Tes doigts enlacent les siens, je me sens idiot. Pourtant, mon sourire bête ne s'évanouit pas. Devant eux, je veux me montrer digne. J'ai miraculeusement réussi ; ils ne se doutent de rien. Seul Minho m'attrape par l'épaule. Ses yeux brillants luisent d'inquiétude. Je l'adore, Minho. Il est mon frère. À lui, je ne peux rien lui cacher, mes peines comprises. Voilà pourquoi il sait. Je vois ses lèvres se pincer. Effectivement, il sait. Il m'éloigne de notre groupe d'amis et m'entraîne dans un coin silencieux. Veut-il encore en parler ? Décidément, il est bien trop bienveillant. Un sourire désolé se dessine sur ses lèvres.
« Eh, frérot ? Tout va bien ?
— Pourquoi ça n'irait pas ?
— Newt... Tu vaux bien plus que cette pin-up. À tous les coups, il ne l'aime pas vraiment. Je suis prêt à te parier qu'il la sort d'un de ses bars douteux.
— Je vais bien, Min. Je suis passé à autre chose.
— Ah ouais ? Et comment t'expliques le fait que tu retiennes tes larmes ?
— Je... Je ne retiens rien du tout.
— Je suis désolé, frérot... Vraiment désolé. Je sais combien tu l'aimes. Je connais parfaitement bien ce sentiment, c'est terrible.
— Ne t'excuse pas, ce n'est pas de ta faute s'il n'est pas gay.
— Tu vois ce que je veux dire, idiot. J'aimerais te voir plus heureux, surtout dans ces moments ! Enfin, c'est rare, les soirées où on peut tous se retrouver ! Et puis, Alby et Aris partent pour la Virginie dans trois jours !
— J'essaye d'en profiter, je t'assure ! mais... enfin, regarde-les... il lui tient la main comme dans un film cliché ! Ils n'arrêtent pas de s'embrasser, de se souffler des mots doux... ils sont collés l'un à l'autre comme si seul l'univers pouvait les séparer, on parle de leur rencontre depuis des heures... et ils ont l'air si heureux, si amoureux, si comblés... Ils se sourient comme des ados et par-dessus tout, il m'ignore... Je... Je n'existe tout simplement pas pour lui... »
Ma vision s'embrume. Il avait raison une fois de plus ; je retenais bien mes larmes. Pourquoi voit-il toujours juste ? Sa main regagne mon épaule, il me communique son soutien en un regard. En face de nous, le couple se sourit. Je n'aurais jamais cru que mon cœur était capable de se serrer aussi fort. Une larme humidifie ma joue, je renifle. Je suis ridicule.
« Je suis ridicule...
— Ne dis pas ça... tu es amoureux. C'est normal, d'être aussi triste. J'étais dans le même état, lorsque j'ai vu Sonya avec... Tristan... Tristan... Quel mec sympa porte un nom pareil ?
— Aucune idée... soupire-je.
— Excuse-moi, il s'agit là de toi. Écoute, um... J'aimerais te partager quelque chose.
— Quoi donc ? Qu'as-tu fait, cette fois-ci ?
— Oh rien, ne t'en fais pas. Je veux simplement te dire que... enfin, quand j'ai vu Sonya avec ce type, j'ai... eu cette drôle d'impression.
— C'est-à-dire ?
— J'étais dévasté, certes, mais... il y avait quelque chose d'autre, derrière tout ça. Des regrets.
— Des... regrets ?
— Je regrettais de l'avoir gardé pour moi, de ne jamais lui avoir dit. Maintenant, elle est fiancée est c'est trop tard. Je regrette encore.
— Tu... Tu veux que je lui dise ?
— Ça te soulagerait à coup sûr !
— Mais... Mais... Je ne peux pas faire ça ! Je gâcherai notre amitié !