Vaisseau de croisière "Perle de Nuniel"
Isolda s'était promis qu'une fois les batailles terminées, elle parlerait à Śimrod. Il n'avait pas voulu l'écouter, la dernière fois. Mais il le fallait. Elle ne pouvait plus attendre, et elle sentait la rage de l'ylfe, son besoin d'apaisement. En fait, il ne s'était jamais remis de la trahison d'Ardaxe, de la perte de ses enfants... et d'elle-même.
À cette époque lointaine où j'étais dans une autre peau, un autre corps.
L'idée paraissait folle à la jeune femme, mais pourtant, elle savait que c'était vrai. Elle se souvenait. Pas de tout. Mais il y avait deux choses dont elle était certaine : sa haine pour Ælfbeorth, le semi-ylfe qui s'était servie d'elle, et son amour pour Śimrod. Sa tristesse pour ses enfants, aussi. Mais Innafay lui avait raconté ce qu'ils étaient devenus. Ardaxe les avait sauvés... et il les avait pris dans sa troupe, l'Aleanseelith, leur nouvelle famille.
Il faut que je lui parle. Que je lui dise.
Ce qui était difficile. Il avait refusé de l'écouter, la dernière fois. Śimrod pouvait se montrer particulièrement obstiné, quand il voulait. Un vrai orc.
Cette pensée fit sourire Isolda. Pour elle, « orc » n'était pas une insulte. Elle se souvenait quand Śimrod lui avait fait découvrir cette culture, les révélations qu'ils avaient eu sur cette « espèce » soi-disant différente des ældiens. Visiblement, la plupart avaient oublié cette vérité, des millénaires après. Tant pis pour eux. Ce n'était pas à elle de le leur réapprendre. Qu'ils découvrent cela tous seuls. Elle, elle avait mieux à faire.
Déterminée à dire la vérité à Śimrod, Isolda referma la porte de sa chambre, et se dirigea vers la plage où il jouait avec les enfants.
*
— Śimrod... je peux te dire quelque chose ?
L'ældien lui jeta un regard résigné de ses yeux rubis. Visiblement, il s'attendait à ce qu'elle vienne le voir.
— Oui. Je suppose qu'il est temps, soupira-t-il en reposant le petit Caël à terre.
Le hënnel se mit à hurler. Caël était particulièrement capricieux, et même, turbulent. Pour Isolda, c'était lié à sa séparation d'avec les jumeaux, qui eux, s'étaient encore plus rapprochés, et enfermés dans leur petit monde à part. En réaction, Caël était devenu très en demande d'attention, et presque difficile.
Isolda se pencha vers lui.
— On t'emmènera à la cascade après. Mais pour l'instant, les grands ont besoin de parler, d'accord ?
— Allez voir vos parents, grogna Śimrod. Tiens, Lathelennil Niśven... qu'il serve à quelque chose, celui-là !
L'ældien bicolore passait justement sous le couloir abrité à ce moment-là. Isolda ne l'appréciait pas des masses – après tout, il avait essayé de la coincer dans un coin, et elle avait dû lui mentionner certaines choses pour le faire fuir -, mais elle savait qu'il ne ferait pas de mal aux petits.
— Quoi ? leur lança-t-il sans quitter l'ombre de la paillote.
Dans l'écrin de ténèbres, son visage pâle ressortait comme un masque. C'était un visage étrange, foncièrement différent de celui de Ren ou Śimrod, un visage d'animal, de chat ou de loup, qu'on aurait ciselé dans celui d'une impossible beauté masculine, avec des yeux sauvages, à moitié fous, irrésistibles. Isolda n'avait jamais vu de visage comme ça, jamais, et elle se méfiait de cet être exhalant la malveillance et le vice, qui provoquait autant la fascination que la peur.
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LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)
Science Fiction"Lle naa vanimë. Tu es mienne." Pour lui, je suis sa chose : une captive, une esclave. Qu'il traite mieux que les autres, qui a le droit à certains égards. Qu'il subjugue avec ce pouvoir d'attraction incroyable propre aux ældiens, qui fait perdre la...