Chapitre 61

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Nous y étions.
Le banquet avait commencé depuis maintenant environ une heure, et je me tenais là, sur le côté, en tant que servante.
En face de moi se trouvait la table horizontale à laquelle étaient installés l'empereur, l'impératrice et deux invités, dont celui que j'avais déjà vu.
L'étranger que j'avais aperçu plus tôt n'était en réalité pas le seul convive, avec lui se trouvait cinq autres hommes, les quatre derniers se trouvant sur le début des deux tables verticales. Le reste était ensuite occupé par des courtisans.
Et bien sûr, puisque l'homme d'état était présent, Ryuu l'était tout autant.
Celui-ci se trouvait pile en face de moi, de l'autre côté.
Nous n'avions échangé aucun regard depuis le début.
Pour ma part, j'avais conscience que j'avais plus à gagner à passer outre de sa présence ce soir que de n'avoir d'attention que pour lui.
Plus que quelques heures.
Il fallait que je ne tienne que quelques heures.
Or, depuis le début de la soirée, afin d'éviter de poser les yeux sur mon mari, j'avais parcouru du regard les différents invités, et quelle fut ma surprise en reconnaissant d'eux d'entre eux.
Akane et Ayume.
Pour être honnête, je n'avais pas été réjouie de les voir assises à ces tables, surtout maintenant que j'avais connaissance des certains intérêts d'Ayume envers mon mari.
Elle aurait voulu l'épouser.
Dommage, c'était moi qui y avait eu droit.
Pourtant, ma présence ne semblait pas la déranger car depuis le début, elle dévorait Ryuu du regard sans aucune honte.
Et cela me déplaisait énormément.
Je ne saurais dire pourquoi, mais de toute manière j'y étais impuissante.
Tous les courtisans présents, contrairement aux étrangers, avaient conscience de mon mariage avec Ryuu, et leur regard en me voyant présente en tant que servante avait témoigné de leur surprise, mais aussi de leur frustration à ne pas pouvoir s'incliner devant moi.
Ils avaient rapidement compris que non, il ne fallait ni rien dire, ni rien laisser paraître.
Je n'étais qu'une simple domestique.
Rien de plus.
Ormis les habitants de la cour, j'avais également scruté l'impératrice. Je m'étais rappelée de la dispute qu'elle avait eu avec Ryuu, quelques mois plus tôt, or je n'avais eu aucune nouvelle.
Je ne savais pas si leur relation s'était arrangée ou non, mais j'avais remarqué que celle-ci ne lui avait adressé aucun regard dès lors qu'elle était entrée dans la pièce.
J'imaginais que la situation était toujours tendue entre eux, même si les sourires de la femme cachaient sa peine que j'avais pu apercevoir lors de sa dernière conversation avec Ryuu.

-Majesté, vous ne nous avez pas dit quel âge à ce petit jeune. Remarqua un invité.

L'homme qui venait de prendre la parole et d'interrompre leur discussion politique avait de grands yeux. Ses cheveux châtains étaient longs, ils lui tombaient sur les épaules et il dégageait une aura plutôt charmeuse.
L'empereur, qui avait détourné le regard vers lui, émit un petit rire gêné.

-J'imagine que vous parlez de mon garde personnel, n'est-ce pas ? Il n'a pas encore la majorité. Répondit-il vaguement.

Je me retins de froncer les sourcils pour montrer une quelconque once d'incompréhension de ma part.
Pourquoi ne disait-il pas directement l'âge de Ryuu ?
Tenait-il à garder cela secret ?
Je ne comprenais pas bien, était-ce à cause du fait que cela faisait beaucoup polémique ?
L'étranger plaça sa main décorée de grosses bagues sous son menton, dirigeant un regard intéressé vers mon mari.
Je me fis rage pour ne pas lever les yeux vers lui.
J'éviterai plus facilement les erreurs si je ne le regardais pas.

-Pourtant il a une certaine carrure. Pour un mineur, je trouve cela impressionnant. Remarqua-t-il.

-Il en impose, c'est sûr ! Compléta un autre.

Celui qui avait continué avait des yeux plus fins, on ne les voyait presque pas. Il avait des cheveux longs noirs et des tâches de rousseur surmontaient ses joues. De plus, cet homme semblait être le plus à l'aise de tous. Son bras reposait sur le dossier de sa chaise, malgré le fait qu'il partageait la table avec l'empereur et l'impératrice du Japon.
Je ne savais pas si je devais trouver cela mal élevé, arrogant ou courageux.
Peut-être les trois, vous me direz.

La nuit où je te tueraiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant