Chapitre XXVII.

18.5K 1.4K 57
                                    

                      Une fois de plus, Yris changea de position dans ce grand lit. Et celle-ci ne lui convint pas non plus. Elle s'assit en poussant un soupir désespéré, tapota son oreiller et s'allongea tel un pharaon. D'habitude cette position l'aidait à s'endormir mais à cet instant précis, elle l'angoissait. Elle avait l'impression d'être morte. Et l'ambiance macabre de la chambre accentuait ce sentiment. Elle ouvrit les yeux. Il n'y avait pas de fenêtres. La faible lumière provenait des bougies. Les murs étaient rouge sang, le lit en baldaquin était noir, les draps en soie étaient de la même couleur. La décoration était minimaliste, il y avait une coiffeuse en bois noire, une chaise de style de la Renaissance, un miroir mural et un immense tableau devant elle représentant Marie-Antoinette. Yris aimait la royauté. Cependant, elle ne comprenait pas comment Lucian pouvait l'apprécier. Les rois étaient des purs croyants et ils avaient été investis par Dieu.

                       Comme depuis deux heures, ses pensées revenaient sans cesse vers Lucian. De l'ascenseur jusqu'à ce qu'il l'amène dans cette chambre, ils ne s'étaient plus adressés un mot. Ce qui avait encore été plus difficile, c'était que son visage n'avait aucune expression. Parfois, il lui lançait uniquement des regards noirs. Et bien-sûr en signe de "bonne nuit", il avait claqué la porte de la chambre. Quant à elle, elle était partagé entre l'envie de l'étrangler et le besoin de lui sauter dessus. Et depuis qu'elle avait fait son choix, simplement lui parler suffirait amplement. En fait, dès qu'elle lui avait demandé de sortir de sa vie, elle avait regretté sa décision. La peur et la fierté avait parlé pour elle. Elle secoua la tête. Non, elle avait pris la bonne décision. Cela lui éviterait de se brûler les ailes un jour où l'autre. Et dire qu'il dormait certainement qu'à quelques mètres d'elle. Devait-elle se lever et aller le voir? Ne pas ouvrir la bouche et lui sauter dessus? Transférer sa colère en couchant avec lui? Ou plutôt en le tabassant jusqu'à faire rentrer dans son crâne ce qu'était le bien? Enfin, la violence c'était plutôt l'arme du mal. "Putain, il me rend dingue" pensa t-elle.

                         En fait, son fil de pensées représentait parfaitement ce qu'elle ressentait pour lui. Elle le détestait et pourtant il l'attirait. Elle adorait certains points de sa personnalité alors qu'elle n'en supportait pas d'autres. Fumer. Cette idée surgit dans sa tête. Puisqu'elle ne s'était pas ennuyée de toute la soirée, elle n'avait pas pensé à fumer. Maintenant qu'il l'avait énervée et qu'elle ne trouvait pas le sommeil, la cigarette ne tarderait pas à l'obséder. "Vaut mieux pas s'aventurer dans la demeure de Lucifer. Je pourrais tomber sur un chien à trois têtes" songea t-elle. Elle ferma les yeux. Le fait qu'elle n'avait pas son masque de nuit lui procurait une sensation étrange. Elle n'arriverait pas à dormir paisiblement. En plus, elle avait froid. En soupirant, elle repoussa le drap et posa un pied au sol. Le carrelage noir était glacé. Elle frissonna avant même de sortir son corps de sous le drap. Elle était en sous-vêtements puisqu'elle n'avait pas prévu d'affaires de rechange. Au départ, jamais elle n'aurait pensé passer la nuit chez Lucian. Avant de se coucher, elle avait remarqué un shorty noir et un sweat bordeaux posés sur la chaise dans le coin gauche. Elle ne les avait pas enfilés car elle voulait lui être le moins redevable possible. Cependant, cette fois-ci le froid eut raison de sa fierté. Elle se leva et enfila le plus rapidement possible les affaires. Avant de sortir elle se regarda dans le miroir. Avec ses bas, elle devait avoir une allure bien plus qu'excentrique. Elle hurla en tirant sur le bas du sweat. "L'enfoiréééééé!", il y était écrit en blanc et en grand "TEAM LUCIAN". Ce mec lui donnait envie de s'arracher les cheveux de rage. Elle ouvrit précipitamment la porte qui vint se claquer contre le mur. Si elle pouvait le réveiller au passage, cela ne la dérangerait pas du tout.

                         Elle tâtonna sur le mur à la recherche de l'interrupteur. Elle ne se baladerait pas dans le noir. Elle était courageuse mais pas suicidaire. Elle fut soulagée de trouver rapidement l'interrupteur. Elle se trouvait dans un couloir au mur noir et où chaque tableau représentait Lucian dans diverses situations. Lucian posant sur un trône, Lucian à la chasse, Lucian de dos, Lucian de dos mais avec des ailes, Lucian de face et entièrement nu... "Oh mon Dieu.". Elle s'insulta intérieurement d'avoir pu penser à Dieu puis reporta son attention sur le tableau. Il lançait un regard empli de sous entendus et son sexe ne pouvait être aussi grand et imposant. Elle était persuadée qu'il avait demandé au peintre d'abuser son anatomie. En y regardant de plus près, son torse était exactement celui qu'elle avait vu. Donc peut-être que son sexe... Elle secoua la tête. Elle avait déjà chaud si elle continuait à analyser cette peinture, elle chercherait sa chambre et lui sauterait dessus. Elle croisa les bras et avança. Elle se retrouva dans le grand hall d'entrée. Elle ignorait où elle pouvait fumer. Surtout qu'il n'y avait aucune fenêtre. Tant pis, elle irait dans la seule pièce qu'elle connaissait: la salle à manger. Elle ouvrit la double-porte et fut soulagée de constater qu'il n'y avait personne. De même, la table était vide. Elle trouva cela dommage car elle avait un petit creux. Avec leur dispute, il n'était pas passé au dessert. Dans tous les sens. "Tu deviens comme lui!" pensa t-elle en se dirigeant vers la chaise qu'elle occupait précédemment. Elle sortit le paquet et un briquet qu'elle avait caché dans son soutien-gorge. Dès qu'elle sentit la fumée dans sa bouche, elle se détendit. Elle fuma doucement sa cigarette, soufflant lentement la fumée. Donnant à la pièce, une ambiance encore plus envoutante. Elle éteint sa cigarette, la vérifia et mit le mégot dans son paquet. Elle se leva, la tête baissée. Soudain la porte s'ouvrit, elle s'immobilisa.

Diablement Vôtre. Tome I et II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant