La voyante.

473 36 7
                                    

Cannes, France, 21 août 1971.

La chaleur était écrasante sur la Côte d'Azur. Bellatrix agitait nerveusement son éventail, tentant de se rafraichir en vain. Elle sentait de longues gouttes de sueurs descendre le long de sa nuque alors qu'elle regardait la mariée remonter l'allée jusqu'à l'autel où l'attendait son époux, le jeune héritier de la famille Moreau, des sangs-purs français qui étaient liés aux Lestrange par divers mariages.
La traîne de la mariée était immense et superbement brodée. Bellatrix la trouva ridicule. La mariée était grande, mince, et avait de longs cheveux blonds. Bellatrix la trouva ennuyante. La cérémonie était solennelle et noble. Bellatrix la trouva quelconque.
Quand les vœux furent prononcés et que l'assemblée se dirigea vers les buffets et la piste de danse en plein air, la brune fut soulagée. Même si elle n'avait aucune envie d'être là, elle devait avouer que la région était splendide. Le mariage avait lieu en haut d'une falaise ensoleillée, la décoration aux tons blancs et crèmes était assez jolie, et la vue sur la mer était à couper le souffle.
Elle écouta l'orchestre jouer un air de valse en regardant le paysage, sans faire attention à Rodulphus qui discutait avec ses cousins. Elle aurait pu se joindre à eux, puisqu'elle parlait également le français, mais elle n'en fit rien. Elle était mieux seule.

Malheureusement, elle ne resta pas seule longtemps. Mérida ne tarda pas à venir la chercher pour la présenter à un groupe de femme d'une quarantaine d'années, toutes plus maquillées les unes que les autres.

- Mes très chères, je vous présente Bellatrix, ma bru. Elle et Rodulphus se sont mariés l'été dernier.
- Comme vous êtes jolie, dit une femme aux grands yeux verts et au nez pointu. C'est un plaisir de vous rencontrer mademoiselle. Je suis Henriette de Beaufort.

La brune serra la main que lui tendait la femme. Elle salua également les deux autres, qui se présentèrent comme étant Odile Chevalier et Jana Valroff. Elle continua de leur faire la conversation en abordant des sujets superficiels comme sa scolarité à Poudlard, son mariage et son avenir.

- Vous n'avez pas d'emploi, vous dites ? demanda Odile.
- Pas vraiment. Je suis très occupée cependant.
- Oh oui, oui. Les femmes au foyer sont très occupées, nous le savons plus que quiconque, répondit Jana avec un accent allemand. Nous ne travaillons pas tellement ici, nous n'en avons pas vraiment besoin.

Les quatre femmes gloussèrent. Bellatrix remarqua que les françaises n'ouvraient pas la bouche quand elles riaient, ce qui leur donnait un air pompeux et ridicule. Un elfe de maison passa avec un plateau rempli de coupes de champagne. Les femmes se servirent, mais Bellatrix regarda ailleurs.

- Pas de champagne, Bellatrix ? demanda Mérida en regardant sa belle-fille avec des yeux brillants.

La brune comprit immédiatement ce qu'allait croire madame Lestrange.

- J'ai déjà eu un verre de vin, je ne voudrais pas abuser de la boisson, répondit Bellatrix avec un sourire hypocrite.

Merlin savait qu'il fallait plus à Bellatrix que quelques verres de vin pour sentir les effets de l'alcool tant elle s'était habituée à boire. Mais maintenant, elle voulait faire attention à sa consommation. Elle ne voulait pas devenir dépendante et risquer de ne pas servir correctement son Maître. Elle ne put s'empêcher de rire intérieurement quand elle pensa que Mérida avait certainement cru qu'elle était enceinte. Ce ne risquait pas d'arriver de si tôt : Bellatrix n'avait ni le temps ni l'envie de concevoir.
À son plus grand soulagement, ce fut le moment que Rodulphus choisit pour intervenir.

- Mesdames, dit-il en leur adressant un sourire charmeur, je vous emprunte madame Lestrange un instant, si vous me le permettez.

Il prit la main de Bellatrix et l'entraîna plus loin. Quand ils furent seuls, à l'ombre des oliviers, il la regarda longuement.

- Cette robe te va à merveille.

Bellatrix grimaça. Mérida avait insisté pour qu'elle porte de la couleur pour l'occasion. La jeune sorcière était alors affublée d'une longue robe violette au tissu vaporeux.

- Les amies de ma mère ne t'ont pas trop importunée ?
- Une véritable torture, grinça Bellatrix. Je ne suis décidément pas faite pour ce genre d'événements mondains à la con.
- Non, je crois que je commence à le comprendre, dit Rodulphus en lui adressant un clin d'œil. Mon épouse est faite pour être sur un champ de bataille.
- Je suis faite pour servir le Seigneur des Ténèbres, affirma la brune.
- Hmm.

Rodulphus sembla se perdre dans ses pensées pendant un instant. Il porta sa coupe de champagne à ses lèvres et prit une longue gorgée, avant de se stopper net.

- Désolé. Je ne devrais pas boire devant toi.
- Pfff. Je ne suis pas un cas si désespéré, Dolph. Ne te gêne pas.
- Hmm.
- Hmm, mima Bellatrix. Qu'est ce qu'il y a enfin ?
- Rien, pourquoi ?
- Je sais pas, t'as l'air bizarre.

Rodulphus resta silencieux, le regard perdu dans le vide.

- Tu vois, tu recommences.
- C'est juste que... Bellatrix si ça ne va pas tu peux me le dire. J'ai l'impression que tu me caches quelque chose. Si c'est à propos d'Andro...
- Ne dis pas son nom, le coupa sèchement la sorcière. Non, ce n'est pas à propos d'elle. Je me fiche bien de cette sale traitresse. Et il n'y a rien. Au contraire. Tout va pour le mieux.
- Hmm. Si tu le dis. Je crois que je vais devoir aller féliciter mon cousin pour son mariage, il serait très malpoli de ma part de ne pas le faire avant que nous repartions pour l'Angleterre, ajouta-t-il en montrant le jeune marié au loin.
- Va. Je te rejoindrai plus tard, je compte profiter de l'ombre encore un instant.

Le jeune Lestrange caressa la joue de son épouse avant de la laisser seule. Bellatrix se tourna et s'appuya contre un arbre alors que ses pensées dérivaient vers son Maître. Elle avait hâte d'assister à la prochaine réunion et de se voir confier une nouvelle mission.

- Je vois des ténèbres en toi, Bellatrix Lestrange.

La voix fluette fit sursauter la brune qui se tourna pour découvrir une fillette vêtue d'une robe beige et aux yeux entièrement blancs qui la fixait.

- Dans ces ténèbres, je vois des combats. De nombreux combats, féroces et d'une violence inouïe. Tu es entourée, mais tu es seule. Les ténèbres un jour t'engloutiront et seront des murs froids dont tu ne pourras t'échapper. Je vois une ombre qui sera ton salut ; elle sera la promesse de ta liberté, et tu seras la promesse de son éternité. Un enfant naîtra de ces Ténèbres, et alors tout disparaitra et le monde que vous désirez ardemment sera anéanti. Pourtant, seul le sang du Seigneur des Ténèbres le ramènera à la vie. Son existence entraînera la perte et la renaissance, mais il y aura toujours un prix à payer pour les Ténèbres.

Bellatrix demeura bouche-bée avant de reprendre difficilement ses esprits.

- Qu'est ce que tu racontes ? murmura-t-elle.
- Qui êtes-vous ? répondit la petite fille qui regardait désormais un point légèrement à côté de Bellatrix. De quoi parlez-vous ?
- Ce que tu viens de dire, qu'est ce que c'était ? Que sais-tu du Seigneur des Ténèbres ? demanda Bellatrix, plus pressante.

La petite ajusta son regard vide vers l'endroit d'où provenait la voix de Bellatrix qui comprit alors que la fillette était aveugle.

- Désolée mais je n'ai aucune idée de ce dont vous parlez... savez-vous où est ma mère ? Fit l'enfant en se tournant.
- Attend, l'arrêta Bellatrix en l'agrippant par l'épaule. Tu as parlé de combats, d'un enfant d'un prix à payer. De quoi s'agissait-il ? Est ce que cela a un lien avec le Seigneur des Ténèbres ?
- Madame je suis vraiment désolée mais je ne connais aucun seigneur. Et je ne vous connais pas non plus, et mère m'a dit de ne pas parler aux inconnus. Je suis désolée.

Bellatrix lâcha l'enfant. Elle ne comprenait pas ce qu'il venait de se passer. Elle raccompagna la fillette au milieu de la foule et la laissa chercher sa mère. Quand la fête prit fin et qu'il fut temps de rentrer au Château Lestrange, les mots de la fillette dont Bellatrix avait réussi à se rappeler résonnait encore dans son esprit. Elle avait un terrible pressentiment.

****

30 août 1971, Manoir Malefoy.


- Maître, puis-je vous parler un instant ?

Voldemort regarda la salle se vider et attendit que Bellatrix et lui soient seuls pour lui faire signe d'approcher.

- Y a t-il un aspect de cette réunion que tu n'as pas compris, Bellatrix ? demanda-t-il d'une voix douce.
- Non, Maître, c'est... j'ai été conviée à un mariage dans le Sud de la France il y a un peu plus d'une semaine et...j'ai assisté à spectacle...peu commun disons.
- Plait-il ?
- Une fillette d'une dizaine d'année est venue à ma rencontre. Elle était aveugle. Je ne l'avais jamais vue avant et pourtant elle m'a parlé de vous, mon Seigneur. J'étais très surprise et je n'ai pas vraiment compris ses paroles. Mais comme ils vous concernaient aussi, j'ai pensé que vous voudriez les entendre.
- Dis-moi, répondit Lord Voldemort d'un ton sec.
- Je ne me souviens pas de tout mais je sais qu'à votre propos, elle a dit « le sang du Seigneur des Ténèbres le ramènera à la vie ». Elle a aussi parlé d'un enfant, et d'un prix à payer. Mais tout était très confus.
- Merci, Bellatrix. Tu peux disposer.
- Maître je...je crains que quelque chose de terrible ne vous arrive, dit Bellatrix la gorge nouée.
- Rien ne m'arrivera Bellatrix. Je m'en suis assuré il y a des années. Va, tu as une mission à préparer.

La sorcière fit une profonde révérence et Voldemort la regarda disparaître derrière les portes de la salle de réception des Malefoy. Il resta longuement seul, à réfléchir à ce que venait de lui raconter Bellatrix. Il avait deviné qu'elle avait rencontré une jeune voyante, et que cette voyante lui avait fait part d'une prophétie. Il semblait que Bellatrix en avait retenu l'essentiel, c'est à dire la partie qui le concernait. Cette partie faisait sans aucun doute référence aux horcruxes que le mage noir avait créés au cours des décennies précédentes. C'était de la magie noire très ancienne et très dangereuse. La création d'un horcruxe nécessitait non seulement le sacrifice d'une vie humaine, mais aussi un don de sang de celui qui créait l'objet maléfique. Ce que lui avait dit Bellatrix était une évidence pour Lord Voldemort : il savait qu'il vivrait pour l'éternité. Néanmoins, c'était une bonne chose que sa servante lui ait rapporté ce qu'elle avait entendu. Maintenant, il fallait se débarrasser de l'enfant prodige qui avait délivré la prophétie et qui en savait bien trop sur le Seigneur des Ténèbres.

________________________________

Chapitre assez court, je m'en excuse. J'espère cependant que vous appréciez l'histoire jusque là.

Pendant que Bellatrix écoute des prophéties étranges, son cousin Sirius s'apprête à entrer en première année à Poudlard aux côtés de son ami James. Narcissa, qui entre en sixième année, aura-t-elle enfin des choses à rapporter à sa sœur aînée ?

A Black Tale : Sisters of House BlackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant