~ Livre Deux - Chapitre 5

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Abasourdie, je pose mon verre sur la table basse et me redresse tout en tentant d'ignorer les picotements qui parcourent la base de ma nuque.

- Qu'est-ce que tu dis ? je souffle.

Klaus me regarde, descend son verre d'une traite et se met à ricaner, de ce ricanement froid, cruel et implacable.

- Ne te sens pas pousser des ailes. Certes, cette attirance pour toi je l'ai toujours, mais si elle est plus forte qu'avant, ça veut aussi dire que mon besoin de te tuer l'est aussi. D'ailleurs, je ne sais pas ce qui me retient de me lever et de briser ta nuque gracile.

J'inspire doucement, prise par surprise.

Je pensais être la seule à ressentir cette bestialité, ce besoin physique de lui. Et pourtant, Klaus, vampire dix fois plus âgé que moi, ressent cette même électricité, ce même besoin physique. Son détachement vis-à-vis de moi n'était donc que comédie.

Mais il veut aussi te tuer.

- Tue-moi alors, je dis calmement.

Il hausse un sourcil, se lève, mais c'est uniquement pour se resservir un verre. Je pense ce que je dis. Si Klaus veut vraiment se débarrasser de moi, qu'il le fasse, qu'il ait le courage de voir la lueur de vie quitter brusquement mon regard.

- Je ne vais pas te tuer, dit-il alors. Je ne suis pas un tel monstre.

- Excuse-moi, j'ai dû te confondre avec quelqu'un d'autre, dis-je avec ironie.

Derechef, Klaus ricane.

- Mais regardez-là, c'est qu'elle mordrait maintenant. Je demande un tonnerre d'applaudissements pour la nouvelle Agnes, encore plus idiote que l'ancienne.

Klaus est clairement en train de mettre à l'épreuve ma nouvelle moi, ainsi que ma nouvelle patience, ma nouvelle tolérance. Ces dernières sont beaucoup moins affûtées que dans ma vie précédente. Je sens le sang dans mes veines bouillonner tandis que Klaus m'observe avec un vif intérêt.

- C'est compliqué, n'est-ce pas ? De se contrôler ? La première année est la pire, mais bien entendu, ça dépend des caractères.

- Tu as toujours ce problème alors ? je demande, acide.

Il sourit, mais ce n'est pas un vrai sourire.

- Je suis né comme ça, c'est différent. Mais avoue que là tout de suite, des images pas très jolies défilent dans ta tête.

Il a raison. Je visualise très clairement la tête de Klaus projetée contre le contour en pierre de la cheminée.

- Ça change de toutes les fois où tu pensais à moi dans d'autres circonstances, ironise-il.

Je serre compulsivement mes poings sur mes genoux. A quoi est-ce qu'il joue ? Que cherche-il ? A ce que je craque, là, devant lui ? Parce que c'est ce qui risque de se passer s'il ne se tait pas rapidement. Ma respiration s'emballe, même si mon cœur, lui, n'a plus vraiment de réaction.

Apprends à te contrôler, j'ordonne à tout mon être.

- C'est drôle de te voir te battre avec toi-même, dit-il en s'asseyant plus confortablement dans le canapé.

- En effet, c'est l'éclate.

Il rigole, cette fois de bon cœur et je hausse un sourcil. Est-ce que ça le fait vraiment rire de me voir lutter, de me voir dans cet état ? Je n'ai ressenti cette colère que deux fois auparavant depuis ma transformation en vampire, et comme à chaque fois, la soif de sang se fait plus pressante, bien que je me fois nourrie il y a peu de temps.

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