A Black Tale : Sisters of House Black

La Guivre Blanche

2 septembre 1973, Manoir Malefoy, Wiltshire.

Le Manoir Malefoy était silencieux. Narcissa était assise seule dans la véranda ensoleillée à la chaleur étouffante. Elle était restée là tout l'après-midi, à relire sans cesse les derniers mots de Dahlia Greengrass. Son enterrement était survenu la veille, et jamais Narcissa n'avait vu de plus grande peine dans les yeux de ses proches. La disparition de leur amie, de leur fille, de leur nièce, de leur sœur, était profondément injuste. Dahlia était si douce, tous refusaient de croire que le sort la leur avait ainsi arrachée. Les mots de Lisianthus résonnaient encore dans l'esprit de la blonde. Le petit frère de la défunte avait été silencieux tout le long de la cérémonie. Lorsqu'il avait enfin pris la parole, il avait dit cette phrase si innocente, et pourtant si terrible, qui illustrait les effets dévastateurs du temps qui passe : « un jour, je serai plus âgé que ma grande sœur ».
Narcissa n'avait jamais pensé à cela. Elle n'avait jamais imaginé que l'on puisse un jour devenir plus vieux que son aîné. La mort, pourtant, s'en assurait. Dahlia était morte à l'âge de dix-huit ans. Un jour, le jeune Lisianthus atteindrait cet âge, et continuerait de vivre. Dahlia, elle, serait à jamais adolescente. Elle ne se marierait pas, n'aurait pas d'enfants, ne fêterait jamais ses dix-neuf ans. Elle ne connaitrait pas l'enfant de Narcissa, ni celui de Maisie. Quand Lisianthus sera adulte, il parlera de sa sœur à ses enfants en la décrivant comme une jeune fille. Dahlia n'était plus.
Mais elle avait vécu, et s'était battue de toutes ses forces pour profiter de chaque instant, jusqu'à son dernier souffle. Elle avait eu de nombreux amis, avait connu son premier et dernier amour. Ses lèvres avaient connu le délice du baiser, ses bras avaient serré ceux qu'elle avait aimé. Son rire crystalin avait de nombreuses fois résonné entre les murs de Poudlard, ses talents avaient maintes fois impressionné ses professeurs. Dahlia avait vécu, et avait profité de sa vie, en dépit des malheurs.
Quand elle fermait les yeux, Narcissa pouvait encore sentir l'étreinte chaleureuse de son amie contre elle. Elle pouvait encore entendre sa voix douce. Si Dahlia était là, elle lui dirait sans aucun doute « Cesse donc de te morfondre, Cissy chérie. Regarde comme il fait beau dehors ! Allons profiter de ce temps avant de regretter le soleil ».

Narcissa leva les yeux pour regarder le grand jardin à travers les vitres de la véranda.

- Tu as raison, Dahlia. Il fait très beau aujourd'hui, murmura-t-elle.

Alors, elle posa doucement la lettre de son amie sur le canapé où elle était assise, et se dirigea vers l'extérieur. Les rayons du soleil caressèrent sa peau pâle lorsqu'elle se balada le long des allées, à travers les pelouses fraîchement tondue. Elle regarda les paons albinos qui se pavanaient majestueusement dans l'herbe, observa les rares nuages blancs qui dessinaient des formes mystérieuses dans le ciel bleu. Instinctivement, elle caressa son ventre encore plat l'air absent.

- Mon enfant, sache que tu es aimé, dit-elle à voix basse. Ta tante Dahlia aurait été la meilleure marraine du monde. Je te parlerai d'elle quand tu seras parmi nous. C'était ma meilleure amie, et je veux que tu la connaisses.

****

Bellatrix arriva en catastrophe au Manoir Malefoy. Elle venait tout juste de rentrer d'une mission qui avait failli mal tourner. Quelques minutes plus tôt, elle avait été à Pré-au-lard pour faire exploser une boutique. Malheureusement, elle n'avait pas remarqué la présence de plusieurs aurors qui patrouillaient là et leur avait échappé de justesse. Maintenant, elle se dirigeait vers sa chambre quand elle vit une silhouette déambuler dans le jardin à travers la fenêtre. Elle s'en approcha et, à travers la vitre, observa Narcissa qui marchait seule à travers les pelouses ordonnées du manoir. La brune soupira, et décida finalement de rejoindre sa sœur.
Narcissa était toute habillée de noir. Bellatrix savait pourquoi, puisqu'elle avait elle-même assisté aux funérailles de la jeune Dahlia Greengrass quelques jours plus tôt. Aussi, lorsqu'elle s'approcha de la benjamine, elle n'était pas tout à fait à l'aise. Elle ne savait pas comment fonctionnait le deuil, n'ayant elle-même pas encore perdu de proches auxquels elle tenait.