Chapitre 35 - La dentelle est si douce

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Fanny avait revêtu ses beaux habits colorés tout juste achetés et attendait Paul, assise sur le banc devant l’hôpital, là où, la première fois elle lui avait proposé un rendez-vous. Leur premier rendez-vous.

Paul sortit de son roadster, il portait son uniforme-à-séduire-et-à-extorquer par son charme et sa galanterie toutes les informations qu’il convoitait. Toutes les chances étaient de son côté. Seulement, pour que ça marche, il fallait juste qu’il oublie de penser à Emilie, à Emilie qui n'était plus là, à Emilie qui ne serait plus jamais auprès de lui. Au souvenir d’Emilie de plus en plus douloureux.

Il se dirigeait droit vers l’entrée de l’hôpital, cherchant des yeux la Fanny qu’il soupçonnait être la cause de son malheur. Il ne la voyait pas. Elle ne devait pas être arrivée, sans doute occupée à gérer des messages étranges dans son cellulaire.

Ses yeux allaient de droite à gauche à la recherche d’une femme ronde connectée à son écran, quand il discerna une silhouette empâtée et colorée assise sur le banc qui consultait un portable. Les couleurs chatoyantes semblaient tellement à l’opposé de Fanny qu’il la vit sans y prêter grande attention.

Un instant seulement, car à bien y regarder, elle avait toutes les caractéristiques de la femme qu’il avait déjà tenue dans ses bras.

Plus il approchait du banc où était assise sa cible, plus son cœur battait fort. D’abord, il était en mission, il ne devait pas l’oublier, il ne savait pas dans quoi il mettait les pieds, mais ça avait l’air grave et potentiellement dangereux. Mais il était un sentiment, inconvenant bien que plaisant, qui se faisait jour dès qu’il apercevait cette jeune femme et qui décuplait lorsqu’il effleurait sa peau. Ce sentiment existait bel et bien, même s’il n’avait qu’une envie : le faire disparaître.

Arrivé devant le banc, il n’eut pas le temps de parler que Fanny abandonna son téléphone au fond de son sac et se leva pour l’accueillir. Elle posa ses lèvres sur les siennes comme s’ils étaient ensemble depuis des mois. Paul chassa l’émotion qui naissait en lui. Il était en mission.

— Bonjour Fanny, articula-t-il pour se donner une contenance et éloigner cet émoi qui prenait de plus en plus de place dans sa tête et qu’il n’arrivait pas à expliquer. Mais il ne put empêcher ses mâchoires de trop se serrer pour ne pas montrer son exécration au contact soudain de cette femme.

— Bonjour mon Paul ! dit Fanny tout sourire, comme si elle n’avait rien remarqué. Ça fait un bon moment que je suis là, en fait mon prof de sciences nat’ est absent.

— Ah, je vois, tu veux que l’on aille chez toi, se risqua Paul, dont l’objectif était de résoudre l’énigme au plus vite.

— J’aimerais aller faire du shopping si ça ne t’ennuies pas, tu voudrais bien m'accompagner ? répondit-elle du tac-au-tac sans tenir compte de la question de Paul.

S’il voulait arriver à son but, il devait en passer par là. Autant faire contre mauvaise fortune bon cœur, et après tout, il pourrait tout de même en apprendre plus sur son intrigante.

Bras dessus, bras dessous, ils se dirigèrent en direction du centre ville.

Paul devait prendre sur lui à s’exhiber de la sorte avec cette femme aux proportions abusives. Et puis, il appréhendait de croiser une connaissance qui le maudirait d’être au bras d’une autre jeune femme à peine deux jours après avoir enterrer sa compagne.

Il tournait donc la tête tout autour de lui prospectant des visages connus.

Ce faisant, son regard apprécia dans le reflet d’une vitrine de magasin un couple qui flânait dans la rue et qui cramponna son attention jusqu’à la révélation qu’il s’agissait d’eux. Paul et Fanny.

Paul et Fanny, Paul et Emilie… Les deux prénoms finissaient en « i »…

Surpris par cet élan qui se révélait d’une manière toujours plus déconcertante.

Tout à coup, son bras fut happé par la poigne de Fanny qui l’attira dans une boutique de lingerie. Aussitôt à l’intérieur, cerné par les culottes, les nuisettes et les soutiens gorges, son sang ne fit qu’un tour. Il se trouvait avec cette femme, dont le magnétisme commençait à l’atteindre, au milieu de tous ces sous vêtements féminins, tous plus sexy les uns que les autres. Il inspira tout ce que ses poumons voulaient bien engranger d’air pour remettre ses idées en place et reprendre un peu de constance.

Il choisit de fixer son attention sur de grandes culottes en coton bordée d’une dentelle ridicule, il reprenait le dessus.

Il ne devait pas quitter son ancrage de vue : il était en mission. Il devenait de plus en plus compliqué pour lui de s'en souvenir.

C’est alors que Fanny lui secoua sous le nez un cintre sur lequel était fixé un ensemble guêpière-string dans des couleurs de framboise écrasée. Son instinct de chasseur se réveilla.

L'audace du destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant