LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)

Chp 4 - Faith : sorcière relapse

Vaisseau inquisitorial Saint Cebrail archange, orbite de Pangu

J'ai tellement redouté cette rencontre. Quand le soldat qui me garde l'annonce, mon cœur manque de sauter hors de ma cage thoracique.

— Le Grand Exécutant de l'Ordo Inquisitorium, Monseigneur Gerald Zrivian.

Les plantons du SVGARD s'aligne en rang d'oignon, droit comme des i, tandis que Gerald s'avance. Sans me regarder, comme la première fois. Son manteau d'uniforme en cuir noir négligemment posé sur les épaules, les cheveux strictement tirés en arrière, dévoilant ses tempes rasés et son visage racé, il retire ses gants comme s'il venait tout juste de débarquer de son vaisseau. Ce qui doit être le cas.

— L'hérétique est prête à être entendue, Frère Inquisiteur, lui annonce un gradé. Doit-on lui administrer du sérum de vérité ?

Gerald tourne ses yeux vert lagon vers moi. En croisant son regard fluorescent, j'ai l'impression de me prendre un coup de couteau.

— Ce ne sera pas la peine. J'ai d'autres moyens de la faire parler. La soumission chimique, on verra après, si elle résiste.

— Bien, Monseigneur.

Gerald tire une chaise, la retourne, et s'assoit à califourchon dessus, face à moi, les bras croisés sur le dossier. Il ne reste plus aucune trace de l'attitude polie et attentive qu'il m'avait montré lors du premier interrogatoire.

— Faith... Quelle surprise, de te revoir ici.

Je lève les yeux vers lui.

— Gerald... Tu dois être heureux, d'avoir remis la main sur moi.

— Pas tellement, soupire-t-il sans me quitter des yeux. Je ne suis jamais heureux de revoir une égarée que j'avais guidée vers la lumière s'entêter dans ses erreurs... Je pensais t'avoir tendu la main, Faith. Mais tu as de nouveau péché, et de manière plus impardonnable encore. En jargon inquisitorial, tu es une « relapse », une hérétique qui est retombée dans ses erreurs malgré l'aide apportée par l'Église. Je t'avais absoute, et tu avais promis de ne plus recommencer.

Sa diatribe amène un sourire sur mes lèvres. Il est tellement à côté de la plaque...

— « Recommencer »... Tu crois que je commande à mes sentiments ?

Gerald me regarde sans la moindre compassion. Je sais ce qu'il pense.

Elle parle comme une damnée.

— Où est ton enfant ? attaque-t-il.

— Quel enfant ?

— Celui que tu as eu de Tamyan.

Je garde le silence, le laissant deviner la vérité tout seul.

Gerald baisse les yeux sur mes mains pleines de sang. L'expression de son visage... sa lèvre serrées dans une moue de dégoût... son regard, lui, reste froid comme la glace vive.

— Tu l'as vraiment fait, alors, murmure-t-il. Tu as tué ton propre enfant... ce petit semi-ældien...

Comme ta mère a essayé de faire avec toi. Parce que les semi-ældiens sont des abominations : c'est ce que tu disais, Gerald.

— Il le fallait. Pas pour les raisons que tu penses. Je ne voulais pas que mon fils finisse comme toi, Gerald. Cobaye de labo. Un chien dégriffé à qui l'on a mis un collier, appris à faire des tours pour amuser les hommes.