La fumée s'échappe de mes lèvres, je soupire de satisfaction. Ça fait putain de bien. J'observe le voile blanchâtre s'évaporer dans la nuit. Le vent et sa fraîcheur caressent mon corps pratiquement nu. Je suis accro à ces sensations. La porte vitrée glisse davantage. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir que Tommy est celui qui me rejoint. Lui aussi, n'a que son boxer. Il faut croire que mes mauvaises habitudes déteignent sur lui. Son regard ambré m'assène de reproches et ses doigts volent la cigarette coincée entre mes lèvres, l'écrasant dans le cendrier posé sur le rebord du balcon.
« Tu m'avais dit que tu avais arrêté. »
Je ne daigne pas à ancrer nos yeux.
« La prochaine fois. Promis. »
Sa main coule le long de mon dos. Je frissonne, évite son touché.
« J'adore tes cicatrices. Pas la peine de me les cacher. »
J'avais oublié que Tommy était devin. Il entend chacune de mes pensées. Quelle malédiction.
« Pas la peine de me mentir. reprends-je. »
Ses sourcils se froncent.
« Je ne te mens pas. »
J'ose enfin sceller nos regards.
« Les preuves de la violence que m'infligeait mon père ne peuvent pas être adorées, Tommy. »
Sa bouche embrasse mon cou.
« Les preuves de ton combat peuvent l'être, elles. susurre-t-il. »
Un rire jaune m'échappe.
« Quel combat, beau brun ? Ce ne sont que les témoignages de ma faiblesse. Rien de bien valorisant. »
Son expression est plus ferme.
« Décidément, tu es vraiment stupide. Premièrement, tu fumes. Stupide. Deuxièmement, tu sors à poil sur le balcon alors qu'il fait à peine trois degrés. Toujours stupide. Et troisièmement, la cerise sur le gâteau, tu n'es même pas fichu de différencier la faiblesse du combat. Stupide. »
Je me tourne vers lui, soudainement agacé.
« Si je suis si stupide, pourquoi tu continues de me supplier de coucher avec toi, hein ? Pourquoi tu persistes ? Je ne suis qu'un pauvre con, pathétique, dopé au tabac, couvert de marques et illettré. Je ne vaux rien et tu le sais. »
Les larmes me sont montées aux yeux. Une brise souffle dans la chevelure brune de Tommy. Je vois la noirceur de la nuit se refléter dans ses iris vacillantes.
« Je l'ai, ta précieuse réponse. Je veux t'apprendre à t'aimer et à être aimé. »
Mes sourcils se haussent.
« Parce que tu m'aimes, Tommy ?
— Tu penses n'être qu'un plan cul ?
— N'est-ce pas ce que je suis ?
— Si tu n'étais que ça, je ne perdrais pas mon temps à t'écouter, ni à me soucier de ta santé, ni à te consoler. Tout comme si je te trouvais laid, je n'embrasserais pas tes cicatrices une par une. Tu dois accepter le fait que tu me plaises.
— Je n'ai jamais plu à personne. Que ce soit à mon père, à ma mère, ou aux autres. Pourquoi je te plairai à toi ? »
Ses bras m'enlacent.
« Pourquoi pas. murmure-t-il. »
Je réponds à son étreinte, dubitatif. Il attrape ma main lorsque nous nous séparons.
« Rentre à l'intérieur. Tu vas attraper la mort. »
Il ne me laisse pas l'opportunité de répondre. Forcé, je regagne ma chambre à ses côtés. Mes draps sont encore défaits, mon matelas est encore chaud. Bercé par Thomas, je m'endors peu à peu contre sa peau.
« Aies confiance en moi, Newton. Laisse-moi une chance. Juste une chance. J'arriverai à te faire aimer l'amour. J'en fais le serrement. »
Mon estomac se tord. Il faut vraiment que je pense à arrêter la cigarette.