~Sixty-three

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Oui, il y avait des moments où je ne ressentais rien d'autre que toi, et le nous que tu me faisais aimer.

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-"Où est-ce que tu m'emmènes ?"

Isabel leva un sourcil mais Draco resta silencieux, sur une rue de plus en plus sombre.

Elle eut un battement lourd, au coeur, comme de mauvais souvenirs qui semblaient revenir, ses veines se rétrécirent.

Elle marcha plus vite et mis ses mains dans ses poches, se racla la gorge en restant près du garçon qui avançait.

-"Là." Il désigna un petit coin où était entreposé un balai ancien avec de la paille enroulé autour d'un bout de bois.

Isabel leva un sourcil, le regarda sans comprendre. Il attrapa le balai, ne l'utilisa pas pour déblayer le sol sale : il l'enfourcha entre ses jambes et elle eut un rire en le voyant faire.

-"Monte." Dit-il alors.

Elle refusa, grimaça.

-"Ne me dis pas que vous volez vraiment sur des balais ?"

Il ne répondit pas et elle en conclut que si. Elle s'avança, septique.
Il attrapa sa main, baissa le balai pour qu'elle le mette entre ses jambes. Puis, comme mué d'un instinct, il se mit à se lever, et elle le sentit remonter le long de ses jambes avant de la soulever lentement dans les airs. Elle s'accrocha instinctivement à Draco et il décolla finalement.

Elle ferma les yeux, très fort, sentit le vent sur son visage.

-"Regarde." Lui dit-il alors.

Elle n'osa pas, au début. Elle continua de le tenir et il posa une main sur les siennes pour lui intimer de l'écouter. Elle prit une respiration, en ouvrit un, aperçut le dos de Draco collé à son front. Ouvrit le deuxième, s'écarta quelque peu.

Il y eut un silence, dans le ciel et dans son esprit.

Ce fut comme si soudain la mer agitée avait cessé de s'échouer sur le sable chaud, comme si le soleil s'était mis à briller plus fort dans son cœur, s'était mis à brûler sans pour autant blesser, une tendre chaleur silencieuse qui envahissait son âme.

Le coucher de soleil rosait l'horizon, et elle avait presque l'impression de pouvoir le toucher de ses petits doigts.

Elle regarda les maisons, en contrebas, se crispa en ne voyant que des points, tout en bas, dans le monde des moldus.

Tout s'était arrêté. Le temps, le vent, la vie.

Les nuages autour d'elle n'avait pas la tendresse des flocons de neige mais la douceur du vent de printemps, comme si tout jusqu'alors n'avait été que dureté et froideur.

Elle y était, dans l'endroit calme, le paradis, le havre de paix qu'elle avait cherché.

Elle n'était nulle part mais se sentait partout, à une place qu'elle n'aurait pas dû avoir.

Draco tourna la tête, sentit son coeur se réchauffer en voyant ses yeux si grands, si pétillants comme une enfant découvrant le monde bien plus grand que simplement le coin de sa chambre.

-"Vous pouvez voir ça tout le temps." Murmura-t-elle comme se parlant à elle-même, n'attendant pas de réponse.

Elle volait. C'était bien plus différent que tout ce que ça pouvait signifier. Elle volait.

Elle se tenait au-dessus des autres, dans les airs, pouvait toucher les nuages, sentir le vent glacé sur sa peau mais n'en ressentait pas le froid.

La langoureuse vue semblait se mouvoir tendrement sur la ligne qu'elle apercevait, trop loin, bien trop loin pour qu'elle ne puisse jamais espérer la toucher, en face d'elle, ligne qui séparait son monde du monde du ciel, du monde du-dessus.

Elle se trouvait entre les deux, dans la passerelle, là où discutait les dieux et les mortels.

C'était exactement là que ce situait ceux comme Draco. Entre les mortels et les dieux.

-"Je t'en montrerai plus." Promit Draco en la coupant de son émerveillement. "Mais pas aujourd'hui."

Il commença à redescendre, la ramenant au monde auquel elle appartenait, et elle n'eut même pas le temps de toucher les nuages, de leur dire au revoir, les regarda s'éloigner jusqu'à ce que les immeubles cachent l'horizon et la fine ligne rosé du ciel qui se couchait.

Elle posa pied à terre, le coeur lourd, l'esprit frais.

-"Je te ramène chez toi." Draco reposa le balai à l'endroit où il l'avait prit.

-"Pourquoi est-ce-que tu as fais ça ?" Elle attrapa son bras tandis qu'il repartait. "Me montrer ça, tout à coup."

Il ne répondit pas, traversa.

-"Pour que tu continues de m'aimer." Dit-il alors en l'arrêtant avant qu'elle ne se fasse écraser par un vélo.

Elle leva un sourcil, ne comprit pas, ne posa pas plus de questions, sachant que ça ne servirait à rien.

Il la ramena devant chez elle et elle eut un sourire, attrapa sa veste pour le tirer et l'embrasser.

-"Merci. C'était très beau."

Il ne répondit pas, fixa ses yeux, ses étincelles dans les coins, son nez rougis par le froid, ses lèvres un peu gercées, ses plaques rouges sur le front.

Il leva la tête, posa ses lèvres sur son front.

Puis fit demi-tour, repartit.

Elle le regarda s'éloigner, sentant que quelque chose manquait, ne pouvant mettre le doigt sur quoi.

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-"Il est quoi ?"

Isabel sentit sa main se crisper.

-"Parti." Répéta Henri en lui souriant tristement. "Il avait des affaires importantes en dehors de Londres, il revient à la fin de la semaine."

-"Quand est-ce qu'il est parti ?"

Il sembla réfléchir.

-"Hier soir, je crois."

Elle eut un léger rire, regarda autour d'elle pour vérifier qu'elle ne rêvait pas.

C'était pour ça, alors. N'aurait-il pas pu simplement la prévenir ?
Non, bien évidemment. Draco devait toujours apparaître et disparaître sans prévenir, parce qu'il ne se souciait guère de savoir ce que pensait les autres.

C'était ainsi, c'était lui.

Elle détourna le regard, contracta la mâchoire.

Eut un soupir, sentit ses paupières se mettre à trembler.

Non, décidément, son coeur ne se serrait jamais plus que lorsque c'était à propos de lui.

𝕯𝖎𝖆𝖇𝖔𝖑𝖔 𝖒𝖊𝖓𝖙𝖍𝖊 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant