Chapitre 75

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Herman.

Je prends une grande inspiration et j'entre dans la petite chambre d'hôpital, Laura est recroquevillé sur le côté, toujours en larmes, avec une nouvelle tenue. Je m'assois à côté d'elle et je pose ma main sur sa joue. J'essuie ses larmes, elle lève la tête vers moi.

-Je suis désolée.

-T'as pas à l'être. Ça arrive, je ne t'en veux pas.

-Moi je m'en veux.

-Pourquoi ?

-Parce que j'ai l'impression que je ne suis pas capable de porter un enfant et que je ne peux pas le protéger. J'ai juste l'impression d'être nulle.

-Tu ne l'est pas Laura, tu ne l'est pas. C'est juste que ça arrive ce genre de chose, ça ne veut pas dire que tu es nulle et incapable de porter un bébé. Je te fais confiance, on va y arriver.

-J'ai pas cette impression.

-On en rediscutera plus tard. Là, c'est quasi deux heures du matin, t'es fatiguée tant physiquement que mentalement. Repose toi, ça te fera du bien.

Elle hoche la tête et s'allonge plus confortablement. Je prends sa main et la caresse doucement, elle finit par s'endormir. J'espère qu'elle saura se reposer correctement, qu'elle aura un bon sommeil. Je récupère mon téléphone et envoie un message à ma secrétaire, je ne vais pas travailler aujourd'hui. Je vais rester avec Laura ce week-end, elle aura besoin de moi.

Je me cale confortablement dans mon fauteuil et la regarde. Je décide de veiller sur elle, si jamais Laura se réveille dans la nuit. Je sens la fatigue, mais je lutte vraiment contre.

Sauf qu'elle est bien plus forte que moi, je finis quand même par m'endormir.

* * *

Du bruit me réveille, j'ouvre les yeux et regarde la chambre. Une infirmière est là, elle s'occupe de Laura, je profite pour regarder vite fait l'heure, c'est déjà huit heures. Je les regarde sans faire de bruit puis, quand elle part, je m'installe à côté de Laura, qui a un petit sourire triste quand elle me voit.

-Bonjour. Ça va un peu mieux ?

-Physiquement, oui. Je n'ai plus de douleur, ça aide à aller mieux.

-Et mentalement ?

-J'ai perdu un bébé que j'aimais déjà, ça fait mal. J'aurais besoin d'un peu de temps pour me remettre.

-C'est sûr. Mais on sera ensembles.

-Heureusement. Et dis-moi, est-ce qu'on pourra attendre un peu avant la dernière insémination ?

-Oui, on pourra prendre notre temps. Je ne vais pas te mettre le couteau sous la gorge pour avoir un enfant. T'as eu assez mal là.

-Merci. Je savais que tu étais compréhensif.

-Tu ne le savais pas avant aujourd'hui ?

-Mmm, non.

Je rigole, elle aussi. Il est vrai que je suis compréhensif, mais je le suis bien plus que ce que pensais. Je sais parfaitement d'où vient ma gentillesse, c'est parce que j'aime cette femme. Jamais je n'aurais été plus cool si je n'étais pas simplement amoureux.

Je me calme puis je la regarde. Elle est bien plus belle souriante qu'en larmes. Mais je comprends sa tristesse, moi même je le suis, je le voulais ce bébé, mais j'y garde pour moi.

Nous continuons notre petite discussion un bon moment, puis l'interne d'hier soir arrive dans la chambre avec le gynécologue, il examine une dernière fois Laura puis ils nous laisse. Laura va aller en chambre pour deux ou trois jours, histoire de bien suivre et s'assurer qu'il n'y a aucune complication. Elle ne va pas subir de curetage, l'embryon s'est éjecté seul.

Une infirmière vient après quelques minutes, elle nous indique qu'une chambre est libre. Je la suis avec les papiers, la chambre est au troisième étage. Laura s'installe sur le lit en soupirant, je pose les papiers sur la petite table et vais devant elle quand on est de nouveau seuls.

-T'as besoin de quelque chose ? Je peux aller à la maison pour récupérer deux ou trois trucs.

-Je veux bien mon téléphone et des habits, s'il te plaît.

-C'est tout ? Pas de livres ou d'autres occupation ?

-Non. J'ai surtout envie de me changer.

-D'accord. Je vais y chercher, j'essaie d'être rapide.

-Prends ton temps, je ne vais pas m'enfuir d'ici.

-J'ai pas envie de te laisser seule.

Elle sourit tendrement en posant une main sur ma joue, je pose ma main sur la sienne.

-Merci de te soucier autant de moi.

-C'est normal. T'es importante pour moi, je...

Je me retiens au dernier moment, le je t'aime allait sortir. Il n'est pas à sortir maintenant, il doit encore attendre un peu.

-Je t'apprécie énormément. T'es quand même la future mère de mon enfant.

-Pas pour le moment.

-Tu le seras, j'en suis sûr. Ce n'est qu'une question de mois.

Je lui fais un bisou sur le front puis je m'en vais. Je joue avec les clés de ma voiture, l'esprit ailleurs. Cette fausse couche remets tout en doute. Même si, comme je l'ai dit à Laura, ce n'était qu'une question de mois, je ne sais pas si on va y arriver en fin de compte.

J'ai confiance en elle, en son corps. Je sais qu'elle peut attendre la vie, elle me l'a déjà prouvé, mais j'ai l'impression que la vie s'amuse à nous mettre des bâtons dans les roues. Si la troisième insémination ne marche pas, je ne sais pas ce qu'on devra faire pour réussir.

Avoir un enfant est finalement beaucoup plus compliqué que ce que je croyais, et ça me gonfle. Il y a des gens qui ont des bébés très rapidement, parfois même sans le vouloir, puis, quand tu en as vraiment envie, tu peux en chier pendant des mois, si ce n'est des années, sans comprendre les raisons.

J'entre dans ma voiture et je pars direction la maison. J'essaie de faire vite, mais comme toujours à New-York, il y a des putains d'embouteillages monstre. Je pense sérieusement à prendre quelques jours pour me reposer, ça fait des mois que je travaille comme un fou.

Ouais, je vais me prendre une semaine de congé. En plus, je pourrais emmener Laura, ça lui fera du bien de sortir d'ici, de profiter de moment de détente. Je veux vraiment qu'elle se sente bien après ce qu'elle a vécu.

Je préviens ma secrétaire que je prends une semaine de congés à partir de lundi dans l'ascenseur, je n'ai rien sur le feu et je réglerais quelques détails ce week-end. Elle me réponds rapidement que mes congés sont posés, c'est une bonne chose de faite.

Arrivé à l'appartement, je fonce dans la chambre de Laura et je lui fais un sac.

-Monsieur, bonjour.

-Oh, bonjour Stéphanie.

-Que ce passe-t-il ? Pourquoi vous avez disparu dans la nuit ?

-Laura a fait une fausse couche. On a du partir en urgence à l'hôpital.

-Mince, je suis désolée pour vous, et pour elle. Comment elle va ?

-Elle est triste, déçue.

Je finis le sac et le boucle, je récupère le téléphone et me poste devant la maîtresse de maison.

-Je dois la rejoindre avec des habits. On en reparlera plus tard.

-Pas de soucis. Passez lui le bonjour de ma part.

-Je le ferais.

Je lui souris et quitte la chambre. Je me dirige rapidement vers l'ascenseur et on est repartis.

Une vie sous contratOù les histoires vivent. Découvrez maintenant