If I tell you I'm happy

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Thomas jugeait silencieusement son camarade, le front légèrement plissé par l'inquiétude, les yeux indiscrètement attentifs. Il jeta un coup d'œil à son professeur et murmura lorsqu'il leur tourna le dos : « Eh, Newton ? Tu vas bien ? » Le garçon blond compressait son stylo à encre entre ses doigts, s'acharnant sur une feuille de papier vierge qu'il recouvrait de noir. Ses mèches s'inclinèrent un peu plus alors qu'il grognait : « Essuie-moi ce regard de ton visage, Tommy. » Ses mots surprirent le brun, ses sourcils se haussèrent avant qu'il ne réponde : « Quel regard ? » Newton dit en fixant la blancheur sur les coins de sa toile : « Tu transpires la pitié. La pitié hypocrite qui sert à se prouver qu'on en a quelque chose à foutre des autres.

— Je ne suis pas comme ça. se défendit-il, offensé.

— Tu ne l'es pas. Tout comme tu n'es pas le fils pourri gaté de papa et le chouchou de maman. Il le prend comment, ton frère aîné ?

— Comment tu peux dire ça ? Tu ne me connais pas !

— Figure-toi que venir au bahut en Mercedes, ça se remarque. Tout comme rire bruyamment avec ta bande d'idiots. Tu es étonné ? Toi qui pourrais crever pour un minimum d'attention.

— Je t'ai simplement demandé si tu allais bien ! T'es malade ?

— T'as qu'à prendre ma température, enfoiré. »

Thomas s'apprêtait à rétorquer, bouillant d'une rage honteuse, mais son professeur le devança d'un claquement de langue et d'un regard aussi noir que la feuille coloriée de son voisin. Il n'osa plus adresser la parole au blond jusqu'à la fin de leur classe. L'après-midi, le brun aperçut Newton, solitairement allongé contre le tronc d'un arbre dans la cour, lisant un livre aux pages cornées. Il quitta son groupe d'amis pour s'approcher du garçon, demandant à nouveau sans trop savoir pourquoi : « Tu vas bien ? Tu sembles triste. » Les iris obsidiennes de l'étudiant se vissèrent dans les siennes de cet aspect sévèrement strict. Thomas frémit, rarement habitué à cette froideur qu'il trouvait d'une manière ou d'une autre charmante.

« Si je te dis que je suis heureux, ça te fera partir ?

— Ça dépend. Il faudrait que ce soit sincère.

— C'est pourtant ce que je suis censé dire, que je suis heureux.

— Pas avec moi. Je ne suis pas ce que tu crois.

— Mes mots voudront encore dire quelque chose si je me mords les lèvres et baisse les yeux ? Ou devrais-je les avaler et bêtement hocher la tête ? Je sais le faire, ça, hocher la tête.

— Tout ça pour une simple question ? Tu ne m'as même pas concrètement répondu.

— Disons que tout le monde veut mourir, parfois.

— C'est ce que tu veux ?

— La vie est difficile.

— Que t'arrive-t-il ? Tu as des problèmes ?

— N'importe lesquels. Il suffit que tu me dises un nom et je jouerai ce rôle. Je sais comment prétendre.

— Je ne veux pas d'une autre opinion que la tienne.

— Tu ne peux pas dire que je vais bien, d'après mes yeux révulsés et mes cernes ?

— Je ne peux pas deviner tes ressentis.

— Et si je souris ? Je continuerai de mourir, mais tu ne le sauras pas.

— Je ne te demande pas non plus de faire semblant d'aller bien.

— Tu sais quoi, Tommy ? La prochaine fois, je te dirai que je suis heureux. »

Il s'en alla sur ces mots, abandonnant Thomas aux pieds de l'arbre. Le soir, le jeune brun l'intercepta devant son arrêt de bus. Il était éclairé par la lumière jaunâtre d'un lampadaire, aussi seul qu'à son habitude, regardant la route d'un œil vide. Thomas se posta à ses côtés, le blond ne réagit pas lorsqu'il remarqua : « Je ne t'ai jamais vu à mon arrêt.

OS Newtmas & DylmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant