Le secret de Tom.

460 27 1
                                    


14 juin 1943, École de sorcellerie Poudlard, Écosse.


Des murmures s'élevaient dans la Salle Commune de Serpentard. Quand Tom Jedusor entra, il croisa le regard d'un de ses camarades, Arsenius Lestrange, qui avait un visage grave. Il s'approcha du groupe formé par une dizaine de dernières années autour de la cheminée.

- C'était une sang-de-bourbe de quatrième année, dit une fille aux cheveux blonds coiffés en un chignon strict. Elle était à Serdaigle, il parait que c'est Olive Hornby qui a retrouvé son cadavre dans les toilettes.
- Oui, Druella, répondit une autre, c'est le professeur Dippet qui l'avait envoyée la chercher parce qu'elle était en train de pleurer dans les toilettes. Personne ne sait de quoi elle est morte. Il paraît que Poudlard va fermer.
- Poudlard ne va pas fermer pour une pauvre sang-de-bourbe, rétorqua Abraxas Malefoy.
- Vous avez tort, il paraît qu'ils savent ce qui l'a tuée. Ils connaissent le coupable, ajouta Merida qui venait de rejoindre Druella.
- Vraiment ? demanda Arsenius.
- Oui, oui, vous savez, ce drôle de garçon, le semi-géant dégoûtant. Il avait un monstre, il l'a lâché sur la sang-de-bourbe. Horrible, vraiment.

Tom laissa échapper un soupir amusé et s'éloigna. Il se posa à l'écart sur un fauteuil et sortit de sa poche un cahier à la reliure de cuir noire sur laquelle était inscrite en lettres dorées « Tom Elvis Jedusor ».

- Elvis. C'est ton deuxième prénom ?

Il leva les yeux vers la sorcière qui venait de prendre place en face de lui. Ses yeux dorés brillaient à la faible lumière des torches accrochées aux murs de la Salle Commune. Ses longs cheveux tombaient en cascade sur ses épaules recouvertes du tissu noir de sa robe.

- C'était le prénom de mon grand-père.
- Je vois. Tu ne m'as jamais vraiment parlé de ta famille, Tom. Tu les connaissais ?
- Tu sais bien que non, Bianca, répondit-il de façon plutôt agressive.
- Je sais simplement que tu as été en orphelinat. J'ignore le reste. J'ignore qui est cet homme, Elvis. J'aimerai savoir. J'aimerai mieux te connaître.
- Un jour, tout le monde me connaitra.
- Tout le monde connaitra ton nom, c'est une certitude. Mais toi, le vrai toi, Tom, je doute que quiconque puisse un jour connaître cette personne, répondit la sorcière l'air déçu. Je pense que c'est une erreur de ta part, de te fermer ainsi.
- Je n'ai que faire de ton opinion, Bianca. Tu m'excuseras.

La fille se redressa, et son visage se fixa dans une froideur extrême.

- Tu réaliseras plus tard, Tom, que tu n'arriveras à rien seul, dit-elle en se levant pour tourner les talons.

Le sorcier la regarda s'éloigner de quelques mètres.

- Elvis Marvolo Gaunt.

Bianca se retourna, et lui lança un sourire avant de continuer son chemin vers les dortoirs.

Le mage passa un doigt distrait le long de la reliure de cuir noir. Tom Elvis Jedusor. Personne n'avait utilisé ce nom depuis des décennies. Il était Lord Voldemort depuis son retour en Angleterre. Le Seigneur des Ténèbres. Tout le monde connaissait ce nom. Personne ne s'était plus jamais intéressé à Tom Jedusor. Bianca Selwyn ne s'était plus jamais intéressée à ce garçon non plus, après ce qui était arrivé. Le mage noir ignorait la raison pour laquelle ces souvenirs lui revenaient en mémoire ces temps-ci. Il ignorait pourquoi cette fille était toujours présente, dans un coin reculé de son esprit.

- Elvis Marvolo Gaunt, fit une voix féminine alors que le carillon de l'entrée du magasin Barjow et Beurk sonnait derrière son passage.

Tom Jedusor reposa la main de la gloire qu'il examinait et se dirigea vers la nouvelle venue. Bianca le gratifia d'un sourire complice.

- Père de Morfin et Mérope Gaunt. Descendant de Cadmus Pewerell et de Salazar Serpentard, continua la sorcière en avançant dans la boutique jusqu'à se retrouver en face de Tom.

Cela faisait deux ans que tous deux avaient terminé leurs études à Poudlard. Il ne l'avait pas vu depuis, et travaillait désormais dans une boutique d'artéfacts de magie noire nichée dans un coin de l'Allée des Embrumes, à Londres. Il se rappela avec amertume la façon dont Armando Dippet, le directeur de Poudlard, avait refusé sa proposition d'enseigner la défense contre les forces du mal, prétextant qu'il était trop jeune pour être professeur.

- Très peu de sorciers peuvent se vanter d'avoir des origines aussi prestigieuses, Tom, ajouta la sorcière. Pas même la moitié des Vingt-Huit Sacrés.
- Comment as-tu trouvé cela ?
- Les Gaunt étaient une famille extrêmement puissante et très célèbre autrefois. Tu sais comme mon père est passionné d'histoire. Les recherches jusqu'au fondateur de notre maison n'ont pas été si compliquées.
- Hmm.
- Je crois savoir que tes...amis, se réfèrent à toi d'une autre façon depuis un moment. Lord Voldemort ? Je trouve cela approprié pour le descendant de Salazar Serpentard.

Tom observa Bianca avec insistance. Il n'entendait aucune de ses pensées. Elle avait changé.

- Où en es-tu dans ta quête du monde magique Tom ? Comment te débrouilles-tu depuis l'arrière-boutique de Barjow et Beurk ?
- Que veux-tu, Selwyn ? siffla Jedusor.
- Je veux connaître la raison pour laquelle tu n'as répondu à aucune de mes lettres, la raison pour laquelle tu as brillé par ton absence à mon mariage, la raison pour laquelle je n'ai pas vu ton visage depuis notre dernier trajet à bord du Poudlard Express, Tom. Tu sais ce que je ressens à ton égard. Tu le sais pertinemment. J'aurais pensé que, si tu avais décidé de me rayer de ta vie, c'est parce que tu étais immensément occupé à construire ce nouveau monde dont tu parlais tant. Mais tu es là, au service de monsieur Barjow, dans une boutique sordide. Tu ne fais rien, tu n'es rien. Tu n'as aucune excuse. Je t'admirais tellement, Tom, tu étais tout. Maintenant tu n'es rien.
- Il te faudra apprendre à différencier les rêves de la réalité, Bianca, répondit Tom d'une voix douceâtre. Tu n'as jamais rien été pour moi, et tu ne seras jamais rien. Ne vas pas t'imaginer quoi que ce soit, veux-tu ?
- Je sais ce que tu as fait, Tom, dit-elle d'un seul coup.

Le sorcier marqua une pause, et un léger sourire se dessina sur ses lèvres. Il pensa aux nombreuses fois où il avait pris le corps de la sorcière devant elle, aux fois où ils avaient étudié la magie noire ensemble. Elle aurait pu être une solide alliée, si elle ne s'était pas enamourée de lui. Maintenant, elle était un fardeau.

- Tom Jedusor Sr, retrouvé mort avec ses parents dans son manoir de Little Hangleton. Morfin Gaunt envoyé à Azkaban après avoir avoué le meurtre. Myrtle Warren retrouvée morte après que la Chambre des Secrets ait été ouverte. Tu crois que je ne me souviens pas des livres de la réserve interdite que nous étudions ensemble ? Tu crois que je n'ai jamais regardé dans celui que tu t'étais empressé de cacher alors que tu étais encore préfet, juste avant de rejoindre le professeur Slughorn pour une réunion de son club ridicule ?

Non. Bianca Selwyn n'était pas un fardeau. La sorcière était intelligente, trop intelligente pour son propre bien. Bianca Selwyn était une menace.

- Je sais ce que tu as fait, Tom, répéta la sorcière d'une voix blanche.
- Aurais-tu peur, Bianca ? Est-ce la raison pour laquelle tu essaies de m'intimider ?
- Je...non. Non, Tom, je n'ai pas peur. Je n'aurai jamais peur de toi.
- Tu devrais.

Le ton de sa voix était létal à présent, et Bianca frissonna devant lui. Elle jeta un rapide coup d'œil en direction de la sortie.

- Tu ne supportes pas le rejet. Tu as toujours voulu que je t'appartienne, Bianca. Que je m'attache à toi. Ravissante, intelligente, redoutable Bianca. Je ne te verrai jamais autrement que comme un outil, peux-tu le comprendre ? Hmm ? Peut-être est-il un peu tard pour comprendre cela. Tu en sais beaucoup trop, Bianca.
- Tom... balbutia la sorcière qui semblait amèrement regretter ses propos.
- Tu es une menteuse. Tu as peur. Je le sens. Tu empestes la peur.
- Tom, je t'en prie. Je suis enceinte.

Elle ne mentait pas. Jedusor sentait cela aussi.

- Quel gâchis, hmm ? Tu aurais pu être une redoutable mangemort, dit-il en repoussant une mèche qui barrait le visage de la future mère.

Il regarda la lumière dorée dans les yeux de Bianca Selwyn, puis admira l'éclair de jade remplacer cette même lueur, et la femme tomba à terre. Tom Jedusor pointa sa baguette fine et pâle à nouveau vers le corps sans vie, et le fit disparaître. Tout à coup, c'était comme si la jeune femme n'avait jamais existé. Il n'avait jamais caressé sa peau hâlée, ni embrassé ses lèvres pulpeuses, ou encore sentit son parfum de rose. Un sourire ornait à présent ses lèvres. Tout allait mieux.

A Black Tale : Sisters of House BlackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant