Notre piano était déjà désaccordé, bien avant que l'on commence à y jouer.
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Elle se retrouvait seule. Elle qui avait tant essayé de rester accrochée à eux se retrouvait seule.
Draco était partit au ministère pour une affaire urgente dans sa famille, Barbara était sans doute avec Henri, son père ne répondait pas au téléphone.
Elle n'avait personne d'autres à qui se rattacher, et elle dérivait, seule dans l'immensité de l'océan, sans rien pour la sauver d'une noyade qu'elle-même s'aimait à imaginer.
Elle avait beau dire qu'elle s'était relevé, forte qu'elle était, un rien arrivait à l'ébranler. Elle n'était plus la jeune Isabel qu'ils avaient aimé, mais une ombre, et c'était cette ombre à qui l'on demandait de survivre, de subsister même dans le noir complet.
Elle regarda ses cartons, à demi faits, se demandant si c'était la bonne décision à prendre.
Les images revenaient, lorsqu'elle dormait seule et Draco le savait, l'avait bien vu s'accrocher désespérément à son oreiller pour ne pas chuter, encore et encore, dans la grande tour qui l'avait engloutie.
Avec véhémence elle crapahutait entre les meubles et les pièces, cherchant peut-être ceux qui en avaient réchappés comme elle, physiquement, mais dont l'âme y restait coincée entre deux pans de murs tranchants.
Son téléphone sonna ; elle se tourna, comme sortit d'un rêve bien trop réel, et s'y avança, l'attrapant de ses mains faibles.
-"Allo ?" demanda-t-elle en espérant entendre la voix de Draco.
Il y eut du grabuge, à l'autre bout du fil, et les grésillements la firent grimacer.
Elle fut tenter de raccrocher, alors que personne ne semblait prêt à parler.
-"Isabel." entendit-elle souffler au loin.
Elle fronça les sourcils, rapprocha le téléphone fixe de son oreille.
-"Barb' ?" demanda-t-elle pour être certaine.
Nouveau grésillements et cette fois elle l'entendit bouger.
-"Isa'." murmura Barbara à l'autre bout du fil, la voix tremblante. "Il faut que tu viennes me chercher."
-"Qu'est-ce qu'il se passe ?" s'alarma Isabel sans rien comprendre. "Tu n'es pas avec Henri ?"
Barbara fit des bruits étranges, la ligne sembla se couper plusieurs fois avant qu'Isabel n'entende finalement plusieurs autres voix qui passaient avant de disparaitre.
-"Viens me sauver." répéta Barbara et Isabel entendit le désespoir pathétique dans sa voix. "Isa' viens me sau-"
La ligne se coupa immédiatement. Isabel regarda son téléphone, continua d'appeler son amie sans résultat.
Elle fixa la ligne quelques secondes, avant de composer le numéro du bar d'Henri, qui sonna une fois, puis deux, puis trois.
-"Allo ?"
Elle sentit son cœur se serrer.
-"Tu n'es pas avec Barbara ?" demanda-t-elle pressée et Henri eut un silence.
-"On a reporté le rendez-vous à demain. Pourquoi ? Elle est là ?"
Il entendit Isabel se murmurer à elle-même des choses inavouables.
-"Je crois qu'elle est en danger." entendit-il grésiller.
Immédiatement elle l'entendit bouger, gigoter, parler aux habitués du bar qui semblèrent comprendre.
-"J'arrive." dit-il et il raccrocha, la laissant de nouveau dans le silence bruyant de son appartement vide.
Elle reposa la téléphone lentement sur son socle, fixant le vide sans savoir ce qu'elle tentait si piteusement d'y déceler.
Elle sentit sa lèvre inférieure se mettre à trembler et la coinça sous celle du dessus, tentant de garder contenance.
-"Allo ?"
Elle ne répondit pas immédiatement au numéro qu'elle venait de composer.
-"Isabel ?"
Le silence se fit maitre à l'autre bout de l'appareil et elle entendit Draco souffler.
-"J'arrive." dit-il alors et il raccrocha.
*****
-"J'ai réussit à tracer son téléphone."
Henri regarda sa baguette se mettre à vibrer.
-"J'ai demandé à Harry d'envoyer certains renforts." Draco serra le bras d'Isabel. "Donc reste ici, on y va seuls."
-"C'est ma meilleure amie." se défendit Isabel.
-"Et tu comptes faire quoi ?" Draco leva un sourcil. "Leur lancer des pierres ? Tu es une moldue."
Oui, elle avait cru le comprendre depuis déjà pas mal de temps.
Elle leva les yeux vers l'entrepôt abandonné en bordure de ville.
-"Ils arriveront bientôt, tes renforts?" demanda-t-elle et Draco ne répondit pas, parce qu'il ne savait pas.
Il avança, la main d'Isabel refusant de le lâcher jusqu'à ce que finalement leurs mains ne se délient et qu'ils y entrent.
C'était de sa faute. Elle n'aurait pas du entrainer Barbara là-dedans, aurait du la laisser hors de tout ça. Lui cacher la vérité n'avait pas suffit à la protéger.
Elle alla s'asseoir sur une grosse pierre, attendit, les mains sur les jambes comme une enfant. Ils allaient la récupérer, elle avait confiance en eux.
-"Isabel !" entendit-elle hurler.
Elle tourna la tête vers sa provenance, à l'opposé de l'entrepôt où ils étaient.
-"Barbara." murmura-t-elle et elle se releva immédiatement.
Elle aurait du courir chercher les garçons, elle le savait. Seule, elle ne pouvait rien faire.
Mais ce fut plus fort qu'elle : les moldus étaient stupides, elle n'y pouvait rien.
Elle avança vers le cri, entre les champs de blé, puis le cœur battant se mit à courir, se ruer vers celle qu'elle allait tout faire pour sauver parce que c'était la seule qui lui restait encore dans ces tourments.
-"Mint !" entendit-elle hurler de toutes ses forces et elle s'arrêta au milieu du champs de mais, se tourna vers l'entrepôt d'où elle venait.
-"Papa."
Sa voix, quelque part, se serra, se brisa.
Elle tourna la tête des deux cotés, coincée, ne sachant que faire. Elle ne comprenait que trop bien ce qu'il se passait, comme si tous ses choix avaient conduits à cet unique instant dans lequel on la déchirait de la pire des manières.
Draco et Henri était dans l'entrepôt. Ils allaient le sauver, elle le savait, elle l'espérait. Mais qui était près de Barbara ? Personne ne venait la sauver, elle.
Alors elle se devait de le faire.
Oui, c'était sans doute le meilleur choix. Elle n'avait pas à choisir, juste à réfléchir.
Ils avaient perdu. Ils allaient perdre, ceux qui l'avaient pensé à terre.
Elle finissait toujours par se relever.
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𝕯𝖎𝖆𝖇𝖔𝖑𝖔 𝖒𝖊𝖓𝖙𝖍𝖊 [TERMINÉ]
FanficLa guerre, destructrice, laisse derrière elle un goût amer de vengeance inachevée. Et si pour certains la victoire se fête, d'autres préfèrent se terrer pour ne pas montrer l'humiliation que la défaite leur avait causé. Un petit bar, entre Élise et...