C'est vrai que maintenant que Tobias le mentionnait, je mourrais de faim.
Cette dernière se rappelait à mon bon souvenir, faisant se tordre mon estomac de douleur. Mais d'un autre côté, j'avais encore la gorge nouée, et je n'étais pas sûre au final de pouvoir avaler quoique ce soit. J'avais peur que cela reparte aussi sec.
Néanmoins, je suivis Tobias, en notant mentalement qu'après cela il serait bien que je me lave. Je reniflais discrètement mes aisselles tandis que le garçon marchait devant moi. Oui, il fallait que je me lave, et que je reprenne apparence humaine.
Alors que je marchais à sa hauteur tout en gardant le silence, -nous étions encore dans l'œil du cyclone, n'osant dire quelque chose qui blesserait l'autre-, une question me vint à l'esprit. Elle était directement en rapport avec la conversation que nous venions d'avoir.
- Je peux te poser une question ? demandais-je alors.
Tobias s'arrêta de marcher pendant quelques secondes, et dans un froncement de sourcil, bougonna :
- S'il le faut.
- Tu as mentionné que vous n'étiez pas obligés de tuer la personne dont vous vous ... nourrissez. Mais du coup, elles savent que vous êtes des ... ce que vous êtes ? Vous n'avez pas peur des révélations à la société ?
- Oh, c'est là que tu veux en venir ?
Il semblait soulagé, comme si il s'était attendu à une autre question. Laquelle en revanche, je l'ignorais.
- Eh bien, de manière générale, nous nous nourrissons dans des lieux bien particuliers. Il existe des endroits un peu partout en Suède, dont Stockholm, où tu peux trouver des personnes consentantes, qui sont au courant de notre vraie nature.
- Pourquoi des personnes souhaiteraient ça ?
Ma voix monta de quelques octaves face à ses propos mais Tobias se contenta de soupirer.
- Je te le dirai plus tard. Sinon, parfois, nous trouvons des personnes ivres. Je sais que c'est bas, mais ça facilite les choses. Le lendemain, la personne ne fait aucune différence entre une gueule de bois et une morsure. Et enfin, certains d'entre nous usent de stratagèmes soigneusement élaborés ... Le lendemain, la personne pense juste avoir eu à faire à un amant extrêmement doué.
Il me fit un regard lourd de sens, mais je détournais les yeux, gênée. Je devais avouer que je ne m'étais pas vraiment attendue à cette réponse.
Plus nous approchions de la cuisine, plus de merveilleuses odeurs me parvenaient. Peut-être étais-je devenue soudainement plus sensible, mais je me mis à saliver. Teodora était derrière les fourneaux, bien sûr, et dès que nous arrivâmes, elle se tourna vers nous, une trace d'inquiétude sur son beau visage.
La table regorgeait de nourriture en tout genre : sucré, salé, gaufres, pancakes, mais aussi du Hjortron (mûre rare présente uniquement dans les pays Nordiques). J'avais envie de me jeter sur ces dernières, m'abstenais néanmoins.
- Je ... je te laisse avec Teodora, dit Tobias en dansant d'un pied sur l'autre. Je reviens.
J'hochais la tête, le soupçonnant d'avoir besoin de se retrouver seul un instant afin de relâcher la pression. Je ressentais la même chose. J'étais encore étourdie par le flot d'informations dont j'avais été abreuvé quelques minutes auparavant.
Je me servais une tasse de café au lait tandis que Teodora gardait le silence, focalisée sur la cuisson de sa nourriture. Je picorais quelques baies en me demandant si je devais dire quelque chose ou s'il fallait que j'attende que la jeune femme rompe le silence.
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Club Eleven
VampireLa vie d'Agnes Wallenberg est orchestrée comme du papier à musique. Issue de l'aristocratie suédoise, aux valeurs, aux croyances, et aux règles strictes, elle n'a jamais fait de vagues. L'année de son dix-septième anniversaire, elle apprend la vérit...