la guerre et des guerriers, espérant s'être montré digne d'eux, et ainsi espérer rejoindre leur armée vengeresse dans l'au-delà.

Un claquement sourd résonna entre les murs de la salle.

Poussant un horrible cri de douleur, le kevnidenn s'arrêta dans son geste, avant de se tourner vers la source de ce bruit et de cette si désagréable blessure.

Le monstre croisa le regard d'un Cherche-chemin apeuré.

Lorsqu'il avait vu le sergent s'occuper du kevnidenn, l'ancien voltigeur était allé auprès de Cador, toujours inconscient, mais vivant et sans de trop graves blessures. Toutefois, alors qu'il voyait le sergent en grande difficulté, Cherche-chemin avait alors réagis d'instinct. Ramassant la première arme qui lui était tombée sous la main : un des pistolets du chevalier.

Priant pour qu'il soit chargé, Cherche-chemin ajusta son tir, comme il avait appris autrefois, puis, d'une main assurée, avait pressé la queue de détente. Le coup, plus puissant qu'il ne le pensait, avait légèrement dévié et touché le monstre dans son gigantesque abdomen. Toutefois, la balle, faite d'argent béni et imprégnée de magie justicière à l'encontre des monstres et autres démons, avait occasionné là, plus de dégâts qu'une balle ordinaire. C'est ce qui sauva le sergent.

Mais c'est également cela qui fit que le kevnidenn s'intéressa soudain à l'ancien voltigeur.

Devenu soudainement nullement intéressant, le sergent en profita pour s'emparer, à nouveau, de la lance. Prêt à affronter, encore une fois, le kevnidenn.

Ce-dernier se jeta en avant, avec l'évidente intention, d'écharper les intrus, en commençant par celui qui avait eu l'audace de le blesser.

Levant sa lance dans sa course, le kevnidenn frappa aussitôt qu'il fut sur Cherche-chemin. L'ancien voltigeur eut tout juste le temps de fuir sur le côté. La pointe de la lance lui frôla dangereusement le dos.

L'homme recula aussi vite qu'il le pouvait et alla se mettre à l'abris dans la canalisation. Le kevnidenn le poursuivit, mais, si Cherche-chemin parvint sans mal à passer dans la canalisation, ce ne fut pas le cas du monstre gigantesque. En effet, si la canalisation était déjà assez basse pour l'obliger à se baisser, le cadavre de son congénère lui barrait purement et simplement le passage.

Il frappa frénétiquement, cherchant à tuer ses cibles. Mais le peu de conscience qu'il lui restait ne lui permettait pas de réfléchir et de pousser le corps de son défunt congénère. Il se bornait à frapper et à hurler sa haine et sa rage, sur ces odieux et impudents petits humains.

Il hurla brusquement de douleur.

Vellocastus, profitant de ce que le kevnidenn avait le dos tourné, s'était approché à pas de loup et avait visé un des points faibles de la créature.

Le kevnidenn fut secoué de soubresauts et bougea en tout sens, mettant au défi la résistance du sergent, toujours accroché à sa lance, ne voulant pas lâché prise. Puis, comme la bête se cogna contre le mur, la lance se détacha de son corps et Vellocastus repartit à l'attaque. cette fois-ci, il poussa de toutes ses forces et parvint à toucher le cœur de la bête, qui stoppa net ses mouvements désordonnés.

Puis, comme si un ressort venait de se libérer, le kevnidenn sursauta une dernière fois, avant de tomber sur le dos et de replier ses pattes dans une raideur cadavérique.

Toute la magie noire qui habitait ce corps disparut subitement, n'ayant désormais plus d'attache à ce corps.

L'Epée de Justice, livre I : Lohrâ  -Récit terminé -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant