¤ Gravity de Against The Current ¤
Aujourd'hui, nous étions le mardi 15 novembre. Hier, ou plutôt ce matin, très tôt ce matin, nous avions conclu le pacte sur notre plan « faux-couple ». Ce matin, à minuit et treize minutes, Zea et moi formions un couple. Un couple comblé d'enfin se montrer au grand jour et amoureux. Et en voilà toute la subtilité difficile : Zea et moi n'étions pas un couple et encore moins amoureux. Ce matin, après une nuit bien trop courte – je n'avais dormi que trois heures, Zea et moi commencions le plan lancé par Trevor. Soit commencer les embrassades, câlins et autres en public. Trevor nous avait même demandés à ce que dans une semaine, Zea déménage de sa chambre pour venir me rejoindre dans la mienne et dormir dans mon lit pour que ça fasse plus « vrai ». Vrai de mon cul, oui ! Ils aimaient juste nous torturer ces connards de mes deux.
Debout depuis à peine une heure, je venais tout juste de terminer de me préparer pour cette nouvelle journée qui s'annonçait très longue. Habillé d'un tee-shirt d'un rouge flashy, d'un pantalon noir et déchiré, d'une casquette à l'effigie d'une grande marque de sport et d'un bomber noir aussi, j'espérais ne pas montrer à quel point je commençais à angoisser. Mon état de stresse me faisait trembler et cela commençait sérieusement à me faire chier, surtout que ça devenait voyant. Je me trouvais même blafard.
Merde, ce n'était que pour deux foutus mois ! Pas de quoi en faire tout un plat. Parce que, oui, nous avions décidé finalement de reprendre le plan initial : Zea et moi serions en couple durant un mois pour faire une pause, une sorte de rupture pour ensuite nous remettre ensemble pendant un mois et là, et seulement là, je finirais par sortir avec une fille. Rien de bien méchant en soit, n'est-ce pas ? Je pouvais y arriver, nous pouvions nous en sortir. Bien que l'après me faisait trembler de peur, nous y arriverons et réussirons à passer cette étape. Aussi chiante soit-elle.
Mon portable vibra sur ma table basse, affichant le message de Zea me disant m'attendre dans le salon de notre coloc. Parce que oui, Blake, moi et Zea vivions tous les trois en colocation avec trois autres mecs du lycée. Et c'était constamment le bordel. Ça ne me dérangeait pas tant que ça, après tout, du moment qu'ils ne venaient pas foutre leur bordel dans ma chambre. Nous étions donc six dans cet appart' plutôt spacieux et seulement un sur quatre était au courant de notre faux coming-out. Je sentais les embrouilles arriver.
Je pris une profonde inspiration, me préparant mentalement aux prochaines remarques qui ne devraient pas mettre longtemps à fuser. Puis, pas du tout prêt, je finis par relever la tête et me diriger vers ma porte. Putain, j'avais tellement envie de faire machine arrière et de rester sous ma couette. Mais je ne pouvais plus reculer et pris finalement le chemin du salon, là où m'attendait mon copain. Je ne m'y ferais décidément jamais à cette appellation. Elle sonnait bien trop fausse, bien trop ridicule à mes yeux.
Débouchant sur le salon, j'aperçus enfin Hulk pianoter sur son téléphone, le visage fermé. Lui était habillé plus sobrement : habillé d'un tee-shirt blanc, d'un pantalon noir, pas déchiré pour lui, et d'une veste en cuir, il avait l'air... dangereux et intouchable, encore plus avec son air contrarié. Relevant la tête à mon arrivé, il me fixa de ses yeux noirs d'où brillait une lueur d'incertitude. Délaissant complètement son smartphone, il se figea à mon approche. Et j'eus un pincement au cœur en pensant qu'avant cette putain de fausse relation, il n'aurait jamais eu cette réaction à ma venue. Nous nous étions tous les deux fourrés dans une merde profonde et savions parfaitement que jamais plus rien ne sera pareil. Et à l'un comme à l'autre, ça nous fichait les jetons, rien que de penser que le malaise sera toujours présent, peu importe ce qui se passera.
- Salut, laissai-je échapper quand je fus face à lui.
