Vannée, mais toujours énergique pour écouter de la musique, je m'installe sur mon pouf en forme de poire, gigantesque et indispensable dans ma piaule, juste en-dessous du velux géant que mon père a fait installer sur le pan du toit de ma chambre. J'ai alors une vue sublime sur les toits de Paris, et au loin, la tête illuminée et radieuse, comme toujours depuis plus de cent ans, de la Dame de Fer.
Vautrée dans ma poire, douchée et donc débarrassée de cette odeur atroce ambiante de chez Tonton Ronald's, je glisse mes écouteurs sur mes oreilles et lance ma bibliothèque de musique enregistrée sur mon téléphone portable.
Mon père, un peu dépassé par les nouvelles technologies, m'assomme à chaque fois qu'il me voit écouter de la musique avec cet appareil en me rappelant qu'à son époque, au même âge, en 1985 par-là, il écoutait la musique avec son walkman cassette audio-reverse et qu'il n'avait pas accès à autant de musique qu'aujourd'hui. Et que je ferais mieux de m'en inspirer. Je lui rétorque, toujours la même chose, que c'est quelqu'un qui a plus de cinq cents Cd's originaux ou Vinyles qui vient me parler de limite en termes de durée de musique.
La voix mélancolique de Billy Corgan vient frapper mes tympans comme une vague vient s'écraser sur le sable, la nuit, doucement, calmement. Ses textes torturés viennent prendre de la force en s'abattant contre mon cœur. Un cœur meurtri, encore, qui n'a pas réussi à trouver en la musique la force nécessaire pour se reconstruire pleinement et durablement.
Comme une cheville cassée, mon cœur est fragilisé à vie. Ma mère a beau me répéter sans cesse que je trouverais quelqu'un, un jour, au détour de ma vie, qui pourra, de ses mains, reconstruire le cœur brisé et affaibli de sa petite Ambre chérie, je n'y crois plus.
Mes trois compères ont tenté durant toute cette partie de l'année de s'en charger. Sans réel succès. De notre rencontre, à ce soir, ils continuent sans cesse ce travail de longue haleine qu'est de me remettre sur pied. Ils ne connaissent pas du tout mon histoire, mais le soir où je les ai rencontrés, leur présence a été plus que salvatrice. Je ne leur ai jamais dit, mais sans eux, sans leur accueil chaleureux au sein de leur trio, ma vie aurait pu définitivement partir en sucette. Bien plus qu'elle ne l'avait déjà été. Mais de manière irréversible, irréparable cette fois-ci.
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- Aaaaambre, putain, à table !
- Mmmmhhhh, fais pas chier !
- Je te fais iech si je veux !
- Mmmmhhh...
Consciente que je ne suis pas en position de force pour convaincre ma sœur, ce boulet, de me laisser tranquille, je sors de mon lit, bougon et encore fatiguée.
Le réveil affiche digitalement 11h45. J'ai exactement quinze minutes pour ôter mon pyjama, enfiler des fringues propres et me pointer à midi pile à ma place autour de la table familiale dans la cuisine. L'odeur du poulet grillé et de purée me donne la motivation nécessaire pour me battre avec mon jeans fétiche déchiré au genou, et y faire rentrer mon gros derrière dedans. Une fois engoncée dedans, j'enfile mon vieux tee-shirt « Jesus was a Punk », et mes pompes favorites. Mes petons au chaud dans leur Puma Suede, je file jeter un coup d'œil bref de ma tronche dans le miroir. Ma sœur se tient derrière moi :
- Pas la peine de vouloir faire quelque chose, t'as la che-tron que tu as !
Comme convenu avec moi-même, je ne réagis pas à sa phrase moisie et l'ignore du mieux que je peux en filant à la cuisine. Comme le corbak avec son fromage dans son bec, le Renard par l'odeur alléchante et toutes ces conneries de fables, je m'installe fissa et prends mes couverts en main, réclamant ma pitance.
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De Rock et de Feu
FanfictionLa rencontre entre deux mondes différents... Ambre ne vit que pour le rock, sa basse, son groupe et sa tignasse. Tout ça l'aide à oublier un passé récent douloureux et tragique. Pour remonter la pente, elle partage sa vie entre les répét', son job c...