Les survivants avaient commencés à enlever les corps jonchant les rues et les taudis qui leurs servaient de maisons. Ils regroupèrent leurs morts dans des fosses communes dans certains tunnels dédiés aux trépassés, situés aux abords de la cité. Le hall du donjon avait été débarrassé des cadavres depuis quelques heures et quelques servants s'échinaient à laver les traces de sang.
Le roi des Petits Rats attendait, au milieu du hall, les trois compagnons, accompagné de son fils et Cherche-Chemin.
Cador s'approcha du roi.
" Chevalier, je ne vous remercierai jamais assez pour votre aide, à tous les trois, lors des tragiques évènements de la nuit dernière.
- Inutile de nous remercier, roi. Répondit Cador. Notre devoir est de protéger les citoyens impériaux. Tous les citoyens. L'Empire aura bientôt besoin de vous et si vous estimez avoir une dette à payer, alors vous pourrez toujours l'honorer lorsque nous ferons tomber cette maudite sorcière, en nous y aidant.
- Je serai au rendez-vous, soyez-en certain. Avec ou sans armée, j'y serai.
- Je n'en doute pas un seul instant. Nous allons reprendre la route, je ne sais pas combien de temps il nous faudra pour parvenir jusqu'au château, j'espère le moins de temps possible. Chaque jour qui passe permet à cette damnée sorcière de renforcer ses pouvoirs.
- Alors ne traînons pas si je puis me permettre chevalier. Fit Cherche-Chemin.
- Cherche-Chemin a raison. Tous mes vœux de réussite vous accompagnent. Je prierai Lugdum de vous apporter force et discernement dans votre jugement. Que brûle l'Hérésie...
- Et que meurt les hérétiques. Compléta Cador. Au revoir, roi."
Sur ces mots, le petit groupe se mit en route en direction des tunnels reliant la Cité Souterraine au château du comte. Vellocastus inclina légèrement la tête lorsqu'il passa à côté du roi, afin de marquer son respect envers ce citoyen, négligemment jugé par ceux de la surface, comme il l'avait fait. Cet homme mériterait d'être un véritable roi. Ce-dernier retourna son salut au sergent.
Lohrâ se contenta de sourire, ne sachant pas franchement de quelle manière on devait s'adresser à un roi autoproclamé, d'un peuple de miséreux abandonnés de tous. Le roi des Petits Rats lui rendit son sourire et lui demanda de patienter un instant.
l lui tendit un petit paquet de tissu. Lorsqu'elle prit le paquet, Lohrâ constata qu'il était plus lourd qu'il n'y paraissait ; elle souleva le tissu découvrant ce qu'il cachait : un poignard d'argent.
Le roi lui expliqua qu'il était enchanté pour détruire, ou à tout le moins blesser grièvement, tout être des Puissances Sombres. Il avait appartenu à sa famille pendant des générations et la légende dit qu'il aurait été forgé par un maître Korrigan, il y a bien des siècles, en gage de reconnaissance envers l'un des ancêtres du roi.
Lohrâ comprit la portée du geste et la confiance que le roi plaçait en elle. Avec les repas que Cador lui avait offert, c'était le plus beau cadeau qu'on lui eut jamais fait. Ne sachant pas vraiment quoi dire, elle bredouilla un simple "merci" qui sembla contenter le roi puisqu'il lui sourit et la laissa partir.
Adiscius, toujours cramponné à son père était triste de voir partir aussi rapidement sa nouvelle amie. Il espérait, avec une certitude d'enfant, qu'il la reverrait bientôt pour prendre sa revanche sur cette bataille d'oreillers brusquement interrompue. Mais il ne parvint pas à s'empêcher de verser une petite larme lorsque la jeune fille passa la porte. Il s'ennuyait tellement, tout seul, ici...
Le petit groupe traversa la Cité souterraine sur toute sa longueur pour emprunter les bons tunnels. Ils eurent tout le loisir d'observer les dégâts de la trahison de Dancionnos. La pauvre cité des Petits Rats porterait pendant encore longtemps les stigmates de cette attaque. De nombreux bâtiments étaient détruits, par le feu ou par les vectitöden. La plupart des portes n'avaient pas tenu face à la horde et les corps inanimés de nombreux habitants morts jonchaient encore les rues de la cité. Les survivants s'affairaient à tout remettre en état le plus vite possible, avant qu'une épidémie ne commence à sévir et finir ce que les vectitöden avaient commencé.
