Chapitre 72

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Tous avaient quitté la salle.
Les courtisans, les soldats et les domestiques étaient sortis, nous laissant seuls dans cette immense pièce.
L'empereur.
Sa femme.
Aïko.
Yukio.
Hiro.
Ryuu.
Et moi.
L'ambiance n'avait pas changé, elle était même encore plus lourde qu'auparavant, maintenant qu'il n'y avait personne d'autre que nous.
L'empereur et l'impératrice étaient descendus de leurs trônes, or la femme s'était rapprochée d'Hiro et moi, les larmes aux yeux.
Peut-être cherchait-elle du réconfort ?
Ce jour était très difficile pour elle, et je pouvais le comprendre.
Elle qui m'avait fait part de ses regrets concernant l'enrôlement de Ryuu, son chagrin était amplement justifié.
Surtout que ce discours avait été-.
Frustrant.
Un discours si odieux et rabaissant, déguisé en éloges n'avait qu'attisé ma haine envers l'homme d'état.
D'ailleurs, j'évitais de le croiser du regard.
Je ne tenais pas à voir un homme si répugnant.
Ryuu s'était relevé, mais celui-ci restait silencieux.
Il ne disait pas un seul mot, et semblait être l'ombre de lui-même.
Je ne savais si il était réellement satisfait de sa décision, mais aucune émotion ne traversait son visage.
Comme à son habitude lorsqu'il travaillait, au final.
Or, puisque nous étions à présent seuls, ma belle-mère en profita pour s'approcher de son fils. Elle posa sa main sur son épaule avant de le regarder d'une manière à lui faire comprendre que le comportement qu'il avait eu plus tôt ne lui avait pas plût.

-J'espère que tu as de bonnes excuses, Ryuu. Dit-elle d'une voix froide.

Le ton qu'elle employait était inhabituel venant d'elle.
En tout cas, ce n'était pas celui que j'entendais le plus souvent.
De plus, il fallait ajouter à cela le regard qu'elle lui lançait.
Il était terriblement noir.
Peut-être était-ce du à la cérémonie ? Était-elle plus tendue ?
Ryuu ne répondit pas, il ne daigna pas même la regarder.
Alors, celle-ci se plaça devant lui pour forcer un contact visuel.
Ainsi fait, les deux s'observèrent, d'abord sans un mot.

-Tu aurais au moins pu faire l'effort de t'habiller convenablement. Reprit-elle.

L'intéressé, lui, ne répondit pas.
Il resta muet face à sa mère.
Après de longues secondes de silence, la jeune femme finit par poser la main sur le front de son fils. Ils ne bougèrent pas, mais un léger sourire s'immisça sur les lèvres d'Aïko.
Un sourire que je ne sus interpréter.
Puis, elle fit glisser sa main en arrière afin de relever les cheveux de Ryuu. Or, elle ne le lâcha pas par la suite. Au contraire, ses doigts se resserrèrent.

-Impressionne-moi.

Son visage s'était attendri, ce qui me déconcertai.
Je n'arrivais pas à comprendre ce qu'elle ressentait.
Était-elle en colère ?
Ou alors l'empathie avait-elle pris le dessus après avoir touché le front de son fils ?
D'ailleurs, ce contact ne me rassurait pas.
Et je ne voulais pas y penser. Pas dans un moment où je ne pourrais rien.
Or, je n'eus le temps de chercher davantage. Yukio vint s'interposer entre les deux afin de mettre un terme à ce début de conversation plus que douteux.

-Allons, calmez-vous. C'est un merveilleux jour, il faut le célébrer. Rappela-t-il.

"Un merveilleux jour"
Oui, à ses yeux.
À leurs yeux.
Pour nous, pour moi, il n'y avait rien à fêter.
Je ne supportais pas l'empereur, et je ne voulais pas soutenir de tels actes.
D'ailleurs, il semblerait que je ne sois pas la seule à abhorrer cela.
En tournant la tête vers Hiro, je m'aperçu que ses mains tremblaient derrière son dos, et ce de manière plus incontrôlée qu'avant la cérémonie.
Cette fois, il ne semblait pas parvenir à retrouver son calme.
Et peut-être était-ce du au discours, mais aussi à la présence de Ryuu devant nous.
Cela complexifiait tout.
De plus, puisque nous n'étions pas seuls, Hiro ne pouvait prendre le risque de montrer une quelconque faiblesse.
Je voulais l'aider, mais comment ?
De quelle manière pouvais-je bien calmer cette anxiété ?
Heureusement, l'impératrice, se trouvant à nos côtés, ne tarda pas à le remarquer à son tour.
Celle-ci, étant sûrement au courant de la raison pour laquelle Hiro se trouvait dans un tel état, passa derrière nous.
Puis, arrivée à la hauteur du soldat, elle posa discrètement sa main sur son poignet. Elle vint ensuite se positionner à côté de lui, prenant garde à ce que personne ne puisse voir leur contact.

La nuit où je te tueraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant