Autremer
Isolda, peu rassurée, tenait la main gantée d'iridium de l'immense ældien qui la guidait dans le noir, s'y cramponnant comme si sa vie en dépendait. Śimrod ne disait pas un mot, et les menait d'un pas sûr et plutôt rapide dans les sombres dédales de l'Autremer, la dimension spectrale qui reliait son vaisseau et celui de Ren. Les bruits inquiétants lui semblaient plus nombreux qu'ils ne l'avaient été lors de son périple précédent. Elle buta sur quelque chose et faillit tomber, provoquant la chute de quelque objet qui rebondit pendant un temps infini. Śimrod s'arrêta et la saisit dans ses bras, où elle rejoignit Caëlurín.
Puis, à partir de là, il se mit à courir.
Pendant un inquiétant moment, Isolda se demanda ce qui se passerait si Śimrod ne retrouvait pas le chemin du vaisseau de Ren. Mais la jeune fille avait consenti à sortir sa crapaudine sitôt passée la porte de la salle des armes, et Śimrod, qui l'avait contemplée un moment en fronçant les sourcils, l'en avait remercié.
— Un cristal-cœur, avait-il décrété en regardant l'objet. Étrange que tu possèdes cela... Et encore plus étrange que cela établisse une connexion entre là-bas et ici. Mais tout est étrange, chez toi. L'essentiel, c'est qu'elle nous mène au cair de mon fils.
— Vous pouvez parler, avait marmonné Isolda. Avec vos deux mètres cinquante, vos cheveux blancs pleins de nœuds, votre peau noire comme le diable et vos yeux rouges... Et maintenant, c'est moi qui suis bizarre ? Vous autres ylfes ne manquez pas d'air !
Śimrod lui avait jeté un regard à la fois surpris et réprobateur. Puis il avait éclaté de rire.
— Allez, ne perdons plus de temps. Je t'emprunte ta pierre : je te la rendrai après.
Isolda y comptait bien. Évidemment, si Śimrod voulait la lui prendre, elle n'aurait aucun moyen de s'y opposer. À moins de retrouver Rika et de lui demander d'intervenir.
Mais à présent, Isolda désespérait de revoir Rika un jour. Qu'allaient-ils trouver, de l'autre côté ? Et si les soldats s'étaient emparés du vaisseau, et qu'ils étaient accueillis par toute une faction d'hommes en armes ? Dans ce cas, n'aurait-il pas mieux valu, plutôt, rester de l'autre côté, sur le cair de Śimrod, et élever Caëlurín dans la paix et la sécurité ? Et si – scénario encore pire – les soldats avaient détruit le vaisseau ? Où allaient-ils atterrir ?
Anxieuse, Isolda décida de partager cette pensée avec Śimrod.
— Qu'allons-nous faire, si le cair est détruit ?
À sa grande angoisse, Śimrod avait stoppé net.
— Détruit ? Tu parles de mon cair ? demanda-t-il.
— Je parle de celui de votre fils, Ren, répondit Isolda par-dessus son épaule.
Elle n'y voyait rien, et se tenait dans les bras de l'ældien, position ô combien inconfortable.
— Eh bien... Je suppose que nous resterons coincés ici pour l'éternité, dit-il, toujours rassurant. Il nous faudra alors retourner sur nos pas, en espérant que la pierre nous montre le chemin dans l'autre sens, sans être repassée par l'autre dimension. Rien n'est moins sûr, d'après le peu que je sais des réseaux dimensionnels.
Isolda se décolla un peu de lui, par réflexe, pour tenter de le voir.
— Et vous vous y connaissez bien, en réseaux dimensionnels ? s'enquit-elle.
Elle n'était pas trop sûre, pour sa part, de savoir de quoi il s'agissait.
— Je n'y connais strictement rien, admit Śimrod, toujours aussi frontal. Je suis un guerrier, pas un ingénieur !

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LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)
Ciencia Ficción"Lle naa vanimë. Tu es mienne." Pour lui, je suis sa chose : une captive, une esclave. Qu'il traite mieux que les autres, qui a le droit à certains égards. Qu'il subjugue avec ce pouvoir d'attraction incroyable propre aux ældiens, qui fait perdre la...