Chapitre 8, partie 4 : De Noirs Tunnels...

56 8 0
                                    


            Lorsqu'elle rouvrit les yeux, Lohrâ se sentait mieux mais elle ne distinguait plus aussi clairement le tunnel. Même si cette impression oppressante n'était plus là, les ténèbres, elles, étaient toujours là.

Mais elles lui semblaient bien moins effrayantes, tout de même.

Elle referma les yeux et tenta de se concentrer à nouveau. Sans succès. Elle recommença encore deux fois avant d'abandonner. Elle avait dû rêver debout. Pourtant, elle se sentait plus calme et plus sereine. Plus détendue.

Satisfait de ce qu'il voyait, Cador, se relevant, fit signe à Cherche-chemin qu'ils pouvaient repartir. Ce-dernier acquiesça et ils reprirent leur progression dans le noir.

Cador resta près de Lohrâ. La jeune fille était perplexe mais semblait bien avoir retrouvé son courage. Le chevalier était fier de la petite. Il ne la connaissait depuis seulement trois jours, mais déjà, elle faisait montre d'une certaine, habileté avec ses dons magiques, dont elle ignorait l'existence jusqu'à maintenant. Le chevalier avait pu le remarquer, sinon, elle aurait pu régner sur la populace la moins aisée de la cité depuis bien longtemps. Vraiment, elle serait une recrue de choix pour l'Ordre qui, désespérément, cherchait à combler les rangs, suite aux lourdes pertes subies lors de la Grande Guerre contre les Sorciers. Il se pencha vers elle :

" Tu vas bien jeune fille ?

- Ça va, elle semblait plus déboussolée qu'il n'y paraissait...

- Qu'est-ce qui te tracasse à ce point ?

- Ben... Commença Lohrâ, mais elle avait un peu peur de se couvrir de ridicule en racontant à Cador ce qui venait de se produire; toutefois, elle lui avait bien raconter son cauchemar éveillé, alors...

- En fait, m'sieur l'chevalier, c'est qu'j'ai eu un drôle de truc quand j'ai fermé les yeux.

- C'est-à-dire ?

- Ben, j'me suis concentré sur c'que vous me disiez et puis d'un coup, j'voyais le tunnel comme si on était dehors en plein jour ! Comme ça, d'un coup ! Hop ! Fit la jeune fille à grand renfort de gesticulations.

- Je peux t'expliquer ça rapidement.

- Moi, j'veux bien...

- Tu as un don magique Lohrâ.

- Hein ? Un don, comme les sorcières là ?

- Presque, mais tu ne crains rien. Tu n'es pas une sorcière. Tu as juste une affinité particulière à la magie qui fait que tu peux l'utiliser de façon passive. C'est comme ça que tu peux entendre les pensées des gens, ou bien voir dans les Ténèbres comme en plein jour.

- Ha ? Mais, vous, vot'mission, c'est pas justement de tuer ceux qui font de la magie ?"

Lohrâ fut, soudain, prise d'un violent frisson. Elle avait peur. Elle ne voulait pas que le chevalier la tue, puis la brûle. Ou bien dans l'autre sens. Si elle faisait de la magie, même sans le savoir, ne risquait-elle pas de devenir une sorcière à son tour ? Elle se voyait déjà attachée à un poteau, au milieu des flammes d'un bûcher, que le chevalier Brycham, lui-même, aurait allumé. La panique commençait à la gagner quand Cador posa une main bienveillante sur son épaule.

" Tu n'as rien à craindre jeune fille. Ma mission est de repousser les Ténèbres et leurs serviteurs loin de l'Empire des Hommes, pas de tuer des petites filles ayant un don, qui pourrait être très utile à faire le Bien."

Lohrâ se calma un peu. Elle sentait la panique refluer de ses pensées. Le chevalier continua :

" Tu sais, tous les chevaliers de l'Ordre sont des magiciens.

- Même vous ? Demanda Lohrâ avec des yeux grands ouverts.

- Même moi. Mais il faut s'entraîner longtemps pour parvenir à les maîtriser correctement. Et même après plusieurs décennies de pratiques, il reste encore beaucoup à apprendre.

- Ben alors, du coup, qu'que vous allez faire de moi ?

- Et bien, pourquoi ne m'accompagnerais-tu pas à la capitale ? une fois que nous aurons régler cette affaire, bien entendu.

- A la capitale ? Avec vous ? Pourquoi faire ?

- Je pourrais te présenter au Triumvirat pour que tu sois acceptée au sein de l'Ordre... Par exemple."

Lohrâ n'osait à peine y croire. Elle pourrait devenir chevalier, elle aussi. Elle pourrait punir tous ceux qui font le Mal et protéger les habitants du pays ?Elle pourrait également fuir la vie qui a été la sienne jusqu'à présent : celle d'une petite fille obligée de voler et de mendier pour survivre.

Elle s'imaginait, déjà, sur un grand étalon blanc, fort, rapide, puissant, elle porterai une belle armure bien ouvragée, du meilleur acier, elle aurait aussi une grande épée et un fanion personnel. Et puis, pourquoi pas, un ou deux compagnons l'aidant dans sa tâche et sous ses ordres ?

Toute à ses pensées, Lohrâ reprit de plus en plus courage. Elle n'allait finalement pas finir comme les autres miséreux de Gervaldburg, de ne pas avoir de vie mais, souffrir tous les jours et ne se nourrir que de désillusion. Elle allait être chevalier !

Lohrâ ne s'était pas aperçu du temps qui était passé et de combien ils avaient avancé dans les tunnels sous la ville. Arrivés à un embranchement, Cherche-chemin s'arrêta brusquement, le reste du groupe l'imitant aussitôt.

Cador et Vellocastus posèrent immédiatement la main sur leurs épées, prêt à les sortir du fourreau. Tous leurs sens en alerte. Lohrâ, elle, sortit son poignard et imita, du mieux qu'elle pu, les adultes autour d'elle, faisant déjà, comme si elle était une chevalier.

Cador s'approcha du voltigeur et se pencha vers lui, afin de lui souffler :

" Qu'il y a t'il ? Un problème ?

-Il y a que nous sommes revenu à notre point de départ. "

L'Epée de Justice, livre I : Lohrâ  -Récit terminé -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant