Chapitre 36

20 4 0
                                    

Elle ne me laissa pas même le temps de répondre.
La courtisane, qui se nommait donc Ayume, continua :

-C'est la première fois que je vous vois. Dit-elle, vous vous faites assez discrète, il faut dire.

-Contrairement à votre mari qui ne passe pas inaperçu. Renchérit Akane.

Les deux pouffèrent de rire.
Moi, je n'étais vraiment pas à l'aise.
Le début de cette conversation, dont on ne m'avait pas laissé le choix d'y prendre part, ne me plaisait pas.
Malheureusement, je ne voulais me faire aucun ennemi. Mais devais-je réellement discuter aimablement avec elles, tandis que je n'en avais nullement l'envie ?
De toute façon, avais-je déjà eu le choix, depuis le début de ma mission ?

-C'est vrai que le contraste entre lui et vous est assez...choquant. Mais soit ! Ce n'est pas étonnant, je doute guère qu'il existe d'autres personnes comme les Hara. Continua la première.

Un contraste ?
N'avaient-elles que cela à faire que de s'intéresser à un couple d'adolescents ?
Elles étaient pleinement adultes, n'avaient-elles pas d'autres occupations ?

-Mais comment se fait-il que vous travaillez ? Poursuivit la seconde, le général ne vous donne-t-il aucun argent ?

Elles me regardèrent de manière insistante, je compris alors qu'elles attendaient une réelle réponse de ma part.
Mais, pour être honnête, je n'avais aucunement envie de partager ma vie avec de pures inconnues qui ne m'adressaient la parole seulement par intérêt.
Enfin bon, je n'avais pas le choix.
Il fallait que je me montre aimable.

-Eh bien, si. Répondis-je.

-À ce que je sache, votre époux est le plus riche courtisan de la cour. Pourquoi vous embêtez-vous à travailler ? Questionna Akane.

J'haussai les épaules.
Je voulais écourter cette conversation désagréable. De plus, Miwa m'attendait patiemment sur le côté, impuissante.

-Je le fais seulement dans le but d'aider, rien de plus. Dis-je.

Les deux esquissèrent de faux sourire.

-Oh, que c'est aimable.

-L'opposé de votre époux, je dirais même ! Pouffa Ayume.

N'avaient-elles que son nom à la bouche ?
Ryuu occupait-il l'entièreté de leurs idées et de leurs esprits ? C'était dérangeant.
Allaient-elles me comparer sans cesse avec lui ? Nous n'avions rien à voir.
Sur tous les points.

-Mais pourquoi avoir voulu être servante ? Reprit la première qui était à gauche, si vous n'étiez que dans le besoin d'aider, vous auriez seulement pu faire un don. Après-tout, vous ne manquez pas d'argent.

Je perdais patience petit à petit.
Pourquoi le leur dirais-je ?
En quoi était-ce important pour elles de le savoir ?

-Tout simplement parce que les servantes sont adorables, et de bonnes amies. Voilà tout. Répondis-je.

Ayume fit une fausse mine attristée tandis qu'Akane tourna la tête pour cacher un petit rire.

-Vous vouliez des amis ? J'imagine que la solitude vous pèse, en effet. L'absence de votre mari doit se faire sentir. Mais à la place de ces servantes de bas rangs, vous pourriez être amie avec nous ! S'exclama Ayume.

Celle de gauche hocha la tête.

-Nous ferions un tas de choses ! Assura-t-elle.

Non merci.
Je ne voulais pas d'elles.
Premièrement car elles ne m'étaient d'aucune utilité dans ma récolte d'informations, elles seraient bien plus aptes à m'en donner des fausses. Et deuxièmement, car elles n'étaient pas ce que j'appelais "ami". Miwa, Yoko, Chinatsu, Atsuko, elles, elles étaient de vrais soutiens émotionnels et me permettaient d'oublier ma lourde conscience.
Ces courtisanes ne feraient qu'empirer les choses.
Mais que pouvais-je bien leur répondre ? Je voulais me montrer aimable, mais je ne voulais pas passer plus de temps en leur compagnie.

La nuit où je te tueraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant