|| 𝖒𝖊𝖒𝖔𝖗𝖎𝖊𝖘 || [TERMINÉ]

~Forty-two

-"Je te laisse."

Ariana hocha la tête, le regarda partir avec un tendre sourire, regardant sa silhouette commencer à disparaitre.

-"Tony !" Hurla-t-elle et il se retourna pour la regarder lever haut la main et l'agiter dans tous les sens.

Il esquissa un sourire qu'il ne put réfréner, la regarda en penchant légèrement la tête avec un amour qu'il se surprit à avoir, et fit demi-tour avant de partir.

Le couloir vide, elle abaissa sa main, commença à repartir vers sa salle commune après la journée épuisante de cours.

-"Donne."

Elle grimaça, se tourna mais se rendit compte que Draco ne lui parlait pas, dehors dans le jardin avec ses amis.

Elle roula des yeux, étonnée d'avoir daigné s'arrêter en entendant sa voix, et recommença à marcher.

-"Tu aurais pu en manger ce midi, il y en avait plein pendant le repas. Tu n'as mangé qu'un peu de poulet." Blaise fit la moue. "J'ai pris ces tomates pour moi."

-"Ferme la." Soupira Draco et Ariana fronça les sourcils, se tourna légèrement pour le fixer entre deux poutres avaler les tomates rondes une par une. "Je ne voulais pas que quelqu'un me voie en manger."

Blaise fronça les sourcils, s'apprêta à demander plus d'explications mais Théo lui fit signe de se taire.

Draco continua de les gober, affalé sur un banc crème, au soleil.

Ariana le regarda faire, lui fixant le soleil, ses reflets sur les arbres, l'herbe fraîchement coupée, elle fixant ses yeux, ses lèvres, ses mains qui se baladaient dans le ciel.

-"Dit, Draco." Théo se racla la gorge. "Pansy est allée chez les Windsor. Tu ferais mieux de te remettre avec elle, si tu veux redorer le blason de ta famille."

Draco leva les yeux vers lui, l'air mauvais.

-"Quoi ?" Théo haussa les épaules. "Ou sinon, je peux tenter mon coup avec Ariana, comme ça elle fera ce que je veux et je lui demanderai d'aider ta famille."

Il lui fit un clin d'oeil, grand garçon au tendre cœur, mais Draco lui donna un coup de pied dans le ventre, allongé près de lui.

-"Ne t'avise pas d'y penser." Dit-il avant de laisser sa tête valdinguer contre le dossier du banc. "Si tu la touches, ça empirera la situation." Il le fixa. "Alors ne le fais pas. Compris ?"

Théo roula des yeux, hocha la tête, ne voulant après tout qu'aider.

Finalement, après un temps, les trois garçons partirent et Ariana reprit sa route, les sourcils froncés.

                                                                           *****

-"Hé, qu'est-ce que tu fiches ?"

Ariana leva la tête vers Anthony qui la fixait, assis en face d'elle sur l'herbe.

-"Rien." minauda-t-elle et il soupira longuement.

-"Chourave te cherche depuis des lustres, tu as oublié de lui rendre sa plante ou je-ne-sais-quoi."

Elle grimaça, se souvenant effectivement de lui avoir emprunté une plante pour l'étudier.

-"C'est à cause de ta famille ?"

Elle ne dit rien, garda la tête rivée sur le sol et les genoux du garçon apparurent dans son champ de vision, Anthony s'étant rapproché pour poser sa main sur son épaule. Lentement il fit basculer la jeune femme sur le dos et elle posa sa tête sur ses jambes, le regard fixé sur son visage au-dessus du sien. Il haussa un sourcil, visiblement agacé par cette enfant, mais continua tout de même ce qu'il faisait. Il huma, fredonna, lentement d'abord, la chansons que lui avait apprise son père, sa mère, sa famille, la chanson qu'on fredonnait pour l'endormir, petit, qu'Ariana adorait tant - il soupçonnait d'ailleurs que c'était la seule raison pour laquelle elle restait avec lui.

Elle ferma les yeux, sentit les muscles de son visage s'adoucir, lui chantonna, plus fort, sentit la mélodie serpenter autour de leurs corps fébriles, dans la dureté d'une fin d'hiver rude, se glisser jusque dans leurs pores, s'infiltrer jusque dans leurs cœurs.

Puis lorsqu'il la termina, lorsque les dernières notes restèrent en suspens dans l'air, Anthony baissa le regard vers Ariana qui semblait s'être endormie, et eut un léger sourire.

Oui, elle était pour lui la seule chose qui lui permettait d'alléger le lourd fardeau qui semblait peser sur son cœur.

Ariana ne s'était, en réalité, pas endormie. Elle vagabondait dans son âme, épuisée, cherchait un recoin à l'abri des regards, dans les tréfonds de ses décombres, de sa mémoire.

-"Victoria."

Elle chercha, qui l'appelait, qui elle entendait.

-"C'est un beau prénom, Victoria."

Oui, ça l'était. Etait-ce elle qui parlait ? La voix enfantine semblait provenir d'un lointain souvenir.

-"Ma mère dit que tu es encore plus puissante qu'elle, en magie."

Non, elle ne voulait pas voir ce souvenir. Elle en avait reconnu la voix, l'odeur, dans sa chambre, à Buckingham, près de celle de son frère qui dormait.

-"Ma mère dit que ça ne sert à rien d'être puissant." rétorqua la jeune fille sur son lit. "Mais qu'il faut être sage."

Le jeune enfant aux cheveux platines haussa les épaules, regarda les domestiques qui restaient dans la chambre comme des chaperons.

-"Alors, quand on sera adulte, je serais puissant, et tu seras sage. Comme ça, on se complétera."

-"Et pourquoi pas l'inverse ?" Victoria pencha la tête sur le coté. "Je serais puissante, et toi tu seras sage, Draco Malfoy."

La tête de Diana dépassa d'entre les portes menant à la chambre de William mais les deux enfants ne le virent pas.

-"Bien, Vict-" Draco s'arrêta, les yeux pleins d'étoiles. "Bien, Votre Altesse. N'oubliez pas de me prévenir lorsque vous serez grande. En attendant, je serais sage."

Victoria eut un rire, se leva, le congédia, le regarda partir.

Et sa mère sembla emplie d'un désarmement sans nom.

Ariana ouvrit les yeux, se releva soudain. Elle se tourna, regarda où elle se trouvait mais Anthony semblait l'avoir ramené dans sa salle commune. Il venait de faire nuit, le couvre-feu venait sans doute de sonner. Elle se leva du canapé, lentement mais soudain se stoppa, se recoucha immédiatement, venant d'entre des voix venant des escaliers du dortoir des garçons.

-"Tu comprends ce que je te dis ?" La voix de Draco se fit plus forte tandis qu'il descendait les dernières marches.

Blaise huma, derrière lui.

-"Je veux toutes les informations possibles sur lui." répéta le garçon.

-"Je ne vois pas pourquoi tu t'intéresses à ce serdaigle." Blaise grinça des dents. "Il est petit et moche, en plus. Et il a un prénom d'oiseau."

-"Spartan." Draco insista bien en se retournant vers son ami. "N'oublie pas."

Blaise hocha de nouveau la tête, rouspéta, regarda Draco partir.

-"Tu vas encore t'entrainer ?" demanda le garçon et le blondinet hocha la tête. "Draco."

Ledit Draco tourna la tête, visiblement pressé. Blaise avança d'un pas, eut un léger sourire compatissant.

-"Ce n'est pas grave, si tu ne veux pas le faire." murmura-t-il et Ariana eut de la peine à l'entendre, les yeux dépassant du canapé au fond de la salle, les lumières verdâtres se reflétant, tanguant, sur les visages des deux garçons.

-"Je vais le faire." répondit aussitôt Draco et il partit, baguette en main.

 Et lorsque, quelques dizaines de secondes plus tard, Blaise remonta dans son dortoir, la jeune femme s'autorisa enfin à respirer, allongé sur le canapé, la main sur le cœur.

Quelque chose, et elle l'avait pressenti depuis longtemps, se passait.

Quelque chose de grave, et elle ne savait pas de quel coté Draco était.

Ni duquel elle devait être, elle.