~ Chapitre 45

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Stupéfait.

Klaus était stupéfait, et clignait des yeux de façon rapide et incontrôlée. Pour la première fois en des mois de cohabitation, je parvenais à lui arracher cette émotion. Je parvenais à le surprendre, même si je n'aurai jamais pensé que cela aurait été de cette façon.

Mon pouls battait de manière désordonnée et je me forçais à tenter de respirer de manière calme et régulière, en vain. La chamade de mon cœur partait dans tous les sens, tandis que je méditais quelques instants sur ce que je venais de lui proposer.

Boire mon sang.

Si je devais être totalement transparente avec moi-même, il fallait que j'admette que ça n'avait été qu'une question de temps avant qu'une chose pareille ne se produise ; après tout, les garçons désiraient mon sang de manière viscérale, presque primitive, fatale.

L'espace d'une nano seconde, je faillis retirer ma proposition. J'avais peur, j'étais même terrifiée, de la façon dont on peut être terrifié par l'inconnu.

Mais je me souvenais alors des propos de Tobias quand nous avions parlé de ce processus. Il m'avait dit que résister provoquait une douleur sans nom, comme si le corps se battait contre l'agression ; alors que le désirer ardemment déclenchait une béatitude qui selon lui se rapprochait fortement de l'orgasme.

Klaus recula d'un pas, toujours en proie avec le poids de mes mots, tandis que mes paumes se couvraient de sueur. Des émotions fugaces traversaient son visage, de façon tellement rapide que j'avais à peine le temps de les identifier : la stupéfaction, l'envie, la colère, le désir ... Mais surtout l'hésitation.

Klaus hésitait. Il hésitait grandement.

-Tu n'as aucune idée de ce que tu es en train de dire, souffla-il enfin.

Il avait raison, bien entendu. Je savais que j'avais de fortes chances d'y laisser ma peau. Si nous passions à l'acte, j'avais parfaitement conscience qu'à tout moment l'effort pouvait se révéler trop éprouvant ou, au contraire, trop agréable pour y mettre un terme, et que je pouvais mourir sans en avoir réellement conscience.

Et ça m'était complètement égal. Je me fichait comme d'une guigne de mourir. Voilà jusqu'où allait mon amour -ou mon obsession ?- envers Klaus. Mourir me paraissait un bien petit prix, et ma vie me paraissait bien insignifiante comparé au désir de faire plaisir à Klaus.

Tu n'as aucun instinct de survie. Voilà qui est fâcheux.

-Je suis parfaitement consciente de ce que je suis en train de proposer, merci bien, dis-je, acerbe.

Si ces derniers mois j'avais montré à quel point en effet le sort de ma propre vie m'étais égal, il y avait cependant eu quelques changements positifs. J'avais beau encore faire preuve d'innocence et de naïveté par moment, je ne me laissais cependant plus faire. Quand ma décision était prise, rien ne pouvait m'arrêter.

Klaus déglutit avec difficulté en balayant mon corps du regard. Ses yeux, d'ordinaire d'un gris étonnant, ressemblaient désormais à deux billes noires, témoignant du conflit intérieur qui faisait rage en lui. Il avança lentement vers moi, tel un prédateur prenant au piège sa proie -moi-. Il était tellement proche de moi que je pouvais goûter sur la pointe de ma langue son odeur enivrante. Il pencha la tête sur le côté et m'examina, comme si j'étais un animal exotique rencontré pour la première fois.

-Tu es une étonnante créature, susurra-il, et sa voix rauque déclenchait des vibrations dans tout mon corps. Tu sais que je pourrai te tuer en plein acte ?

J'acquiesçais en déglutissant bruyamment.

-Je crois que tu ne te rends pas encore compte de ta fragilité Agnes. Une simple pression sur ton cou gracile, et tu t'effondrerais mollement dans mes bras.

Club ElevenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant