Chapitre 56

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Je m'étais assise sur des marches à l'arrière du palais, dans un endroit sans gardes ni servantes.
J'avais ramené mes jambes contre ma poitrine, mes bras les entourant et le mot de Ryuu serré dans ma main.
Je me sentais si sale.
Leurs mots, qui ne devraient pas m'atteindre, m'avaient blessé et entaché mon estime envers moi-même.
J'étais d'accord, je ne méritais pas d'être là, mais étais-je si horrible à voir que cela ?..
Étais-je si indigne d'être l'épouse de Ryuu ?..
Et ne voyaient-ils que l'apparence ?!
Oui, bien sûr que oui, or il y avait tellement plus !
Je n'étais pas imbue, au contraire je me considérais toujours inférieure à eux. Je n'étais pas avare, je n'utilisais jamais l'argent de mon mari. Je n'étais pas répugnante, ou dégoûtante...
Pourquoi pensaient-ils tous de telles choses ?.. Ne voyaient-ils pas que cela était blessant ?..
Et comme ils aimaient tant le dire, je n'étais qu'une adolescente, alors comment pouvaient-ils se permettre de tenir des propos aussi...
Aussi...
Et puis, leur manière de voir Ryuu n'était pas mieux.
Se servir de moi seulement pour se satisfaire ?... N'avaient-ils pas d'autres choses à penser ?! Surtout que cela était complement faux et impensable de sa part.
Nous ne nous étions jamais tenu la main, alors ce genre de choses ne risquait pas d'arriver.
Et si seulement il n'y avait que cela ! Ils ne voyaient que son argent, son rang et son physique.
Mais il était tellement plus...
Moi aussi, je ne me réduisais pas qu'à mon apparence.
Pourtant...même si j'avais conscience que leur propos émanaient de jalousie pure et de haine, je me sentais mal.
Je regardai l'écriture de Ryuu, recherchant du réconfort dans l'une des seules choses que j'avais de lui, mais non.
J'avais besoin de sa présence.
De lui, et non pas d'un simple mot.
"Reste, aide et veille sur Ume ce soir", et ces personnes sans scrupules et sans remords le considéraient comme un homme ne pensant qu'aux plaisirs, et pour beaucoup comme un homme détestable.
Je serrai le papier, les larmes envahissant mes yeux.
J'étais misérable.
Misérable...
Je n'étais pas capable de soutenir autant de reproches, or mon père les aurait affronté sans broncher.
Il serait resté, la tête haute, renvoyant de la prestance et de la dignité.
Moi...
Moi, je n'avais pas su les affronter, j'avais fuit, leur donnant raison de me trouver si faible et si peu considérable.
Mais je n'avais pas été préparé à cela...
Si Ryuu avait été là, aucun d'eux n'auraient osé prononcer des paroles aussi dégradantes, ni même de nous regarder de travers ! Sa seule présence suffisait à les dissuader de se montrer ignobles et sans vergogne.
Mais ici, maintenant, il n'était pas là et j'étais seule.
Toute seule pour porter son nom que je n'avais su honorer en restant forte face à cette haine, que lui affrontait tous les jours depuis des années, sans pour autant en être affecté.
J'étais tellement, tellement incapable et faible...
Une larme finit par s'échapper de mon œil pour rouler sur ma joue tandis que je fixais l'encre sur le papier.
Et voilà, à présent je pleurais pour si peu.
Mon père serait déçu, et il aurait raison. Moi-même, j'étais déçue.
J'étais déçue de voir à quel point j'étais...
Inutile et impuissante...
J'essayai de toutes mes forces d'éviter qu'une autre larme ne tombe, pourtant une deuxième vint se faufiler sur ma joue.
Je serrai les dents, enragée.
Pourquoi ne pouvais-je pas faire quelque chose correctement ?!
Pourquoi ne pouvais-je pas être digne comme mon père ou comme Ryuu ?!
Pourquoi ?..

-Il serait préférable que vous soyez dans un endroit surveillé, dame Hara. Coupa une voix que je reconnus.

Je me redressai subitement en essuyant mes joues humides ainsi qu'en ravalant l'eau qui avaient envahi mes yeux.
Je ne voulais pas que quelqu'un d'autre me voit dans ce piteux état.
Je tournai la tête vers Hiro qui se tenait debout sur les marches, un peu plus en hauteur.

-Mais maintenant que je suis là, vous pouvez demeurer ici le temps que vous voulez. Reprit le soldat en allant s'asseoir sur la même marche, à quelques mètres de distance.

La nuit où je te tueraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant