Chapitre 62

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Ryuu m'avait raccompagné jusqu'à l'entrée de l'habitation que nous partagions.
Après avoir traversé la cour déneigée sans échanger un seul mot, nous venions tout juste d'arriver devant la porte d'entrée.
J'étais dos à lui, le cœur palpitant.
Alors ça y est ?
Nous étions tous les deux ?
Seuls une nouvelle fois ?
Cette retrouvaille que j'avais désespérément attendu était arrivée ?
Un frisson me traversa, témoignant d'une certaine excitation à l'idée d'enfin pouvoir lui parler librement.
Je serrai mes mains, anxieuse, et me retournai finalement vers lui.
Et immédiatement, mon bonheur s'évanouit car un détail important me sauta aux yeux.
Ryuu était légèrement essoufflé.
Or, je l'avais vu courir longuement sans s'arrêter et pourtant ne pas en être épuisé.
Nous n'avions couru que quelques minutes jusqu'à atteindre notre maison, alors comment se faisait-il qu'il-.
"Il se meurt"
Je virai instantanément cette pensée de mon esprit, ce ne pouvait être vrai.
Et heureusement, ou malheureusement, je fus de nouveau perturbée par sa seule présence.
Je levai la tête vers lui et croisai de nouveau son regard. Celui-ci me sourit alors.

-Ça fait longtemps. Dit-il.

Je ne répondis pas.
À vrai dire, j'étais comme...
Subjuguée par le fait d'entendre réellement sa voix près de moi.
Ses mots pour moi.
Il était là, à ne serait-ce un peu plus d'un mètre, après une si longue absence.
Je pris alors le temps de l'observer.
Ses yeux.
Ses cheveux.
Son visage.
Son sourire qui ne partait pas.
Je ne ressentais plus aucun gouffre en moi, ce qui voulait dire que au plus grand désespoir de mon père, j'accordais plus d'importance à Ryuu que je ne le devrais.
Celui-ci haussa un sourcil.

-Qu'est-ce qu'il y a ? Questionna-t-il.

Je me rendis compte que j'étais restée silencieuse à le fixer sans aucune explication, alors je baissai la tête, un tant soit peu embarrassée.

-C'est vrai, ça fait longtemps. Où étais-tu ? Voulus-je savoir.

Je m'étais posée cette question inlassablement durant tous ces mois.
Il avait été le centre de mes pensées.
Et il l'était encore.

-Je me suis beaucoup entraîné, et l'empereur avait besoin de moi très souvent aussi. Répondit-il.

-Cela devrait suffire pour expliquer une telle absence ?.. maugréai-je à voix basse.

Rien ne devrait justifier cela.
Il n'avait même pas pu rentrer chez lui, et j'imaginais que la règle tenant à nous éloigner ne résultait pas seulement de ces raisons.
Il y avait sûrement une autre explication, mais que l'on refusait de me donner.
Cela me faisait enrager.
Or, je le vis légèrement se pencher vers moi, tandis qu'il avait plongé ses mains dans ses poches.

-Qu'est-ce que t'as dit ? Demanda mon mari.

Je relevai la tête et me retrouvai face à lui.
Je me figeai, des frissons me parcourant l'entièreté du corps et le cœur battant, une envie de me rapprocher me tiraillant terriblement.
Mais heureusement, je me ressaisis rapidement et fis un pas en arrière.
Or, mes joues rouges me trahissaient sûrement.
Je vis Ryuu esquisser un sourire avant de se redresser.

-N'as-tu pas froid ? Questionnai-je afin de changer de sujet.

Il semblerait que son talent de modifier le sujet de conversation avait légèrement déteint sur moi.
Or, je tenais à sortir de cette situation embarrassante en disant la première chose futile qui m'étais passée par la tête.
Il faisait vraiment froid, il ne neigeait pas actuellement mais ça ne saurait tarder.

-Non, t'en fais pas.

-Ta chemise m'a l'air quand même plutôt légère.

Celui-ci écarta légèrement les bras en souriant de plus belle.

La nuit où je te tueraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant