~ Chapitre 44

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- Bon, je pense que tu es partie pour une bonne montée de fièvre et tout ce qui va avec, soupira Teodora en retirant le thermomètre ultra moderne de l'intérieur de mon oreille.

J'étouffais une légère plainte en me balançant en arrière dans mon lit, ma tête rebondissant contre l'oreiller.

Après le baiser de Tobias, j'étais restée je ne sais pas combien de temps dehors, où un mélange de pluie et de neige aurait tout aussi bien m'ensevelir vivante. C'était comme si mon cerveau s'était mis en stand-by, et que j'avais perdu le contrôle de mes terminaisons nerveuses. J'avais été incapable d'émettre le moindre son ou d'esquisser le moindre mouvement.

J'étais blessée, plus que tout.

J'étais prise dans un cercle vicieux, un cercle infernal que j'étais la seule à pouvoir rompre, mais j'en étais juste incapable. Trop faible, trop gentille, scandait ma conscience. Ce qui était vraie. J'avais beau regarder les options qui s'offraient à moi sous tous les angles, je ne voyais pas comment je ne pouvais pas blesser ni Klaus ni Tobias. Hors, j'étais incapable de choisir qui méritait le plus d'être blessé. Aucun ne le méritait.

- C'était tellement plus simple quand je n'étais pas là, soupirais-je.

Teodora rangeait son attirail d'appareils médicaux et ralentit son geste en m'entendant parler. Le thermomètre resta suspendu à sa main tandis qu'elle mordait sa lèvre, une expression songeuse sur le visage.

- Je ne vais pas te mentir, soupira-elle à son tour. C'était en effet plus simple et pour nous, et pour toi. Mais ce n'est la faute de personne.

- Si, c'est la mienne, chuchotais-je. Quelque chose ne va pas chez moi. Si tout allait bien chez moi, j'aurai réagi à un des garçons. Pas aux deux.

- Tu n'as aucune maîtrise là-dessus, protesta Teodora. Tu ne peux pas te fustiger pour une chose sur laquelle tu n'as aucune maîtrise. C'est ridicule.

- Ou peut-être que je pourrais disparaître. Partir loin d'ici. Pour ne plus causer d'ennuis.

Teodora leva les yeux au ciel.

- Ils te retrouveraient. Et puis, où est-ce que tu irais ? Tu n'as nulle part où aller.

- Ou alors, dis-je sans vraiment l'écouter, je peux mourir. Problème réglé.

- Tu es complètement idiote, me gronda Teodora.

Pourtant, j'étais presque sincère en disant cela. Le peu de projets d'avenir que j'avais eu étaient partis en fumée, et à part apporter des complications dans la vie de chacun, je n'étais pas nécessaire. J'étais totalement remplaçable.

- Non, dis-je. Réaliste. Tu sais ce que ça fait d'avoir l'impression d'être bloquée, de ne pas pouvoir avancer, de savoir que peu importe ce que tu décides de faire ça peut ne rien changer, ou aggraver les choses ? Je suis incapable de prendre une décision Teodora. Mon corps est totalement incapable de choisir.

Teodora cligna des yeux, silencieuse, puis baissa la tête piteusement. Lorsqu'elle releva la tête vers moi, elle semblait à deux doigts de pleurer.

- En fait, je sais exactement ce que ça fait que d'être bloquée, de ne pas pouvoir avancer et de faire tous les efforts possibles et inimaginables sans que rien ne change.

Son regard était vrillé au moins, elle ne cillait pas, et je comprenais alors qu'elle faisait référence à Lune.

- Teodora, je suis désolée ... Je ne voulais pas ...

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