- Les tuer ?
J'avance lentement dans la pièce, vers les personnes attachées. Elles gigotent dans tous les sens, mais n'arrivent pas vraiment à bouger. Ça donne une scène assez étrange. Leur voix sont étouffées dans le sac qu'elles portent sur la tête. Je soupçonne l'homme derrière moi d'avoir fait quelque chose pour ne pas que j'entende leur gémissements. Ou sinon c'est qu'ils sont très silencieux. Et si c'est le cas, ce sont sûrement des vétérans de guerre ou quelque chose du genre. Mais on voit qu'ils essaient de se défaire de leur liens en gesticulant. Donc c'est sûrement qu'ils ne peuvent pas parler.
Ils sont six. Six personnes à tuer. Deux grandes, et d'autres un peu plus petits. Une famille ? Je m'approche de l'un d'entre eux et pose ma main sur sa tête. Une femme. Je prends le bout de tissus qui lui recouvre la tête et tire. Mais rien ne se passe. La cagoule ne s'enlève pas. Tant mieux. Voir leur visages me découragerait. Je n'aime pas avoir pitié des gens. Et je n'aime pas que les gens aient pitié de moi. Tant que l'on se laisse mutuellement tranquille, ça me va. Je caresse lentement le visage caché de la personne. Elle s'est figée.
- Je ne donne pas mes butins à n'importe qui. Il y a un prix à payer.
- Et ton prix, c'est le meurtre de ces personnes ?
- Oui.
- Qu'est-ce qu'elles ton fait pour mériter ça ?
- Ça ne te regarde pas.
Je me retourne vers l'homme. Ses victimes sont cachés, mais lui se met totalement en valeur. On ne voit que lui. Il est sombre. Il porte des vêtements noirs, des bottes noires, son sac aussi est noir. Tout est noir. Seule sa peau est blanche. C'est presque choquant. Avec toute cette obscurité on s'attend à voir une peau aussi noire que le reste. Je pourrais le tuer lui à la place. Non. Mauvaise idée. J'ai entendu des rumeurs sur lui et elles ne sont pas agréables à entendre. Et je ne cherche pas le compliqué. Je ne veux pas risquer ma vie.
- Et si je les tue, tu me donnes ce que je veux ?
- Deux écailles polies de dragon ? Oui, bien sûr, sans problème.
Les écailles de dragons coûtent cher. Et quand elles sont polies, encore plus. Avec cet argent je pourrais avoir au moins un an de nourriture. C'est tout ce qui compte. Et je suis le seul à nourrir ma famille. Je ne peux pas me permettre de les laisser mourir de faim. C'est la pire mort qui puisse exister. Je vais donc tuer ces gens. Il le faut. Ça nourrira ma famille. C'est le plus important. Je ne peux pas manquer une occasion de donner à manger. Même si je dois tuer des gens pour ça. Même si je n'ai pas envie de faire mal à qui que ce soit. C'est nous ou eux.
- Très bien.
- Tue les de la façon que tu veux, mais je veux un corps entier, pas des moitiés.
Dommage. Couper la tête rend la mort plus rapide. Je sors mon épée lentement de son fourreau. Je dois tuer six personnes. Et comme au fond je ne suis pas mauvais je veux le faire de la façon la plus rapide et la moins douloureuse qui soit. Je pose ma lame sur le cou de l'une des victimes. Trancher la gorge ? Bien que ça soit rapide, il y a un risque que la tête tombe sur le côté ce qui fera couler le sang encore plus. Je ne tiens pas à nager dans une flaque rouge. Je n'ai pas beaucoup de vêtements de rechange, il ne faut pas que je me tâche trop pour passer inaperçu dans le village. Je retire ma lame de sa victime.
D'après moi le moyen le plus rapide, c'est le cœur. Ça ne va pas créer une fontaine de sang et même si c'est assez douloureux, d'après moi, le mourrant succombe assez vite. Je n'ai pas tué beaucoup de personnes, mais même un enfant sait ça. C'est de la logique pure. Je mets mon épée sur le torse de la personne que j'ai choisis pour mourir en première. Le tout c'est de ne pas rater le cœur. Je passe ma main et essaye de trouver cet organe à travers la peau. Il y a beaucoup d'os. Ça ne va pas être facile d'enfoncer ma lame jusqu'au cœur. Mais je sais comment faire. Je n'ai pas besoin qu'on me guide.
J'allonge délicatement la personne par terre. C'est une femme. En regardant de plus près on dirait qu'elle fait non de la tête. Et j'ai même l'impression de reconnaître ce mouvement ... Non. Je ne veux pas avoir de la pitié pour des gens déjà morts. Je pose la pointe de mon épée sur sa poitrine. Je me prépare à y mettre toute ma force et j'enfonce. J'y mets tout mon poids. La personne ne dit rien. Elle devrait crier, mais elle ne dit rien. Ça me dérange presque. J'ai envie qu'elle se débatte, qu'elle me tape, qu'elle essaye de s'enfuir. Je me sentirais beaucoup moins coupable. Mais non. C'est comme si je venais de tuer une pierre. Elle est morte.
Je passe au suivant et répète les mêmes gestes. Allonger ma victime, poser ma lame sur le torse, et enfoncer jusqu'au cœur avec tout mon poids. Deux personnes sont mortes. Encore ce manège. Allonger le petit sur le sol. Trois morts. Mettre mon épée sur la poitrine. Quatres morts. Enfoncer à travers l'os mon épée. Cinq morts. Toucher le cœur. Six morts. Ils sont tous décédés. Je regarde le sang couler lentement de leur plaie au torse. Une petite pointe de culpabilité me submerge, mais je la chasse très vite. Il le fallait. Pour nourrir les siens on peut faire n'importe quoi. Et je viens de le faire.
Je tourne le dos aux cadavres. Ils commencent à sentir fort que un ou deux jours après la mort. On ne sauras pas que c'est moi qui les a tués. L'homme en noir est parti. Seul son sac est resté. Je me précipite vers celui-ci craignant qu'il n'ait pas honoré sa part du marché. Les deux écailles polies sont bien là. Je les touche et les observe, émerveillé. Je vais enfin pouvoir acheter ce que je veux. Un rugissement retentit au loin, comme si le dragon duquel provient ces écailles criait de douleur à l'idée qu'on les utilise pour ce genre de marchandages. Je souris et me retourne vers mes victimes comme pour les remercier de leur mort.
Je me fige. C'est l'horreur. Les cagoules se sont enlevés tous seuls. Comme par magie. Le sort est lâché. Je serre les écailles jusqu'à en saigner. Et puis je l'entends. J'entends le sang s'écraser par terre. Goutte à goutte. Lentement. Comme une berceuse. Tous mes muscles se relâchent et je tombe à genoux. Chaque meurtre a un prix. On ne peut pas tuer les autres comme ça sans raison. Je viens de payer ce prix. Mon père. Ma mère. Ma sœur. Mes trois frères. Morts. Par ma faute. Tout est de ma faute. J'ai tué trop de gens. J'ai été trop mauvais. Mais c'est compréhensible, non ? Non. J'avais le choix. On a toujours le choix. C'est de ma faute. En voulant sauver ma famille, je l'ai tuée.
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Dragon Princess
FantasíaRoynder est un simple fille de fermier et vit à la campagne. Elle n'a jamais approché un dragon de trop près les jugeant ennuyeux et dangereux. Mais pourtant, sa meilleure amie finit finalement par la convaincre d'aller au festival des dragons. Quel...