La moue suppliante de sa fille adoptive dissuada Newton. Son roman glissa d'entre ses doigts dans un soupir : « D'accord, très bien. Il peut dormir ici ce soir.
— Oui ! Merci, dad ! Tu sais, papa avait aussi accepté, la dernière fois que j'étais chez lui ! sourit Crystal.
— Oh, ton père de toute façon... Tu pourrais foutre le feu à son appartement qu'il dirait rien. grogna-t-il. Enfin bon... Je ne suis pas Maxence, sache-le. Dans cette maison, il y a des règles.
— C'est-à-dire ?
— Il y a des conditions à respecter.
— Lesquelles ?
— Primo, pas de nuit blanche. Deuzio, pas de conneries avec vos portables ou autre. Aussi, gardez une distance de plus de dix centimètres entre vous.
— Dad ! Sérieux ?
— Oui, sérieux.
— J'ai dix-huit ans ! Qu'est-ce qui te dérange ? Tu ne l'aimes pas, c'est ça ?
— Je n'ai absolument rien contre Thomas... Je dis simplement que je ne lui fais pas confiance. Il a le don de me faire des avances et j'ai peur qu'il t'utilise.
— Pour quoi ? T'approcher ? soupira-t-elle.
— Je te signale qu'il m'a fait du pied, au dernier dîner ! Je ne tolérerai pas un tel comportement !
— Ce que t'es égocentrique ! Tout ne tourne pas toujours autour de toi !
— Évidemment que non, ma chérie. Cependant, je remarque juste que ce Thomas reste douteux. Attends avant de franchir le pas trop vite avec lui.
— D'accord, d'accord...
— Promis ?
— Promis. »
Ils échangèrent un sourire.
0o0
Ayant supplié les deux hommes de se réunir devant la télévision, Crystal avait fini par s'endormir, affalée dans le canapé du salon. À ses côtés, Thomas scrutait ses traits apaisés avec désintérêt. Newton, quant à lui, le regardait d'un œil méfiant. Faussement concentré sur leur film d'aventure, il surveillait l'adolescent avec discrétion. Lorsque celui-ci ancra ses yeux brillants sur sa silhouette, son cœur tambourina dans sa cage thoracique. Les lèvres béantes, il prétendit l'ignorer. Un sourire déforma le visage de Thomas. Son corps quitta celui échoué de sa petite amie pour s'agglutiner contre celui de l'adulte. Newton déglutit avec maladresse. La main de l'adolescent coula le long de sa cuisse, son souffle brûlant se logea dans son cou.
« Vous saviez pertinemment ce que je voulais n'est-ce pas, monsieur Isaac ?
— Je t'interdis de blesser ma fille, est-ce clair ?
— Ce ne sont pas dans mes intentions. Je me suis toujours très bien occupé de Crystal, interrogez votre ex mari.
— Ce ne sera pas nécessaire, merci. »
Dans un grognement, l'adulte s'écarta brusquement de son emprise. Thomas eut un rire grave. Il rampa jusqu'à lui, souriant de plus belle : « Comment est-ce que vous avez su ?
— Tu me lances des blagues déplacées, ne cesses de me questionner lorsque tu es à la maison et, pour couronner le tout, tu remues ciel et terre pour me toucher à chaque fois que l'on se croise.
— J'ai laissé quelques indices, effectivement...
— Il n'y a rien d'amusant. Si tu restes auprès de ma fille uniquement pour m'atteindre, tu peux déguerpir sur le champ. »
Une profonde inspiration gonfla le torse de l'adolescent. Ses doigts jouèrent avec la braguette de l'adulte qui se paralysait.
« Crystal est une fille intéressante, belle et aimable. Je l'apprécie. En revanche, elle n'est pas vous, monsieur Isaac. Vous, vous êtes mon fantasme. Elle, je ne l'ai jamais aperçu de cette façon. Vous me faites rêver. Je vous vois chaque nuit. Je nous imagine si bien.
— J'ai... J'ai trente-six ans, Thomas. Trente-six !
— Et alors ? sourit-il. Vous êtes désirable, monsieur Isaac. Vous avez des yeux profonds et envoûtants, un corps long et fin, des jambes flatteuses et un air innocent et terriblement sexy. Vous êtes une véritable nymphe masculine. Je ne veux que vos caresses. Je ne veux que la danse de nos corps. Ne serait-ce que pour une fois.
— Mais enfin, tu... tu es mineur ! Tu n'es qu'un gosse !
— Je le suis, mais cela ne m'empêche pas de vous désirer. D'autant plus que je fais preuve d'une maturité rare à mon âge.
— Je suis un vieux, comparé à toi ! Je suis sans intérêt ! Tu gâches tes années de jeunesse de cette façon ! Va t'amuser ! Sors en boîte, lis, construis ta vie ! Tu es beau, intelligent... tu pourras avoir n'importe quel autre garçon de ton âge ! Et puis... tu es au début de ton parcours ! J'en suis pratiquement à la fin ! Je suis un adulte, anciennement marié, j'ai une enfant, je...
— Crystal m'a avoué que vous l'aviez adopté par défaut, suite au décès de votre sœur, peu après celui de votre beau frère. Vous étiez son dernier responsable légal.
— Peu importe, je l'ai élevée la majorité de sa vie et l'aime comme ma propre fille, tout comme mon ex mari. Par conséquent, nous sommes ses parents de cœur, elle le dit elle-même ! Ce qui nous ramène à mon âge ! J'ai déjà fait la moitié de ma vie ! Pas toi !
— Peut-être mais, si vous cherchez un homme expérimenté, je suis le bon. sourit-il malicieusement. Je sais tout faire. Absolument tout. Je vois bien que vous êtes frustré. Je saurai vous satisfaire.
— Tho... Thomas, voyons... rougit-il.
— Je saurai vous combler, Newt. susurra-t-il.
— Ça... Ça restera monsieur Isaac pour toi ! Et... j'en ai suffisamment entendu ! À présent, je vais te demander de quitter cette maison ! Et je t'interdis de recontacter ma fille une nouvelle fois ! Si tu venais à retenter le coup, je toucherais deux mots à tes parents ! Crois-moi !
— Mais... »
Tandis que Newton le traînait par son sweat à capuche, il déverrouillait précipitamment la porte d'entrée. Lorsqu'il le jeta dehors, Thomas geignit : « Et... Et mon sac ! » Aussitôt dit, aussitôt fait : le blondinet balança ses affaires dans la nuit.
« C'est cadeau ! Maintenant, je vous prie de dégager de ma pelouse ! Mes salutations les plus distinguées !
— Newton, attendez --
— Monsieur Isaac, bon sang ! »
Une fois la porte refermée, l'adulte eut un soupir agacé. Il rejoignit Crystal sur leur canapé en silence, la scrutant avec une once de culpabilité. Le réveil sera difficile.