Chapitre 7 - Encore Fanny, que faisait-elle là ?

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La cabine de l’ascenseur s'ouvrit sur le huitième étage de l'hôpital, service Orthopédie - Traumatologie. Paul allait enfin retrouver sa moitié et vérifier de ses propres yeux qu'elle allait bien.

Les couloirs étaient calmes, les bruits feutrés. Il s'approcha de la salle de garde et demanda la chambre de Mademoiselle Duchêne.

— Ah oui, le fémur ! s'exclama une infirmière joviale aux cheveux trop frisés, c'est chambre 805 ! s'entendit-il répondre.

— 805, les yeux de Paul se détachaient d'une porte à l'autre, cherchant les numéros et ses pas se faisaient de plus en plus pressés alors qu'il approchait du but. Il lisait les étiquettes sur chaque battant, 804, ... 805 !

Voilà, c'est là. Une main sur la poignée, il leva les yeux au ciel, chassa l’air de ses poumons et prit une grande inspiration qui lui fournirait le courage de voir. Enfin. Une seconde de réflexion et son index frappa deux fois le chambranle. C’était plus pour prévenir de son arrivée, car il n’attendit pas la réponse de l'intérieur.

Rien n'aurait pu l'empêcher d'entrer dans cette chambre. Il poussa doucement la porte.

Dans une lumière diaphane, Emilie était allongée dans son lit. Elle était bien éveillée, l'œil vif, et guettait le nouvel arrivant avec un joli sourire, quasi certaine qu'il s'agissait de Paul.

— Ah, te voilà ! dit-elle.

En guise de réponse, Paul se propulsa au chevet du lit et l’étreignit de ses bras soulagés.

— Ce que j'ai eu peur... chuchota-t-il dans le creux de son oreille.

— C'est rien, je vais juste passer les prochains mois à boitiller et à rendre visite à notre kiné préféré ! s’amusa-t-elle.

Emilie prenait les choses avec calme. Elle n'avait pas subi le même stress que Paul.

Ainsi, elle lui raconta son accident, comment sans qu'elle comprenne pourquoi sa voiture était partie en aquaplaning, puis l'arrivée des pompiers, leur capacité à calmer ses angoisses dans le camion et son transport à l'hôpital.

De son côté, Paul l'écoutait sans mot dire. Il était juste heureux de la savoir saine et sauve. Il ne voulait pas gâcher ce moment de complicité, alors il décida de ne pas lui parler de cette grosse Fanny, de l’étrange sonnerie de téléphone et du message qui le concernait inscrit dans les SMS de cette femme.

Ils passèrent un long moment à se faire des confidences, jusqu'à ce qu'une infirmière pénètre dans la chambre, tirant derrière elle un lourd chariot de soins.

— Bonjour Emiliiiiiie, Bonjour Monsieur. C'est pour les soins, je vais vous faire quelques misères Mademoiselle. Par contre Monsieur je vais vous demander de sortir, s'il vous plaît…

L’air chantant de l’infirmière s’il était enjoué n’en était cependant pas moins impératif. Elle avait parlé sans cesser de sourire mais sans quitter Paul des yeux, non plus. Elle attendait que celui-ci s’exécute.
Emilie leva les yeux sur Paul comme s’il était utile d’entériner la demande de l’infirmière.

Paul sous les yeux de ces deux femmes complices, obtempéra. Avant de filer, il passa une main derrière la nuque de son amie et lui déposa un gros baiser sur ses lèvres. Il se retourna encore, pour prolonger un peu ce moment, tant il trouvait que l’heure de la séparation était venue trop tôt. Un coup d’œil à sa montre et de son doigt il dessina un cercle au-dessus du cadran. Emilie comprit qu'il reviendrait la voir le lendemain matin avec toutes les affaires qu'elle lui avait listées.

Il abandonna sa chérie aux bons soins de son infirmière et se dirigea, d’un pas léger, vers la cage d’ascenseur, soulagé de la laisser en bonne santé et souriante.

Fanny marchait à pas de velours dans le couloir du huitième étage. Lorsqu'elle aperçut Paul qui sortait d'une chambre, elle se cacha derrière un haut chariot contenant les plateaux repas, qui avait été abandonné près de la salle de repos. Elle l'espionnait. La chance était avec elle. L’heure du repas approchait et une petite agitation prenait vie dans le couloir.

Elle devait découvrir à qui Paul rendait visite et agir en toute discrétion. Surtout qu'il ne la voie pas, sinon il allait encore lui poser toutes ces questions auxquelles elle n'avait pas le droit de lui apporter de réponse. Adossée au chariot, elle regarda encore une fois le message inscrit dans sont téléphone "Réquisitionner Carmin Paul". Ça, ce n'était pas possible ! Elle secoua un peu la tête comme pour se débarrasser de ses doutes, leva les yeux au ciel et souffla assez fort faire remonter les cheveux de sa frange qui lui tombaient dans la figure et lui cachaient un œil.

Elle fourra son téléphone dans sa poche, comme pour ne plus voir cette phrase qui la contrariait. Elle se retourna encore pour vérifier que la voie était libre et que Paul prenait bien la direction des ascenseurs. Dès que les épaisses portes métalliques eurent emporté le beau jeune homme, elle sortit de sa cachette et s’approcha de la chambre 805. Au moment même où elle se préparait à entrer, une infirmière engagea son chariot de soin dans l’étroit passage, fort occupée à gérer sa marche arrière pour ne pas égratigner les murs. Fanny se dégagea et avec un sourire empathique retint la porte pour la laisser passer. L’infirmière remercia Fanny d’un sourire machinal. Le champ était libre. Elle pouvait découvrir qui il était venu voir.

Calme et apaisé, Paul rêvassait en se laissant enfermer dans la cabine. Avant que les portes ne se touchent il eut juste le temps de distinguer une silhouette qui lui était devenue familière : Fanny. Elle était dans le service d'Emilie ? Que faisait-elle là ?

Le temps de réagir pour stopper la fermeture des vantaux, l'ascenseur avait déjà entamé sa descente, celles-ci ne se rouvriraient qu'au rez-de-chaussée de l'hôpital.

Fanny, devant la chambre d'Emilie, s’approcha et toqua à la menuiserie déjà ouverte. Elle s’avançait, sans attendre la réponse.

L'audace du destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant