Chp 21 - Rika : le mirage des jours passés (2)

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Vaisseau-monde ældien Ráith Mebd, orbite de Taranis, pont des vaisseaux


Je franchis le pont menant à l'Elbereth en laissant échapper un soupir nostalgique. Le sas s'ouvrit sur Dea, accompagnée de mes enfants.

— Bon retour parmi nous, capitaine, sourit-elle.

Je me précipitai dans ses bras, émue aux larmes. Enfin un peu de retour à la normale !

— Dea ! J'ai cru ne jamais te revoir !

Autour de nous, les trois enfants sautaient en piaillant, excités comme des puces.

— Pour moi, ça n'a duré que l'espace d'un instant, m'apprit-elle. Le seul souci, c'est que je n'ai aucun souvenir entre notre arrimage à la Nouvelle Arkonna et maintenant. Bien sûr, le commandant m'a briefé... Tu en as vécu de dures, Rika.

J'échangeai avec elle, l'assommant sous mon débit rapide. Avant l'arrivée de Tanit, qui m'avait fait douter d'elle, Dea avait été le plus proche de ce qu'on peut appeler une meilleure amie.

Elbereth apparut dans son dos. À la vue de sa peau noire comme l'onyx et son aura posée, tranquille, que rien n'impressionne, je me sentis tout de suite mieux.

— Alors ? Qui avait raison, finalement ? me tança-t-elle, narquoise. Si tu nous avais laissés mener à bien le protocole en rade du Mihrendelas – éliminer tout intrus à vue – on aurait évité bien des déboires, non ?

Je devais avouer qu'elle avait raison.

— Je suis contente de te revoir, Elbereth.

La wyrm posa sa fine main noire sur mon épaule.

— Moi aussi. La prochaine fois, laisse-nous gérer, d'accord ?

Je hochai la tête.

— Si tu cherches Alfirin, il dort, reprit-elle. On a reconfiguré tout le vaisseau tel qu'il était avant l'attaque de l'Holos.

C'était vrai. Tout était comme avant. Il y avait toutes nos affaires, disposées exactement de la même façon qu'avant.

Une immense bouffée de bonheur réchauffa mon ventre. Enfin. J'étais de retour chez moi.

Après avoir pris une collation, discuté avec tout le monde et couché les petits, je pris la direction de ma chambre. À présent, mes aînés étaient trop grands pour avoir leur panier avec nous, et, Caëlurín ayant exprimé le souhait de dormir dans le leur – il n'aimait pas être tout seul la nuit, le pauvre petit père ! – je l'avais laissé dans la chambre des grands.

Ma chambre. Telle que je l'avais laissée, telle que je ne l'avais pas vue depuis des mois, que je croyais perdue pour toujours. Avec Ren dedans.

Je décidai de ne pas le déranger. Après tout ce qu'il avait dû faire... J'étais déçue, mais à la fois un peu rassurée. Je ne savais pas trop comment briser la glace, avec lui, vu qu'il n'avait strictement aucun souvenir de notre relation.

Je devrais déjà m'estimer heureuse qu'il me reprenne et me trouve à nouveau séduisante, pensai-je en me glissant dans le lit à côté de lui. Comme à chaque fois que j'étais en contact avec plus de cinq ældiens, le choc avait été rude, lorsque je m'étais vue dans le miroir. Je ressemblais à un petit singe malingre.

Allongée sur le dos, je fixai les étoiles au-dessus de nous. Même si je ne connaissais pas le coin et donc aveugle aux constellations qui brillaient là-haut, cette vue me réconfortait. J'étais chez moi. La sensation des draps, le silence du vaisseau, le souffle de Ren qui dormait à côté de moi : tout cela m'était familier. C'était là que je discutais avec Ren le plus souvent et regardais des films avec lui. C'était également là qu'avaient eu lieu la mise en route et l'entretien de ma portée, ainsi que leur suivi, après la naissance.

LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant