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Point de vue Ken ( tout le long !)

Mon bigo se met à sonner alors que je sombre à peine dans un sommeil lourd et chargé de THC. J'ai arrêté de compter le nombre de pilons que je me suis fumés cette nuit quand Doum's m'a demandé si j'avais pas chopé en une heure une conjonctivite.

Finir la soirée de la veille, brusquement, à courir comme un dératé, pour aller aider mes potos à castagner du petit con qui se la raconte, les attendre qu'ils sortent de gardav', m'a donné envie de me la foutre à l'envers. J'ai cramé en quelques heures mon dernier dix grammes de teush.

Alors que je venais de me déverser en Ambre, au travers de la capote, qu'elle s'est levée simplement vêtue de sa culotte noire, pour aller nous chercher deux binouzes, je mesurais la chance de squatter ce canapé moelleux des parents d'Ambre. Baiser au domicile parental n'a jamais été trop mon truc, mais j'avais trop envie d'elle pour avoir des velléités quelconques à changer d'appartement.

Elle avait réussi en une seule soirée, me donner envie de la fuir, fuir ses putains de problèmes, et épancher ma soif de sexe avec elle.

Je m'apprêtais à effriter un peu de mon teush pour confectionner un bon gros bédo, à fumer à deux, contrairement à mes principes, quand Mek' m'a appelé pour m'informer que de leur côté, la soirée partait vraiment en couilles.

Je regarde l'heure sur ma montre posée sur ma table de nuit. Un vieux ton-car retourné, quoi. 08h55. On veut ma mort ?

- Ouaiiiiis, je maugrée la voix éraillée et piquante.

- Le fennec, je te réveille ?

- Ah, Travis, putain ouais, mais pas grave.

- T'as oublié. Session stud dans une heure, pour mon skeud.

- Non, non, je mens. J'avais mis mon réveil, t'inquiète mec.

Grosse disquette. Mais faut pas oublier que j'en suis le roi.

- Parfait, à dans une heure alors.

J'ai pas oublié. J'avais envie d'oublier, nuance. Parce que je ne suis pas prêt à enregistrer le son que j'ai prévu pour le projet de mon pote Travis Brickman. Ça fait deux mois qu'il taffe dessus, jour et nuit, et je ne peux plus me défiler. Alors qu'il m'avait demandé d'y participer, j'avais accepté avec plaisir et fierté.

Le choix de ma chanson, qui me paraissait évidente y a encore une semaine ne l'est plus vraiment aujourd'hui. Pourtant je sais que ma catharsis passera par l'enregistrement de cette chanson. Alors qu'Ambre dormait à côté de moi, j'avais écrit ces longues phrases, ces douloureux souvenirs que cette fille m'avait laissés, comme pour me condamner et me punir d'avoir été un putain de canard.

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- Yo Man, bien ?

- Parfait, je réponds en le checkant vivement.

- Chaud ? Prêt ?

Ni l'un ni l'autre, mais je feins le contraire en lui adressant un grand sourire, à moitié masqué par la visière de ma casquette et la capuche de mon vieux sweat par-dessus. Ce genre de sourire qui endormirait le moins naïf de tous. Mais j'ai du mal juger mon gars parce qu'il ne semble pas me croire :

- Sûr ?

- Ouais, t'inquiète, ça va le faire, le rassuré-je.

Il me présente alors Hugz, grand gaillard derrière ses platines.

- Mec, on a pensé à une prod' un peu soul, à sampler derrière les textes que tu m'avais envoyés. Attends, il va te faire écouter.

Pressé de découvrir le son que ce mec a mis de côté en lisant mes blessures, je m'installe sur le tabouret à côté de lui. Mes mains croisées entre mes genoux, que je relève pour soutenir mes bras lourds, je baisse la tête et laisse aller mon esprit vers la voix canon de cette meuf.

De Rock et de FeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant