~ Chapitre 21

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Nous nous installâmes à bonne distance l'un de l'autre, Tobias et moi.

Je soupçonnais que nous ne le faisions pas pour les mêmes raisons ; lui le faisait car il avait peur de me faire peur, moi car j'étais méfiante et j'avais peur d'avoir peur. Je m'installais donc dans mon lit, dos au mur, les bras autour de mes jambes relevées afin de conserver un peu de chaleur corporelle. Tobias, quant à lui, était assis sur un des deux fauteuils entourant la cheminée.

Mon cœur battait la chamade, et j'avais l'impression que je pouvais tomber dans les pommes à tout moment. Tout comme Tobias d'ailleurs. Il semblait complètement paniqué, et son regard ne cessait de passer d'un endroit à un autre ; comme si il ne pouvait se focaliser sur un objet plus de deux secondes. Pire encore, il ne me regardait pas. Je tentais de lui faire sentir ma présence, de le rassurer, mais j'étais moi-même bien trop effrayée pour dire quoique ce soit. Il fallait qu'il commence.

- Je ne sais pas comment aborder la chose, murmura Tobias après une éternité.

- N'aie pas peur de me dire les choses crûment.

C'était en réalité un petit mensonge cousu de fil blanc. Au fond de moi, j'étais en réalité terrorisée à l'idée qu'il dise ce qu'il ne fallait pas, ou qu'il dise quelque chose susceptible de me terrifier. Tobias prit une profonde inspiration tout en gardant son regard vrillé au sol.

- Je suis ... Je suis ce que Klaus et Lune t'ont dit.

- Tu ne peux pas me dire ça juste comme ça ! m'indignais-je. Ce n'est pas juste (je me redressais dans mon lit) ! Tu aurais dû être celui qui me dirait la vérité ! Tu m'avais dit que tu me la dirais, et au final je l'ai appris de la bouche de quelqu'un d'autre. En plus de ça, ce n'est pas une révélation facile à concevoir d'un point de vue rationnel. Je n'arrive toujours pas à y croire. Alors je t'en prie, fais un effort !

Tobias me regarda, estomaqué, puis esquissa un sourire.

- Tu me laisses parler ou tu comptes m'interrompre toutes les deux minutes ?

J'avais moi aussi envie de sourire, mais mon visage était comme figé ; ne subsistait que la peur, l'amertume, la colère et la déception. Tobias reprit une inspiration avant de se mettre à parler. A parler vraiment.

- Oublie tout ce que tu penses connaître, Agnes. Oublie d'où tu viens, oublie ce qu'on t'a enseigné, et tu verras que ce sera plus facile à comprendre. Dans le monde où je vis, ce n'est pas aussi horrible que tu ne le penses, je te le jure. Et je peux aussi te jurer que ce que tu as pu entendre sur mon ... notre ... espèce, n'est que pure fable.

J'arquais un sourcil.

- C'est-à-dire ?

- Le vampirisme n'est pas un état surnaturel, comme cela peut être dépeint dans les contes et légendes. C'est encore moins une sorte de malédiction qui nous destine au purgatoire ou aux limbes. Nous ne sommes pas des créatures de l'Enfer. En fait c'est ... c'est une sorte de virus.

- Un virus ?

J'avais quelque peu du mal à y croire. Tobias hocha la tête avec dynamisme.

- Oui, un virus. Sauf qu'au lieu de nous affaiblir, ou de nous faire mourir, il nous rend plus fort.

- Un virus, répétais-je, abasourdie.

Nous n'étions qu'au début de la conversation et déjà le peu de fondements que j'avais en ma possession s'écroulaient tels un château de carte.

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