La langue de Klaus a un goût d'Enfer et de Paradis à la fois. J'avale les flammes du Purgatoire et les arcs-en-ciel de la félicité.
Ma main trouve d'elle-même le chemin qui mène à la ceinture de son pantalon que je défais avec un naturel qui me fais gémir.
Nous avons fait ça tellement de fois, si peu de fois, pas assez de fois, je suis complètement à la merci de ce garçon qui m'a dérobé mon cœur il y a quelques années.
Klaus baisse la fermeture éclair de ma robe et fait un bruit de gorge quand il découvre ce qui se cache en dessous.
- Doux Jésus tu ne portes pas de sous-vêtements.
- Je n'avais pas vraiment le choix avec cette robe ...
Il secoue la tête, enlève définitivement le vêtement et prend ma poitrine dans ses mains tout en soufflant :
- Un jour tu signera ma perte, petit sapin.
Je souris, l'allonge sur le canapé défoncé situé au fond de la pièce, et m'empale sur lui sans préliminaires.
Je ne prends même pas le temps de lui enlever sa chemise, car nous avons peu de temps devant nous.
Chaque fois que nous nous perdons l'un dans l'autre, je m'extasie de ma propre chance. Quelque part, même si Klaus ne m'appartient pas comme je le voudrai, il est à moi.
Pendant quelques précieuses secondes encore, il est à moi. J'ai tant appris avec lui, j'ai découvert tellement de choses sur moi-même que ça me donne le vertige.
- Plus vite Agnes, il faut aller plus vite, souffle Klaus en avançant son bassin.
Ses yeux bleus ont complètement disparus sous la noirceur de ses pupilles qui me dévisagent et j'accélère la cadence comme il me l'a demandé.
- Regarde-toi, dit-il avec sérieux et une pointe d'humour il me semble. Te voilà devenue une vraie dévergondée. Tu es si belle quand je suis en toi. Une vraie dame du monde.
Je ne peux m'empêcher de m'esclaffer, mais pour le faire taire je presse mes lèvres contre les siennes, toujours plus avide de sa chaleur et de son affection.
Quand la brûlure désormais familière monte en moi, je ralentis le rythme, penche la tête en arrière et explose en un million de petits morceaux.
Klaus se redresse en position assise, pose son front contre le mien et jure entre ses dents avant de mordiller ma clavicule.
A bout de souffle, je m'effondre contre son torse et tente de redonner à ma respiration un rythme normal.
Comme à chaque fois, un épais silence s'installe entre nous mais il n'est pas gênant, je sais que c'est devenu une habitude.
Je commence à somnoler quand la voix de Klaus brise la quiétude dans laquelle nous nous trouvons :
- Tu as réfléchi par rapport à ton père ?
Je me crispe immédiatement, et Klaus le sens car il passe la pointe de ses doigts tout le long de ma colonne vertébrale en signe d'apaisement.
Ce n'est que la troisième fois qu'il aborde le sujet. La troisième fois de trop.
- Non, je réponds d'une voix blanche.
- Non tu n'as pas réfléchi ?
Je sais qu'il essaye de me faire tourner en bourrique, mais je ne veux pas lui donner la satisfaction d'avoir réussi à me mettre en colère. Klaus a beau avoir changé, il reste toujours un connard, et ça fait du bien de le penser.
- Non point final, connard.
Il rigole et je ne peux m'empêcher de sourire contre son torse.
- Tu sais, dit-il dans mes cheveux, peu importe ta décision, nous serons tous là pour te soutenir. Bon, moi peut être moins que les autres, tu sais combien j'ai horreur de rendre service, n'empêche, tu m'as compris.
Je ne réponds rien et, à la place, j'essaye de maîtriser le flot d'émotions contradictoires qui me submergent.
Il y a bientôt six mois, j'ai appris en lisant Dagens Industri que mon père était atteint d'un cancer du poumon intraitable, et qu'il était en train de prendre toutes ces dispositions pour céder les parts de son entreprise à la fortune colossale.
J'étais en train de prendre mon petit-déjeuner en compagnie de Teodora et Klaus, et quand ils ont lu l'article juste après moi, j'ai fait tout mon possible pour dissimuler le tremblement de mes mains qui faisait tinter ma tasse et ma sous-tasse de café au lait.
En devenant vampire, j'avais accepté de survivre à tout le monde, y compris mes parents - c'est dans la logique des choses-. Mais je ne pensais pas que ça arriverait aussi tôt.
Depuis, Klaus essaye de me convaincre d'aller le voir, et Teo m'a promis qu'elle viendrait avec moi si je souhaitais me rendre à ses funérailles qui ne devraient plus tarder.
Mais je n'ai jamais réussi à me décider.
L'ancienne Agnes irait probablement voir sa mère pour s'assurer que cette dernière va bien, qu'elle sera en sécurité quand l'heure sonnera, mais la nouvelle Agnes n'arrive à ressentir que de l'amertume et de la colère face à cette nouvelle.
Mon ancienne vie est derrière moi, je ne tiens pas à ressasser le passé.
Le Club Eleven a pourri à tout jamais mon innocence et la bonté naturelle que je possédais, mais il m'a donné la possibilité de m'assumer en tant que jeune femme.
Klaus me repousse doucement et je sors de ma bulle.
Nous nous rhabillons en silence, et je suis toujours stoïque quand il ferme ma fermeture éclair.
Alors que nous nous apprêtons à sortir, je lui demande machinalement :
- Ça va ? De quoi j'ai l'air ?
Je passe la main dans mes cheveux et il hausse les épaules.
- Tu ressembles à une fille qui vient de se faire sauter entre le Premier et le Deuxième Acte.
Je lève les yeux au ciel et passe devant lui, mais il me retient en me prenant le coude.
- Désolé d'avoir remué toute cette merde, dit-il en chuchotant.
- Ce n'est pas grave. C'est juste que je n'arrive pas à me décider tu comprends. Je ne sais même pas si cet homme a été un jour mon père. C'est vous ma famille maintenant.
Il hoche la tête, et me prends contre lui. Je souris mentalement en songeant à quel point il a changé ses derniers mois.
- Je sais Agnes. Et peu importe ton choix, on le respectera tous. Tu sais, je crois que tu as raison. Il faut arrêter de repenser au passé. Et si tu veux bien que je sois un bout de ton avenir, je serai là pour toi. Surtout pour te faire chier. Maintenant, retournons nous emmerder à mourir devant un Opéra qui n'émeut personne.
Je hoche la tête et avance, solidement entourée par mon destin.
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Club Eleven
VampireLa vie d'Agnes Wallenberg est orchestrée comme du papier à musique. Issue de l'aristocratie suédoise, aux valeurs, aux croyances, et aux règles strictes, elle n'a jamais fait de vagues. L'année de son dix-septième anniversaire, elle apprend la vérit...