~Thirty-one

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-"Qu'est-ce qui te tracasse, Victoria ?"

Elisabeth leva à peine les yeux de son assiette tandis que Philip regardait la jeune fille assise en bout de table, jouant avec ses doigts.

-"Rien, grand-père." Elle se tut lorsqu'il tiqua. "Je suis simplement nostalgique."

-"De quoi ?" Demanda-t-il peu intéressée.

-"De Poudlard." Elle eut un sourire.

Elisabeth ne dit rien, étonnamment silencieuse.

-"De moi aussi, j'espère."

Il y eut un long silence, dans la salle à manger.

Ariana ne dit rien, ses yeux s'agrandissant à mesure que l'information remontait au cerveau.

Ce fut comme si soudain les nuages étaient partis. Les verres devenaient plus transparents, les couverts plus dorés, le lustre plus brillants. Les regards plus tendres.

Elle tourna la tête, lentement, comme de peur que tout ne se brise soudain.

Ce fut son sourire, en premier, qui la fit basculer.

Elle se tint à la table comme n'en revenant pas.

-"N'est-ce pas ?" Demanda de nouveau Anthony contre la porte, tout sourire.

C'était lui.

Le seul qui la ramenait un tant soit peu à tout ce monde qu'elle avait dû abandonner.

Lui qu'elle avait tant aimé et tant chéri des années durant comme la famille qui lui manquait et qui désormais était la famille qu'elle cherchait.

Et qui l'avait trouvé.

Elle se leva, sans rien dire tant les mots manquaient, les jambes flageollantes à force d'autant trembler.

-"Je le savais." Ironisa-t-il l'air sur de lui mais il fondit le premier dans ses bras, attrapant son visage, passant ses doigts dans ses cheveux.

Elle était le havre de paix qui lui avait tant manqué durant ces longues vacances d'été.

Elisabeth termina son repas, passant outre le manque de formalité du garçon qui ne les avait même pas regardé.

-"Je ne veux pas les voir." Murmura-t-elle à sa bonne près d'elle. "Interdisez-lui l'accès aux pièces autres que la chambre de la princesse et sa salle à manger privée."

-"Bien, Votre Majesté."

Elisabeth se leva, Philip la suivant, et sortit par une autre porte, sans expliquer son dégoût visible pour le garçon qu'elle n'avait jamais vu.

-"Tu es vraiment là ?"

Elle semblait espérer un oui. Espérer que tout n'était pas vain et qu'elle ne rêvait pas debout, les mains sur le piano, le regard vide.

-"Je me suis perdu." Avoua le garçon. "Je devais être là ce matin mais Londres est trop grand."

Elle eut un rire étouffée dans son épaule et il sourit, reniflant pour garder ses larmes au sec contre ses pupilles.

Tout irait mieux. Désormais qu'il était venu, tout irait mieux.

                            *****

-"Est-ce vrai ?"

Les yeux d'Ariana s'agrandirent tandis qu'elle gardait la main d'Anthony dans la sienne.

-"J'estime que tu es dans l'obligation, au vu de ton rang, de terminer tes études que ce soit à Oxford ou à Poudlard." Elisabeth se racla la gorge. "De toute façon, tu as des professeurs particuliers pour t'apprendre tout ce que tu dois savoir du monde moldue, pourquoi ne pas en avoir pour tout connaître du monde des sorciers ?"

-"J'ai le droit de terminer mes études ?" Demanda de nouveau Ariana.

Elisabeth tiqua.

-"A moins que tu ne me le demandes une troisième fois." Prévint elle et la jeune fille se tut.

-"Merci." Elle s'inclina vivement, se mordant la lèvre inférieure.

-"Ton ami ici présent est ma garantie. Sois sage et apprends bien, et sa famille sera récompensée. N'en fais qu'à ta tête comme les années précédentes -" elle désigna son dossier scolaire éparpillé sur la table. "- et sa famille en payera les frais."

Ariana fronça les sourcils, ne comprenant pas.

-"Vous utilisez la famille d'Anthony pour me menacer ?"

Sa grand-mère parut surprise, et se tourna vers Charles qui n'avait pipé mot, pot de fleur dans la salle de réunion.

-"Je ne te menace pas, Victoria." Dit-elle alors, blessée. "Je te préviens."

Anthony ne dit rien, fixant la femme parée de bijoux luxueux qu'il n'avait jusqu'alors jamais vu, ses cheveux relevés en un chignon serré à la mèche près tandis que sa mère se le faisait le matin avec un élastique vieux de plusieurs années.

Il n'était pas jaloux - simplement admiratif. De voir que deux personnes nés avec les mêmes ambitions et de la même façon, deux femmes nées sur la même Terre qui auraient pu être si similaires s'étaient retrouvées à être si différente.

-"Bien, si tu n'as plus de questions, vous pouvez tous deux disposer."

Ariana se leva et s'inclina en la remerciant chaleureusement, tirant Anthony qui fit de même.

-"Victoria." L'appela la Reine tandis qu'elle commençait à partir.

Ariana se retourna.

-"Je t'interdis formellement toute discussion avec un membre de la famille des Malfoy." Son regard se fit sombre. "Depuis l'allégeance de Lucius Malfoy au côté obscur de la magie, nous avons coupé nos liens avec cette famille."

-"Je ne comptais pas changer mes habitudes." Ariana plissa le nez, souriante, mais Elisabeth ne dit rien.

-"Dispose."

Elle hocha la tête et sortit, une domestique ouvrant la porte.

Anthony s'arrêta, tira sa main en arrière, l'air sérieux.

-"Tu rigoles, j'espère."

Ariana leva un sourcil.

-"De quoi tu parles ?" Demanda-t-elle.

-"De ça." Il désigna la pièce qu'ils venaient de quitter. "De tout ce qu'il s'est passé depuis que je suis arrivé. Dit-moi sérieusement : ici, tu es la princesse héritière ou la fille illégitime de Charles ?"

Ariana fit les gros yeux et lui donna un coup de pied dans le genou.

-"Ne parle pas comme ça ici." Elle gonfla la joue. "J'essaie juste d'être polie."

-"Polie ? Tu t'écrases comme un moustique sous ma semelle, tu t'inclines tellement que ton ego touche par terre."

-"Ferme-la, tu ne comprends pas." Elle roula des yeux. "Viens avec moi, je te montre ton lit."

Anthony ne dit rien de plus, se laissant conduire par la jeune femme.

Mais il n'était pas dupe, lui. Tous les regards des domestiques. Tous les murmures à son passage.

En temps normal il aurait pensé être le problème - il était souvent le problème, lui qui se laissait faire.

Ariana était toujours celle qui les faisait taire.

Mais là, c'était différent.

Là, les regards n'étaient pas pour lui, et c'était justement ça qui l'énervait.

Les regards étaient pour elle, mais elle ne le savait même pas, obnubilée par l'amour qu'elle attendait de ceux qui ne lui en donnaient pas.

|| 𝖒𝖊𝖒𝖔𝖗𝖎𝖊𝖘 || [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant