Little Hangleton

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1er janvier 1976, Little Hangleton, Angleterre.


Il était une heure du matin quand Bellatrix atterrit devant la petite maison de pierre. L'habitat était désert, plongé dans la pénombre. Une fois à l'intérieur, Bellatrix alluma la cheminée afin de réchauffer l'atmosphère glaciale, et s'assit sur le sofa. Elle ne savait pas si elle pouvait montrer ses affaires dans la chambre à l'étage, et ignorait s'il y avait d'autres pièces où elle pouvait dormir. Le sommeil ne tarda pas à engourdir son esprit et son corps, et la nuit l'enveloppa toute entière avant que son Maître ne soit revenu.

Le lendemain matin, Bellatrix fut réveillée par le chant des oiseaux. Il faisait encore nuit, aussi dû-t-elle plisser les yeux pour distinguer les formes autour d'elle. Elle réalisa alors qu'elle était dans un lit, dans le lit, et qu'elle n'avait sur elle que ses sous-vêtements. Sa robe avait été posée proprement sur une chaise en face d'elle, et sa valise trônait à côté de l'armoire en bois. Machinalement, elle saisit sa baguette posée sur la table de chevet, et se leva en baillant. Elle choisit une tunique noire, passa un corset étroit par dessus, et lança sur elle-même quelques sortilèges de rafraichissement afin d'être plus propre. La maison semblait toujours aussi vide, et Bellatrix se demandait si elle était elle-même montée se coucher pendant la nuit, ou si son Maître s'était occupé de tout cela. Bien que la première option lui parut plus plausible, elle n'avait aucun souvenir de s'être réveillée pendant la soirée.
La sorcière descendit au rez-de-chaussée et, sans grande surprise, ne trouva personne. Lord Voldemort n'était pas le genre à rester enfermé entre quatre murs, et devait sûrement être en mission quelque part. Bellatrix se demanda ce qu'elle allait bien pouvoir faire de ses journées maintenant qu'elle était seule. Son Maître ne lui avait donné que très peu de précisions sur la situation actuelle. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'elle devait rester ici jusqu'à ce que le Seigneur des Ténèbres lui donne l'ordre d'agir. Elle ne savait pas ce qui se passait du côté des Lestrange, et se demanda où Rodulphus et Rabastan avaient bien pu trouver refuge. Elle repensa à la suggestion de Lord Voldemort, qui avait dit que, si elle tenait vraiment à sortir, elle n'avait qu'à éliminer tous les aurors un par un. Cela serait difficile, mais pas impossible. Néanmoins, elle n'avait pas reçu d'ordre, aussi resta-t-elle toute la journée à ne rien faire d'autre que les cent pas dans la minuscule maison de son Maître. Elle trouvait drôle que le plus puissant mage noir de tous les temps puisse habiter dans un foyer pareil. Elle savait qu'il ne venait pas d'une famille aisée, mais il disposait à présent d'une fortune colossale. Pourquoi rester dans ce taudis, quand on a les moyens d'acquérir un château ou un manoir ?

Bellatrix ne vit pas le Seigneur des Ténèbres de la journée. À vingt-deux heure, cependant, elle sentit sa marque la brûler et transplana aussitôt. Bizarrement, ce n'est pas au Manoir Malefoy qu'elle atterrit, mais devant une autre demeure. Il s'agissait d'un immense manoir en ruines qu'elle reconnut aussitôt. C'était le même qu'on voyait depuis la fenêtre de la chambre. C'était le Manoir Jedusor.
En marchant le long de l'allée qui menait à l'entrée du Manoir, elle aperçut un homme hideux qu'elle devina être un jardinier, puisqu'il s'occupait de tailler les haies. Elle ne lui prêta pas plus attention, se disant qu'il avait dû être ensorcelé, et entra dans le Manoir. À l'intérieur, l'air était froid et les pièces étaient à peine éclairée par la lueur de bougies enchantées qui flottaient au plafond. Elle entendit des voix s'élever d'une grande salle sur sa droite, et s'y dirigea. Là, elle découvrit ses compères autour d'une large table, de la même façon que chez les Malefoy. Lord Voldemort était à sa place habituelle, celle du Maître de table. Elle remarqua que la chaise à sa droite était vide et y pris place, en avisant Rodulphus qui était assis non loin d'elle. Le silence s'installa, et le Seigneur des Ténèbres prit la parole.

- Les aurors traquent plusieurs d'entre vous. Restez tous vigilants, mais continuez de vous battre. Tuez-les s'ils vous approchent. Pour ceux qui n'ont pas encore été identifiés par le Ministère, gardez vos masques lors des missions. Pour les autres, cela est à présent inutile. Dolohov et les Lestrange, vous partez pour la Bulgarie dans une semaine. Vous y resterez quatre jours, Dolohov vous expliquera la raison de votre voyage. Vous résiderez chez les Krum.
- Bien Maître, répondit Rodulphus.
- Bella, Rosier et Rowle, un sorcier du nom de Malacus Ruffin participera à une séance de dédicace sur le Chemin de Traverse le 8 janvier pour son nouveau chef d'œuvre intitulé « nos amis les moldus ».

Ses propos déclenchèrent l'hilarité parmi les mangemorts. Voldemort laissa les rires se dissiper avant de continuer d'un ton létal.

- Vous saurez quoi faire.
- Doit-on éliminer tous ceux qui seront présent, mon Seigneur ? demanda Thorfinn Rowle.
- Tuez Ruffin, amusez-vous avec le reste. Si vous avez un doute sur ce que vous avez à faire, faites comme Bellatrix. D'autres questions inutiles, peut-être ? demanda le mage noir d'une voix douceâtre.
- Non, mon Seigneur, balbutia Rowle.
- Bien. Les Carrow, où en êtes-vous avec le poste de professeur de défense contre les Forces du Mal ?
- Hum... le professeur Dumbledore a rejeté chacune de nos candidatures, Maître... répondit Alecto qui était devenue livide.

Bellatrix ne put s'empêcher de rire, brisant le silence qui s'était installé et attirant sur elle l'attention de toute l'assemblée. Lord Voldemort ferma les yeux et passa lentement sa langue sur ses lèvres, comme s'il cherchait en lui la force de ne pas tuer sur le champ la fauteuse de trouble. Bellatrix arrêta immédiatement de rire et regarda le sol, terrorisée.

- Pitoyable... murmura le mage noir. Dites-moi, les Carrow, que faites-vous dans mes rangs ?
- Nous...nous croyons en vos idéaux, mon Seigneur, répondit Amycus. Nous voulons servir le bon côté.
- Servir le bon côté, hmm ? répéta lentement Lord Voldemort. Et comment comptez-vous le servir si vous êtes aussi utile que des cracmols ?
- Nous...nous...je...bredouilla Amycus.
- Lucius, aboya le Seigneur des Ténèbres. Débrouille-toi pour entrer au Conseil d'Administration de Poudlard. Il nous faudra quelqu'un pour surveiller directement le déroulement des choses là-bas. Puisque ce ne sera ni Amycus ni sa sœur, j'espère que toi, qui jusque là ne m'a jamais déçu, tu trouveras un moyen de t'approcher de ce fou d'Albus Dumbledore.
- Cela sera fait, Maître.
- Bien...bien... dit le mage noir d'une voix aigüe. Disposez.

Tout le monde partit sans un mot. Bellatrix attendit qu'il n'y ait plus personne pour adresser la parole au Seigneur des Ténèbres.

- Maître...
- Hmm.
- Je me demandais... hum... résidez-vous chez les Malefoy ?
- Non.
- Oh...euh...
- J'ai à faire, Bellatrix, je ne passe que très peu de temps dans la maison où tu restes en ce moment.
- Bien sûr, mon Seigneur.
- Autre chose ?
- Je n'ai vu qu'une seule chambre...je ne suis pas sûre de pouvoir...
- Il y en a d'autre, dors dans celle où tu as passé la nuit, répondit sèchement le mage noir. Bien, Bella, à moins que tu aies décidé de me faire perdre mon temps, tu vas devoir partir.

Bellatrix fit une profonde révérence, sortit du Manoir et retourna à pieds vers la petite maison de pierre qui n'était qu'à un petit quart d'heure du village. Après avoir dîné seule, elle alla se coucher seule, et après s'être retournée encore et encore dans les couvertures, incapable de trouver le sommeil, elle alla regarder à la fenêtre. En observant le Manoir Jedusor au loin, elle se demanda si son Maître y était encore. Elle n'avait jamais vécu seule, et elle avait beau ne pas être la femme la plus sociable de l'univers, elle s'ennuyait vite lorsqu'elle n'était pas entourée. L'idée qu'elle était l'unique âme vivante dans cette petite maison la mettait mal à l'aise.
Bellatrix prit une profonde inspiration, ferma les yeux et se concentra. Elle pensa aux moments les plus heureux de sa vie. Successivement, elle vit défiler les visages de Narcissa, Rodulphus et de son Maître. Elle ressentit l'adrénaline qui traversait son sang sur les champs de bataille, et la chaleur qui engourdissait ses membres quand le Seigneur des Ténèbres posait les yeux sur elle. Puis, s'échappant de sa baguette, une lumière éclaira la pièce, et la silhouette fuselée d'un mamba noir apparut dans les airs. Bellatrix ouvrit les yeux et admira le reptile, qui ne resta que quelques secondes avant de s'évaporer. La sorcière n'avait jamais été très douée pour faire apparaître un patronus. Déçue, elle soupira et retourna se coucher, espérant trouver enfin le sommeil.
Alors qu'elle venait de s'endormir, elle sentit un contact froid sur son épaule qui la fit se réveiller en sursaut. À la faible lueur de la Lune, elle découvrit le visage pâle du Seigneur des Ténèbres qui était assis au bord du lit. Elle se redressa contre les oreillers, et resta muette. Lord Voldemort regardait en direction de la fenêtre, et Bellatrix regardait Lord Voldemort. Il avait eu quarante-neuf ans très récemment, et le temps n'avait pas épargné son apparence. À ses nombreuses cicatrices, à l'aspect cireux et brûlé de sa peau s'ajoutaient des rides désormais. Malgré cela, Bellatrix ne pouvait s'empêcher de le désirer ardemment, et de l'adorer par dessus tout. Il était le pouvoir incarné, et rien aux yeux de la sorcière n'était plus attirant que le pouvoir. Un jour, il contrôlerait le monde magique, et elle serait à ses côtés.

- Déshabille-toi, dit Lord Voldemort sans ciller.

Incrédule, Bellatrix mit quelques secondes à comprendre l'ordre de son Maître. Fébrile, elle fit glisser les bretelles de sa robe de nuit sur ses épaules, puis enleva le vêtement totalement. Intimidée par la présence du Seigneur des Ténèbres, et même s'il avait déjà vu son corps menu auparavant, elle tira la couverture vers elle pour se protéger de son regard. Lord Voldemort, pourtant, n'avait toujours pas posé les yeux sur elle.

- M'aimes-tu, Bellatrix ? demanda le mage noir d'une voix glaciale.
- Je vous demande pardon, mon Seigneur, bredouilla la brune, mais je ne suis pas sûre de comprendre votre question...
- Es-tu amoureuse de moi ? demanda à nouveau l'homme en braquant cette fois son regard dans celui de Bellatrix.

Un frisson de malaise traversa l'échine de la sorcière qui déglutit bruyamment. Même si elle l'avait voulu, elle n'aurait pas trouvé la force de mentir à son Maître.

- Oui, répondit-elle finalement d'une voix blanche.

Voldemort passa lentement sa langue sur sa lèvre inférieure, soupesant Bellatrix du regard. Était-il en train de se demander s'il allait la tuer ou s'il allait prendre son corps ? Les deux options étaient aussi plausibles l'une que l'autre. Paralysée, Bellatrix soutenait le regard de son Maître, profitant de chaque seconde en sa présence.

- Qu'est ce que tu ressens ? demanda-t-il sèchement, toujours impassible.

Bellatrix eut une nouvelle fois du mal à comprendre sa question, puis elle réalisa. Lord Voldemort n'avait aucune idée de ce qu'étais l'amour. Il était en train d'essayer d'identifier ce que ce pouvait bien être. Mais Bellatrix elle-même n'était pas sûre de la conventionalité de ses sentiments. Elle savait qu'elle aimait son Maître, mais son amour était différent de celui qui, par exemple, unissait Narcissa et Lucius. Il était à la fois cent fois plus puissant, et cent fois plus faible. Il était tout et rien à la fois. Elle adorait l'idée qu'elle se faisait de Lord Voldemort, et ne voyait en lui que perfection. Pourtant, ce qu'elle connaissait de lui n'était qu'une infime partie de son être. Malgré cela, elle sacrifierait tout pour lui. Elle vivait pour lui.

- Je crois que...je ressens un besoin constant d'être à vos côtés, et un désir ardent de vivre et mourir pour vous.
- Hmm.

Le mage noir sembla réfléchir un instant, puisque son regard se perdit dans le vague. Puis une lueur écarlate traversa ses pupilles, et il leva les yeux vers Bellatrix.

- C'est pathétique, dit-il lentement, tout en passant sa main sous la couverture pour la poser sur le bas-ventre de Bellatrix.

Elle ressentit alors une chaleur étrange irradier à l'endroit où Lord Voldemort avait posé sa paume, et sentit un frisson d'excitation se propager dans tout son corps. Le mage noir la força à s'allonger sur le ventre et s'arrangea derrière elle. Bellatrix ferma les yeux, et regretta qu'il n'ait jamais daigné enlever ses robes lorsqu'il était avec elle. Elle prit une profonde inspiration et, d'une petite voix, lui demanda :

- Maître...pourriez-vous...vous dévêtir ?

Lord Voldemort s'immobilisa alors derrière elle, et elle n'entendit plus que le bruit de sa respiration.

- Non, Bella, répondit-il lentement. Maintenant, cambre-toi plus, veux-tu ?

A Black Tale : Sisters of House BlackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant