~Seventy

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Aujourd'hui, je t'aime plus qu'hier, mais moins que demain.

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-"Je ne parlais pas de ça, quand je disais que ce serait bien de voyager en-dehors de Londres."

Draco la regarda grimacer, sur le cheval près de lui. Elle était assez bonne cavalière, c'était étonnant, il en était presque agréablement surpris. Elle avait le dos droit, ses hanches se relevaient à l'exact moment pour que leur danse soit fluide et harmonieuse, le cheval droit sur ses appuis, elle fière sur sa monture.

Elle croisa son regard tandis qu'il paraissait dans son élément, sur une jument.

-"Qu'est-ce que tu regardes ?" elle leva un sourcil. "Moi ?"

Il claqua sa langue contre son palais.

-"Décale-toi, je n'arrive pas à bien admirer l'horizon."

Elle eut un rire et il sentit ses épaules s'affaisser.

-"On est bientôt arriver." promit le garçon.

Comme semblant se souvenir de leur destination, elle se tendit, fixa le vide devant eux tandis que le chemin devenait sinueux.

Il n'arrivait pas à se l'avouer, mais les seuls moments qui lui permettaient de se reposer étaient avec elle.

Il se retrouvait, lui, l'adolescent tout jeune adulte qu'il aurait du être, et oubliait un instant l'homme qu'on avait fait grandir trop vite pour une guerre sans merci.

-"Tu es sur que c'est la bonne direction ?" Elle sembla douter. "On semble se rapprocher de rien du tout, là. Avoue que tu t'es perdu dans la cambrousse, le malfrat."

Et ça revenait. Étrangement, il ne releva pas le surnom qu'elle affectionnait, détailla les alentours, désigna un arbre au loin, tout maigre, tout recroquevillé sur lui-même comme si le temps en avait fait son jouet préféré.

-"On entre par là." confia-t-il.

Il allait lui faire découvrir un monde qui ne lui irait pas. Un monde bien à lui, qu'il n'aurait jamais pensé partager avec quelqu'un comme elle. Et, encore plus nouveau, cette sensation d'impatience à l'idée de l'émerveiller par son monde qu'il chérissait tant faisait trembler ses lèvres qui se forçaient à ne pas sourire jusqu'aux oreilles.

Oui, il redevenait enfant, pressé de montrer aux autres ce qu'il avait reçu, la fierté de ses biens.

Finalement, il passa devant, sa jument connaissant parfaitement le chemin, posa sa main sur l'arbre, la première branche sans feuilles, nue, attendant qu'un coup de vent ne vienne l'emporter vers d'autres contrées.

L'arbre se fissura, Draco se tourna pour chercher dans les yeux d'Isabel toutes les émotions qu'il y trouva.

-"C'est-" elle n'eut pas les mots, regarda une rue s'offrir à eux entre les deux moitiés de l'arbre qui s'étaient écartées, les passant disparaitre derrière ces dernières, comme si tout un monde se tenait entre elles.

-"Viens." Il claqua ses doigts pour que le cheval de la jeune femme le suive, et le sien entra, au pas, fier dans sa démarche.

C'était comme un rêve éveillé. Tout était devenu plus bruyant, les passants, le vent, les marchants, le temps. Certains s'amusaient à faire tournoyer des objets, d'autres achetaient à manger.

Ils faisaient tache, avec leurs montures, aussi hauts sur des dédales étroits.

-"Descendons." proposa Draco et il sauta le premier.

Isabel attendit qu'il lui tende sa main pour faire de même, mais il partit attacher sa jument plus loin, et elle resta là comme une idiote. Finalement, après avoir ruminé sur ses sentiments étranges vers un malotru alors qu'elle aurait pu aimer un gentlemen du haut Londres moldu, elle descendit à son tour sans difficulté, alla attacher le sien près de celle de Draco qui l'attendait plus loin.

Elle s'approcha, le toisa mais il ne releva pas, trop heureux d'être finalement de retour ici après tant de temps.

Il savait qu'il n'avait pas le droit. Kinglsey le lui avait expressément rappelé ; interdiction de retourner chez les sorciers sauf en cas d'extrême nécessité, comme attraper un mangemort ou aller à l'enterrement de ses parents.

Mais Draco s'en fichait, n'y avait même pas réfléchi outre mesure. Il pouvait, si tel en était la nécessité, trouver un mensonge comme il savait tant le faire.

Il était heureux de retrouver son chez lui.

Il s'avança, aux anges sans le laisser paraitre mais Isabel le voyait bien à la lueur dans ses yeux, entre les passants. Elle resta en retrait derrière, le suivant, ne voulant pas lui gâcher sa joie, préférait l'admirer s'émerveiller, s'extasier devant tout ce qu'il connaissait et qu'elle découvrait.

-"C'est Draco Malfoy." souffla quelqu'un près de lui tandis qu'il remontait la rue.

Aussitôt, et il ne put que s'en apercevoir, les passants s'écartèrent, comme s'il était la dragoncelle et l'éclabouille en même temps.

Il ne devait pas s'en préoccuper outre mesure. Même les rare sorciers de son quartier moldus l'évitaient, c'était ainsi, et ce depuis bien avant la guerre. En règle générale, les sorciers évitaient la famille Malfoy, il avait du s'y faire. Son avant-bras le gratta, le brula, sans savoir pourquoi, comme une douleur du passé qui tentait de revenir.

Il sentit sa paume se réchauffer, et baissa les yeux vers leurs mains entrelacées avant de les relever vers le visage d'Isabel qui s'était rapprochée et lui souriait.

-"Ça nous fait plus de place." lui murmura-t-elle en plissant le nez.

C'était son habitude, lorsqu'elle tentait de raccommoder quelque chose qu'elle avait cassé, lorsqu'elle tentait de se rassurer après avoir gaffé.

Elle passa son autre bas autour du sien, posa sa main sur sa légère chemise, au-dessus de sa marque, et immédiatement il la sentit se calmer, disparaitre de nouveau, ne restant plus qu'un mauvais souvenir.

Il esquissa un sourire qu'il cacha en détournant la tête, continua encore un bout de chemin, lui expliquant les différents magasins.

-"C'est qui, elle ?"

Il y eut des murmures, près du coin d'adolescents qui attendaient devant un vendeur de jus de citrouille.

-"Je ne l'ai jamais vu à Poudlard." souffla un autre.

Isabel sentit le bras du garçon se tendre près d'elle, mais n'y fit pas attention, n'en comprenant pas la raison.

-"Parle-moi encore de tes années à Beauxbatons." dit alors le garçon en fixant Isabel, parlant bien fort.

Les adolescents se turent, ayant entendus. Isabel le regarda de haut en bas, se demandant s'il s'était cogné quelque part.

-"Tu débloques ?" demanda-t-elle mais il l'entraina dans un autre rue de justesse.

Il eut un soupir, adossé au mur rêche tandis qu'elle le fixait avec de gros yeux éberlués.

-"Qu'est-ce qu'il se passe ?" demanda Isabel.

Il leva les yeux vers elle, le regard dur.

-"Je n'aurai pas du t'emmener." murmura le garçon comme à lui-même avant de se reprendre. "Je n'aurai pas du revenir."

Elle s'apprêta à dire quelque chose, lorsque quelque chose dans la rue malfamée à leur droite attira son attention. Outre le panneau "allée des embrumes", elle distingua quelqu'un, au loin, et leva la main pour le saluer.

-"Henri !" cria-t-elle tout haut l'air guilleret et Draco fondit sur elle pour la faire taire, plaquant sa main sur sa bouche et la ramenant à lui, son dos collé contre son torse.

Le garçon au loin releva la tête, chercha autour de lui mais ne vit rien. Alors, ne se doutant de rien, il continua son chemin.

Et Draco le laissa faire, les sourcils froncés.

𝕯𝖎𝖆𝖇𝖔𝖑𝖔 𝖒𝖊𝖓𝖙𝖍𝖊 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant