~ Chapitre 18

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J'avais déjà complètement oublié la présence de Tobias à mes côtés.

Je me précipitais vers Lillemör, et la pris dans mes bras comme je pouvais, en entourant son encolure et en me mettant à sangloter. Depuis que j'avais quitté la maison de mes parents, elle était la seule chose qui m'avait vraiment rendue triste. Lillemör se mit à hennir une deuxième fois, plus doucement, et se mit à bouger la tête.

Je m'éloignais en m'esclaffant et en m'essuyant peu élégamment le nez. J'étais tellement heureuse en cet instant. Tout semblait parfait. Tout semblait à sa place. Comme nous le faisions toujours, je collais ma joue à la sienne de façon à pouvoir voir son œil.

- A quoi tu penses ? Hein ? A quoi tu penses ?

Je restais dans cette position pendant ce qui me semblait être des heures. Tobias n'aurait jamais pu trouver de meilleur cadeau d'anniversaire. En fait, c'était le plus beau cadeau que je n'avais jamais eu. Ma jument était ma meilleure amie. Cela pouvait sembler ridicule aux yeux de nombreuses personnes, mais pour la fille que j'étais, cela semblait être d'une logique implacable.

Au bout d'un moment, je me souvenais de la présence de Tobias et me retournais vers lui. Il était adossé à la porte de l'étable, et ne semblait montrer aucun signe d'impatience ou de lassitude. Son souffle libérait une fumée épaisse, tant l'air était froid.

- Comment tu as su ?

Il eut un petit sourire, comme s'il était fier de lui. Il pouvait.

- Je me suis renseigné.

Son sourire se fana instantanément et il s'approcha de moi. Il donna quelques tapes sur l'encolure de Lillemör, qui eut un petit mouvement de recul.

- Tu es consciente qu'elle va partir, n'est-ce pas ?

Je vrillais mon regard au sien pendant quelques secondes sans parler avant d'hocher lentement la tête. En fait, le vrai cadeau de Tobias était de me laisser vivre mes adieux avec ma jument. Au fond de moi, je savais en quittant mes parents cette nuit-là que je quittais aussi Lillemör. Cette rencontre était en quelque sorte un bonus.

- Ils l'on vendu ... dis-je à regrets.

Tobias hocha gravement la tête.

- Je peux t'assurer qu'elle sera bien traitée là où elle sera.

L'espace d'une folle seconde, je me demandais si je ne pouvais pas la racheter, avant de me ressaisir. Lillemör avait déjà trouvé une nouvelle famille, et je n'avais financièrement pas de quoi la racheter.

- Si j'avais su son existence plus tôt, je peux te jurer que j'aurai tenté quelque chose pour qu'elle reste avec toi.

Comme souvent, la douleur de Tobias réveillait la mienne. Je ne pus qu'hocher la tête en signe de compréhension. Je savais que Tobias l'aurait fait s'il avait pu. Ce n'était pas sa faute. Je ne pouvais même pas en vouloir à mes parents. Lillemör était la dernière chose qui les rattachait à moi. Lillemör partie, je n'existais officiellement plus à leurs yeux. De nouveaux, mes yeux s'emplirent de larmes, et j'enfouis ma tête dans la crinière de ma jument.

Encore une fois, le temps s'écoula différemment. J'avais le cœur brisé, mais je faisais confiance à Tobias. Je le croyais quand il m'affirmait qu'il avait trouvé une bonne famille pour elle. Lorsque je me redressais, Tobias me dévisageait, inquiet. Subitement à la recherche de réconfort autre que celui de ma jument que je voyais pour la dernière fois, je me jetais sur lui et appuyais ma tête contre son torse. Tobias me rendit immédiatement mon étreinte, et posa sa joue contre le sommet de mon crâne. Même vêtu chaudement, je pouvais sentir sa merveilleuse odeur si particulière.

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