~ Chapitre 39

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Le visage allongé contre le sol frais de la salle de bain, je méditais sur cette histoire insensée.

Mon estomac ne cessait de se contracter sous l'assaut des pensées qui tourbillonnaient dans ma tête. Tout cela avait encore la consistance d'un rêve, bien que j'avais eu la confirmation que ce n'en était pas un. La façon dont les évènements avaient ainsi pu m'échapper me donnait le tournis, et quand je songeais à la nature de la relation qui me liait à Klaus et à Tobias, je me mettais à frissonner.

Pour la troisième fois depuis le début de l'heure, mon ventre se contorsionna, et je me relevais, haletante, accoudée au-dessus de la cuvette des toilettes. Des spasmes me secouaient de la plante des pieds jusqu'à la racine des cheveux.

Au bout de quelques secondes de douleur supplémentaire, je me mis à vomir le peu que je pouvais, mon estomac ne recrachant qu'une bile amère et brûlante. J'étais à peine surprise par la façon dont mon corps réagissait ; je trouvais même étonnant qu'il ne se soit pas manifesté plus tôt, au vu de tout ce que j'avais appris et subit ces derniers mois.

Quand mon corps m'arracha un dernier frisson, je reposais ma tête sur le carrelage en soupirant bruyamment. J'avais un problème. Un très gros problème. J'avais certes réussi à m'imposer afin d'obtenir la vérité, mais maintenant, celle-ci ne me paraissait plus aussi attrayante. Pire, je ne savais plus qui j'étais, ni ce que je devais ou étais censée faire.

M'étais-je aventurée trop loin hors des limites de mon identité ? Ces derniers mois, j'avais appris tellement de choses, des choses qui étaient presque incroyables, mais maintenant, je me sentais juste vide. Oui, j'étais devenue une coquille vide, et j'avais l'impression que mon corps était vide de toute énergie vitale.

Quelles options s'offraient à moi ?

Difficilement, je me relevais, me brossais les dents pour enlever le goût désagréable qui persistait dans ma bouche, et sortais de ma chambre. Mon cerveau carburait, du moins autant qu'il le pouvait au vu de mon état de faiblesse.

En arrivant devant la grande porte située à l'autre bout de la maison, j'eus un doute. Lune était-elle celle qui pouvait me venir en aide ? Elle était un vampire, et probablement un des plus vieux vampires à fouler le sol de cette terre. Et pourtant, elle-même ne savait pas quelles mesures prendre. Si je lui faisais part de mes interrogations, y répondrait-elle en toute honnêteté ?

Elle était la personne qui m'intimidait le plus ici –peut-être même plus que Klaus-, mais il fallait que j'obtienne plus de détails sur cette histoire de Lien, de Senteur, et d'Appartenance.

Timide, je frappais trois grands coups, avant d'ouvrir la porte. J'eus un mouvement de recul en constatant qu'il n'y avait ici aucune chambre, et que je me trouvais face à une grande échelle en bois sombre, et rien d'autre. C'était comme si j'avais rapetissé et que je me trouvais dans le siphon d'un évier.

- Tu peux monter.

Je reconnaissais immédiatement la voix claire mais lasse de Lune, et, en m'accrochant prudemment, j'entreprenais l'ascension de la grande échelle. Jamais je n'aurai pensé que cette dernière puisse vivre dans les combles, et lorsqu'enfin mes pieds foulèrent un sol stable, je ne pus m'empêcher d'écarquiller les yeux.

La pièce était plus grande que la chambre de Klaus, Teodora, Tobias et moi réunis, et la semi-obscurité qui régnait n'enlevait rien à sa splendeur. Chaque pan de mur était couvert par un tableau, si bien qu'il n'y avait plus aucun espace de libre sur ces derniers. Une grande croix de bois, abîmée, trônait au centre de la pièce, tandis que des objets en tout genre étaient protégés derrière des vitrines anciennes. Un paravent à l'autre bout de la pièce devait abriter la partie nuit, et un immense bureau en chêne, secondé par un meuble contenant toutes les formes de bouteilles possibles et inimaginables, dominait la pièce, d'où des piles de papiers dangereusement instables menaçaient de tomber sur le sol d'un moment à l'autre.

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