Il ne me répondit pas et préféra me saluer d'un simple hochement de tête. Voilà quelque chose qui ne changerait pas. Plongeant son regard dans le mien, je m'aperçus que lui aussi était en proie aux mêmes doutes que moi, aux mêmes peurs. Il ne savait pas comment s'y prendre, comment il pouvait faire pour annoncer cette futur fausse relation aux autres qui nous observaient avec inquiétude. Ça se comprenait aussi, à nous voir nous fixer dans le blanc des yeux comme des idiots sans réagir. Mais nous ne savions pas comment réagir face à tout ça, face à toutes ces futures attentions dont on serait l'objet.
- On peut toujours arrêter, ce n'est pas trop tard, murmurais-je.
Il ferma les yeux, les lèvres pincés, en proie à la confusion la plus total. Je le comprenais après tout, moi aussi je voulais revenir en arrière, faire comme si tout cela n'existait pas et reprendre notre relation amicale là où nous l'avions laissée. Mais subir tous ces regards devenaient insoutenables pour nous deux et c'était notre seule solution pour contre carré ces rumeurs.
Il finit par rouvrir les yeux, m'offrant une lueur déterminé malgré tous les doutes qui s'y mélangeaient. Hochant très légèrement la tête, il m'offrit son consentement à avancer. Je fermai à mon tour les yeux, pris une profonde inspiration pour me préparer à toute cette mise en scène et les rouvris, déterminé à faire taire tous ces jugements. Il était temps que tout ça prenne fin, au risque de mettre à mal notre amitié.
- Les gars, vous êtes sûrs que ça va ? Vous êtes vraiment flippants, avança Demon, l'un des gars de notre colocation.
Les cheveux en bataille, toujours en caleçon, il mangeait ses céréales avec suspicion en nous jetant des regards prudent à Terminator et moi.
- Oui, oui, ça va, commençais-je.
Grand roux et baraqué aux yeux d'un vert profond, Demon jouait dans le club de football américain du lycée. Il était d'ailleurs très doué. C'était le seul toujours pas habillé pour le lycée. A ce que j'ai compris, il commençait une heure plus tard que nous. Plus loin, occupé à lire un autre roman de sa collection, Victor nous jetait lui aussi des regards intrigués du canapé. Lui était plutôt banal : des cheveux bruns avec des yeux tout aussi bruns, il était le seul parmi nous tous à porter des lunettes. Qui lui allaient d'ailleurs plutôt bien, lui donnant un petit air d'intello qui faisait craquer toutes les filles. Pas très costaud, il ne l'était pas autant que moi. Mais il se défendait.
Tout aussi intrigué, le dernier de la bande, Clément, était accoudé à notre table de la cuisine à terminer je ne sais quoi. Sûrement les devoirs à rendre pour aujourd'hui. Comme toujours, ce blond au regard d'acier faisait tout au dernier moment. Que ce soit ses devoirs, ses repas, son sac ou encore son linge, il avait cette horrible manie de ne rien faire en avance. Et pourtant il arrivait toujours à s'en sortir.
Tous trois intrigués par notre comportement suspect, ils ne nous lâchaient pas du regard, attentif quant à la suite. Prenant une énième grande inspiration pour la suite, je pris mon courage à deux mains et me lançais :
- On est en couple.
Punaise, ce que ça faisait bizarre de dire ça. Cherchant de suite le regard de mon petit copain – non décidément je ne m'y ferais pas, je cherchais à tout prix à me rassurer sur le fait que c'était la bonne décision. Il était trop tard pour faire machine arrière mais j'avais besoin qu'il me dise qu'il ne m'en voulait pas. Je n'eus droit qu'à un simple hochement de tête imperceptible mais cela me suffit et mes épaules retombèrent d'un seul coup, comme libérées d'un énorme poids.
- Félicitations !
Notre couple était maintenant officiel.
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Powerless
RomanceL'amour, vous devez connaître. Vous savez, ce sentiment libérateur qui nous prend au ventre, ce sentiment qui nous fait ressentir ces papillons ? Ces frissons qui nous dévalent l'échine, parcourent notre peau, bouffent nos pensées jusqu'à ce qu'il n...