Des patrouilles de gardes du roi fouillaient les maisons, les ruelles et les ruines afin de vérifier l'absence de vectitöden restant. Ils ne savaient pas que lorsque le sort qui les maintenait dans une parodie de vie avait été rompu, tous les morts-vivants étaient retournés à la mort instantanément. Le danger de cette horde était passé. Mais apparemment, on n'était jamais trop prudent ici.
La pauvreté du peuple de la Cité Souterraine était déjà affligeant, mais Vellocastus trouva cela encore plus dramatique : ces pauvres gens, rejetés par tous en surface, s'étaient vus poignardés dans le dos par un traître et une sorcière, sans que personne ne vienne jamais les aider. Sa vision des choses sur la cité dans son ensemble commençait à changer. Il se promit qu'une fois leur mission accomplie, il reviendrait ici, pour aider au mieux de ses moyens ces oubliés de l'Empire.
Lohrâ était très triste, elle aussi, pour ces pauvres gens, car d'une certaine façon elle était des leurs. Toutefois, elle n'était pas encore descendu sous la surface mais sa vie jusqu'à présent l'emmenait inexorablement vers cette destinée de miséreux et d'exilé. Elle réalisait à quel point sa rencontre avec Cador lui permettait de s'en sortir et peut être, d'échapper à un tel destin qui n'était pas de son goût.
Cador, lui, voyait surtout le danger que constituait ce peuple, s'il était asservi dans la non-vie à cette maudite sorcière. Il devait y avoir presque trente milles personnes ici avant l'attaque. Il imagina alors ces mêmes personnes, mortes, surgirent par toutes les galeries dans la cité en surface pour s'en prendre aux vivants. Ce serait un massacre et les habitants de Gervaldburg ne pourraient certainement pas contrer une telle attaque. Sans compter l'effet de surprise. La sorcière devenait de plus en plus dangereuse, il fallait faire vite. Très vite.
Après avoir traversé les rues jonchées de cadavres, le petits groupe s'engagea dans un tunnel, Cherche-chemin en tête. Celui-ci semblait savoir où il allait. Cador se rapprocha de lui pour en savoir plus sur le personnage.
" Dites-moi, Cherche-chemin, d'où vous vient ce surnom ?
- Ho, alors ça ; répondit en souriant l'intéressé ; ça me vient du temps où je servais parmi les voltigeurs du 12ème ! C'était juste avant la Grande Guerre des Sorciers, ma compagnie traquait depuis plusieurs jours un groupe de sorciers et de guerriers claniques affiliés à eux. A chaque fois qu'on pensait les avoir trouvé, on ne tombait que sur des camps abandonnés depuis longtemps. Cette histoire a duré pendant un bon mois, et finalement, j'ai pris sur moi de chercher le bon chemin après avoir fait remarquer que l'on se trompait, pratiquement, depuis le début. Du coup, notre capitaine m'a légèrement fait comprendre que je les lui hachais menu et m'a ordonné de chercher le chemin.
- Hum... Et vous l'avez trouvé ?
- Oui, dans la minute.
- Ha ? Et vous avez mis longtemps à trouver le groupe ennemi ?
- Non, ils étaient à cent pas derrière nous et s'apprêtaient à nous charger.
- On dirait que vous avez eu du flair ce jour-là.
- En tout cas ça n'a pas franchement aidé le capitaine : il a été tué par le chef clanique, une brute épaisse à la tignasse d'un noir de jais. On a perdu quelques copains ce jour-là. Mais on n'a pas laissé un seul sorcier et guerrier clanique s'en tirer. Ils avaient fait assez de mal comme ça.
- Qu'avaient-ils fait ?
- Ils avaient rasé une demi-douzaine d'auberges fortifiées le long de la route reliant la ville de Westerfeld à Krankdorf."
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L'Epée de Justice, livre I : Lohrâ -Récit terminé -
ParanormalAprès leur défaite, sorciers et guerriers Déchus sont retournés panser leurs plaies dans leur lointain pays. Ruminant leur défaite. Préparant leur retour sanglant. Toutefois, certains d'entre eux sont restés au sein de l'Empire, préparant le terrain...