Finalement, ma séance d'exorcisme ne dure que 3 minutes et 55 secondes, suffisamment pour me sentir comme libre à l'accord final. Mes larmes se retiennent d'elles-mêmes, même après la fin de la chanson, elles restent sagement à leur place. Elles me démangent, trépignent, et sans pouvoir faire quoi que ce soit contre, je les finalement laisse sortir, s'abattre sur mes joues. Je me retourne, face au mur, histoire de ne pas leur imposer ce moment d'une tristesse convenue, mais rien n'échappe à l'œil aguerri et amical de James. Tous les trois, dans un silence de plomb, viennent m'entourer avant de me serrer fort dans leurs bras musclés. Mes larmes anesthésient à nouveau le contact de mon corps aux leurs. Je resserre même mon étreinte pour les sentir encore plus contre moi. Et cela provoque en moi un océan de tendresse, une redécouverte pour moi.
- Pardon, Ambre, je ne pensais pas que cette chanson avait une réelle signification douloureuse pour toi.
Ils ne savent rien. Savent juste qu'ils ne sauront certainement jamais rien. Et s'en contentent, comme moi. Je me demande, alors qu'ils sont là pour moi depuis le début de cette année, pourquoi je me suis décidée à en parler à un mec rencontré il y a une semaine. Parfois, en tant qu'être humain, on agit de manière contraire à ce qu'on aurait pensé. Et si on le fait, je pense que c'est parce qu'au fond de nous-même, on doit penser qu'on fait le bon choix. Mais avoir laissé Antoine rentrer dans ma vie, de manière si rapide et « profonde », est-il un réel bon choix ?
En marchant vers l'appartement, le pas lourd, l'envie de rentrer et de ne plus rien faire, mon téléphone vibre dans la poche de mon short en jean. Un appel en cours, que je prends :
- Allô ? j'introduis d'une petite voix.
- Ambre, c'est Antoine, ça va ?
- Moui, un peu crevée.
Je préfère passer sous silence ma répétition qui m'a vidée, fatiguée et fait chialer comme une madeleine.
- On est chez Lo. Tu veux nous rejoindre ? On a presque fini, comme ça après on peut aller manger ou bouger à une soirée...
- Je sais pas, Antoine, je suis crevée...
- On y fait de la musique, tu sais. Tu l'as dit toi-même, viens t'injecter un peu de ton antidote... on t'attend !
Il raccroche ne me laissant pas vraiment le choix. « On » t'attend ? Le on de « Moi, Flav, les autres et... Ken » ? Mon portable revibre, indiquant qu'un message attend d'être ouvert. Antoine m'indique l'adresse où me rendre. La basse sur le dos, je me dirige alors vers l'adresse où « on » m'attend.
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Je sonne, et monte à l'étage que me donne Antoine à l'interphone. Je rentre dans un appartement, pas très grand de visu, plutôt bordélique, décoré d'affiches de concerts, de groupes de ce que je suppose être des artistes de rap, de personnages de Bande Dessinée. Antoine m'attend et me fait signe de le suivre. Il ouvre une porte et je me retrouve dans le fameux « stud' ». De fortune ; mais foutrement bien agencé. Sur une table trône une platine, une table de mixage, un Mac, deux micros et des casques audio. En face, un grand canapé, dont le tissu donne l'air d'avoir vécu est occupé par les fesses du crew. Tout le monde est là : Alpha, Areno, Sneaz, Lo, Doums, les deux frangins (Mekra et Fram' quelque chose, si j'ai bien tout compris - rien n'est moins sûr) et un mec que je n'avais pas encore vu, et bien entendu Ken.
- Salut ! je lance à l'ensemble de l'assemblée.
- Tu viens pas nous embrasser la Tornade ?
- Vous êtes beaucoup, je me justifie.
- Je suis vexé, boude Doums avec un grand sourire occupant la moitié de son visage.
Je lève les yeux au ciel, soupire et pose ma basse dans le coin du mur. L'odeur intense de cannabis occupant la pièce me fait éternuer. Antoine s'excuse, gêné, et me tend un tabouret pour que je m'y installe. Ken ne me lâche pas des yeux, mais son regard est un pur mélange de haine et de surprise de me voir ici.
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De Rock et de Feu
FanfictionLa rencontre entre deux mondes différents... Ambre ne vit que pour le rock, sa basse, son groupe et sa tignasse. Tout ça l'aide à oublier un passé récent douloureux et tragique. Pour remonter la pente, elle partage sa vie entre les répét', son job c...