Vaisseau amiral Mercor, orbite de Taranis.
La Haute Cour de la reine Mebd. La dernière fois que j'ai vu ces lumières et ce symbole héraldique, c'était il y a plus de dix mille ans. Et ce n'était pas dans cette nuit sidérale, mais au sol, dans une superbe forêt entourée de montagnes immaculées. Une rivière cristalline coulait devant, et d'immenses tours de nacre s'élevaient vers les cieux. Voilà ce qui reste... un vaisseau en passe de sombrer, attaqué par des cafards aux dents rouillées.
C'est dommage, quand même.
Je finis mon gwidth et tends ma coupe vide au fynasí qui attend derrière moi.
— Encore.
Il se hâte de me la remplir à nouveau. J'ai déjà vidé deux flacons depuis le début de cette bataille... Je vais finir comme Uriel, toujours entre deux vins.
Un bruit de pas martiaux résonne derrière moi. Je reconnais Nazhdru à cette façon insolente de marcher.
— Le Mebd est en train de se faire laminer par les Marcheurs, ard-æl, déclare-t-il en se calant dans mon dos. Ils se crashent en masse sur le vaisseau et s'y accrochent comme des lamproies... La bataille est finie : il n'y a rien à récupérer.
Les femelles... c'est pour elles que les chasseurs sont là. S'il ne reste que des cadavres, ça ne les intéresse pas.
Mais on n'a toujours pas la tête de ce Círdan.
— Vous avez retrouvé le fugitif taráni à la chevelure rouge ?
— Non, ard-æl. Nos chasseurs ont perdu sa trace il y a un bout de temps, déjà.
Un « bout de temps ». Et ce n'est que maintenant qu'il m'en informe.
Il faudra peut-être suggérer à Lathelennil de bousculer un peu l'organigramme de sa chasse.
Ce Nazhrdu est un incapable.
Je prends ma décision rapidement.
— Bon. Changement de plan. On n'a pas le choix : il faut défendre le Mebd. On traitera avec Edegil après.
Nazhdru me fixe, interdit.
— Défendre le Mebd... ? Mais...
Je lui enfonce le revers de mon poing dentelé d'iridium dans la bouche.
— Je t'avais dit que je te ferais arracher la langue la prochaine fois que tu discuterais mes ordres, Nazhrdu, grincé-je en lui attrapant la nuque. Je vais te la laisser pour que tu puisses lécher un ou deux skryll après la victoire, par pure amitié envers mon cousin. Par contre, je veux que tu la fermes le reste de la bataille.
Je le repousse brutalement contre la rambarde sculptée du pont, où il s'écroule lourdement. Alors qu'il se redresse, la main devant sa bouche ensanglantée, je me tourne vers le nouvel intendant provisoire.
— Allez me quérir l'alchimiste. Qu'il recouse la bouche de cet incapable. Et nommez Unila à sa place, à la tête de la chasse.
— La bouche, Seigneur ? Ou sa plaie ? s'enquiert le serviteur.
Je verrouille mes yeux dans ceux de l'intendant.
— Sa bouche. Avec du fil de fer. Ensuite, vous me le renvoyez sur le front. Qu'il essaie d'accomplir une action prestigieuse, pour une fois.
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LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)
Science Fiction"Lle naa vanimë. Tu es mienne." Pour lui, je suis sa chose : une captive, une esclave. Qu'il traite mieux que les autres, qui a le droit à certains égards. Qu'il subjugue avec ce pouvoir d'attraction incroyable propre aux ældiens, qui fait perdre la...