Chp 3 - Tamyan : ce que je fais de mieux (4)

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Fou de douleur et de rage, trainant par les cheveux le corps d'une première victime de ma juste colère - cet intendant sluagh qui a cru qu'il pouvait se montrer insolent envers un prince de sang - j'arpente les couloirs en direction de la terrasse où m'attend Anarion, lorsqu'un guerrier déboule dans mon champ de vision. Ma lame est aussitôt sur lui... ou plutôt, sur elle.

Unila.

— Un message urgent et secret du prince Lathelennil, m'annonce-t-elle, le souffle court. Qui nous vient tout droit du Rhaenya, syntonisé par ses soins.

Je la relâche, rengaine dans un sifflement d'acier.

— Montre-moi.

Elle me tend un bout de... papier toilette humain plié en quatre.

C'est pas vrai... C'est ça, la "discrétion" de Lathelennil ?

Mais c'est écrit en Commun, une langue que seuls mon cousin et moi maîtrisons à Dorśa.

Je détiens Killyann. Il est en vacances avec moi et ma femelle humaine près du royaume de Nuniel. J'espère que tu as quelque chose d'intéressant pour moi à offrir en échange, car j'apprécie beaucoup ce petit faux-singe : il est mignon comme tout, et il m'appelle déjà papa. Ton meilleur cousin, Lathelennil.

Je relève les yeux vers Unila.

— Tu l'as lu ? lui demandé-je, la main sur le manche de ma dague. Montré à quelqu'un ?

— Non, Tamyan, je t'assure. Dès que je l'ai reçu, j'ai accouru pour te le donner.

Sa voix tremble, mais ce n'est pas de peur. C'est du désir. Parce que je fais preuve d'autorité envers elle.

— Bon. Dis à Lathelennil que...

— Je ne sais pas où il est, Tamyan, m'interrompt-elle. On a perdu le contact avec le Rhaenya peu de temps après avoir reçu ce message.

Il y a forcément un rapport.

— Bien, annoncé-je après avoir réfléchi un court instant. Dis à tes chasseurs de se préparer à repartir... on repart en chasse.

— Oui, ard-æl, dit-elle en ployant la nuque. Puis-je demander où ta Grandeur compte déployer nos troupes ?

— Dans le système de Nuniel. Je vais sonner le ralliement tout de suite... comme ça, on ne perdra pas de temps.

Unila, promue premier chasseur de la flotte sous mon commandement, me tend le cor qu'elle porte autour de l'épaule. Elle me le tend tête baissée, à deux mains, avec une déférence absolue.

Nazhrac respire peut-être pour une lune de plus, et Fornost-Aran s'imagine qu'il a encore le pouvoir de me briser... mais cette Cité, et tous ces gens, sont acquis à ma cause, et tremble d'impatience à la seule idée de vivre sous ma main. Je vais le prouver à ceux qui doutent... tout de suite.

Anarion est toujours là. Je lui lance le sluagh méprisant à qui j'ai tordu le cou dans le couloir, et il le gobe goulument en deux coups de crocs, faisant joyeusement craquer ses os. J'en profite pour monter sur son dos. Unila, debout sur la terrasse, me regarde d'un air éperdu, les yeux brillants, alors que je porte le cor à ma bouche.

Le barrissement sourd et sinistre de l'hallali résonne dans toute la Cité, repris çà et là dans les tours occupées par l'armée, qui, toujours, veille, assoiffée de sang. Une fois, deux fois, trois fois... je crois que les chasseurs ont compris. Dans moins d'une heure, la flotte sera rassemblée, prête à partir.

Je n'ai qu'un seul regret. Ne pas pouvoir offrir à Faël ce que je lui avais promis ce matin, en partant.

Mais elle aura mieux. Notre fils, que je vais ramener dès maintenant. Malheur à ceux qui tenteront de m'en empêcher, que ce soit Lathelennil ou les armées conjointes de la galaxie entière.

LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant